La nuit est on ne peut plus calme et tranquille. On entend bien un lointain camion de temps en temps, mais ils sont bien rares. De là à dire que c’est trop silencieux… non, n’exagérons quand même pas ! Hier, un peu tannés de la polenta, on avait sauté le petit déjeuner. Comme on a fait l’épicerie, par contre, on peut recommencer à varier un peu les petits déjeuners, et c’est vrai que ça fait du bien de commencer la journée avec des granola (muesli). Ça fait changement !
Le ciel est grisailleux quand on quitte notre petite forêt sympathique, qui nous a si bien tenu compagnie pendant la nuit. On ne roule pas très longtemps avant que la forêt disparaisse, nous précipitant dans le désert typique de la région. Un truc pas complètement totalement désertique donc. Il reste quelques mini plantes bien sèches qui poussent au milieu.
On quitte une fois de plus la route principale (qu’on avait rejoint en quittant une route principale que l’on avait rejointe en quittant une route principale), pour prendre la direction de Fort Rock. Petit village qui doit son nom à un caillou voisin. Un caillou parfaitement bien nommé soit dit en passant. De loin, on voit d’abord apparaître une palissade. Pour découvrir ensuite que la palissade n’est qu’un côté d’un magnifique fer à cheval. Un endroit parfait pour installer une armée, et défendre l’endroit contre des envahisseurs. Bon, il faudrait juste une armée et des envahisseurs, et c’est pas avec les quatorze habitants et demi de la région que l’on fera quelque chose… mais c’est toujours ça, en théorie.
On se promène un peu à l’intérieur de cette magnifique formation ; on escalade un tit peu pour varier les points de vue, on regarde, on admire. On se plaint un peu du ciel gris et de la température un peu fraîche. On est quand même dans un désert, non ?
Et puis en version panoramique, quand on regarde vers l’extérieur :
Et quand on regarde vers l’intérieur :
On reprendra ensuite la route, vérifiant rapidement si la ville de Fort Rock n’aurait pas un téléphone publique, mais ça n’est pas le cas. Peut être que notre étape suivante, Christmas Valley, sera plus civilisée.
Christmas Valley est en effet un peu plus grande que Fort Rock. D’ailleurs, à peine entrée dans la ville (ça devient vraiment difficile d’appeler ce genre d’endroit une ville, vu qu’en fait, c’est surtout un plus grand nombre de maisons, plus proches les unes des autres, mais qui ne ressemble vraiment pas à ce que j’appellerais une ville. Ou un village) on trouve un bureau de poste. J’avais quelques timbres à acheter et des cartes à envoyer. C’est donc parfait. Le vendeur n’est même pas plus surpris que ça que je demande des timbres pour le Canada et la France. Il doit avoir l’habitude, sans doute. Sur le parking, par contre, on me demande si je viens de Colombie Britannique. La question me surprend un peu, vu que le van est très clairement immatriculé Québec. Je réponds donc que je viens de Montréal, ce qui semble impressionner mon interlocuteur, qui me dit « so you’re french. Bonjour ». Oui, même au fin fond de l’Oregon, les gens essaient de mettre un ou deux mots de français quand ils me parlent !
Je m’arrêterais à nouveau, juste après, alors que je vois une cabine de téléphone à côté d’une épicerie. J’en profite donc pour faire un petit appel outre-atlantique. Avec les fuseaux horaires, et les changements d’heures récents, je ne suis pas tout à fait sûr de ne pas appeler au milieu de la nuit, mais à priori mon calcul était correct, et je ne réveille personne. Pendant que je parle au téléphone, une voiture s’arrête. Un couple en descend, regarde le van en souriant. M’entend parler français au téléphone, ils font le rapprochement assez facilement, et me salut d’un mouvement de tête, l’air un peu déçus de ne pas pouvoir me parler. Ils croiseront Danielle à l’intérieur de l’épicerie, et en profiteront pour demander confirmation si je viens bien du Québec. Un imposteur est si vite arrivé !
Amusant, quand même, de constater que l’année passée à la même date, j’arrivais à Tucson, en Arizona, à la fin d’un road trip de 6000 kilomètres en quelques jours à peine. Cette année, je suis encore plus perdu au milieu de nul part, au milieu d’un road trip encore plus fou, et beaucoup plus long… que sera l’année prochaine ?
Danielle profite de son passage à l’épicerie pour récupérer un pamphlet sur des dunes qui seraient, semble-t’il, pas trop loin d’ici. La photo en couverture est des plus inspirantes, l’explication pour y aller est facile (tout droit pendant 12 kilomètres, à gauche, tout droit pendant 12 kilomètres, à droite, tout droit pendant 6 kilomètres). On décide donc d’y aller. Les indications sont parfaites exactes. Quand ils disent tout droit, c’est tout droit. Bon, en même temps, vu la géographie des lieux, je comprends assez parfaitement la volonté de ne pas mettre de virage, mais peut être que des fois, quand même, juste pour le plaisir, non ? Non. Bon, d’accord.
Je pensais que la route nous amènerait jusque sur le bord des dunes, mais on se contente de les voir un peu à l’écart, à deux ou trois kilomètres. Après une petite hésitation, je transforme une fois de plus le Pourquoi pas ? en véhicule tout terrain, et m’engage sur un petit chemin de terre. Petit, il l’est vraiment. Il est plus conçu pour les quads que pour les vans. Mais ça roule quand même, et le Pourquoi Pas ? poursuit son chemin bien sagement, pour nous emmener jusqu’au pied des dunes.
Elles sont juste devant nous. Une petite pente, pas trop raide, permettrait même au van d’aller faire un tour dessus. Je vérifie à pied, ça a l’air passable. Je n’ai pas encore fait trop d’expérience de ce genre avec Pourquoi Pas ?. Entre autre parce que je n’ai pas nécessairement envie de l’abîmer. Mais je décide de faire le test. Après quelques essais, pourtant, je dois bien me rendre à l’évidence qu’il ne montra pas. En fait, il monte sans problème la partie la plus raide, mais le sable devient plus léger et moins dense après, et c’est là qu’il patine. Autant ne pas trop insister, donc, et ne pas rester coincé au milieu de nul part.
À la place, on va se promener bien sagement, à pied sur les dunes. Non sans avoir mangé un magnifique sandwich rôti de boeuf + fromage à la crème + avocat avant de partir à l’aventure. C’est quand même agréable de varier la nourriture des fois !
On repère une belle grosse dune un peu plus loin. On va donc lui rendre visite. On fait la course jusqu’au sommet, d’où la vue est assez grandiose, et un peu déprimante en même temps. Mais en même temps, quand on aime les immensités vides à perte de vue, c’est pas mal !
Immense et vide, mais qui se prête parfaitement à un petit 360. Une Danielle à droite, une Danielle à gauche.
J’en profiterais également pour faire quelques courses de descente dans le sable, histoire de ne pas perdre la main, maintenant que je sais si bien faire !
L’heure tourne tranquillement. On refait donc les 6 kilomètres, on tourne à gauche, 12 kilomètres, et on tourne, cette fois, à gauche, histoire de reprendre la route en direction de la 395. Ce n’était pas l’itinéraire que j’avais envisagé de prendre, mais celui-ci marche tout aussi bien, et nous fait arriver un peu plus au nord. Ce qui veut dire plus de 395. C’est parfait.
La route est longue. Une centaine de kilomètres, environ. Au milieu de rien. D’autant plus longue que je continue à rouler à 90 km/h, un rythme qui convient parfaitement au Pourquoi Pas ? et à son réservoir. Bon, d’accord, je craque deux fois en essayant de voir les limites que je peux atteindre. 130 sur du plat, je n’ose pas aller beaucoup plus loin. 150 en descente, j’ai l’impression qu’on va s’envoler. Je n’insiste pas plus.
Et puis finalement, une dernière immense descente, une grande vallée très large. Aucun doute, c’est la signature de la 395. Je la devine qui est là bas, qui nous attend.
On roule encore un peu. Le paysage est beaucoup moins ennuyeux, entre autre à cause de « Albert Rim », une falaise d’une cinquantaine de mètres de haut, qui s’étend sur une soixantaine de kilomètres en longueur. Il y a simplement un peu plus de choses à voir ici.
Et puis on arrive à une aire de repos ; celle-ci était indiquée sur la carte, et je la voyais bien comme halte potentielle. Il n’y a aucun panneau interdisant quoi que ce soit, c’est donc plutôt bon signe. Certes, on est juste à côté de la route, mais côté trafic, ça devrait être plutôt tranquille j’imagine.
Il est encore un peu tôt. Je ressors donc les massues, histoire de pratiquer un peu mes habiletés de jongleur. Avec trois quilles, ça laisse encore pas mal à désirer. De son côté, Danielle pratique son « contact jungling » avec sa boule de verre. C’est toujours aussi fascinant. Histoire de varier les plaisirs, on s’essaie aussi avec trois balles. Ça, personnellement, j’ai plus vraiment de problèmes. L’étape d’après va être d’apprendre des « figures », et c’est pas gagné. Le ciel commence à se dégager un peu. On pourrait avoir une très belle journée demain. En tout cas, on a droit à un magnifique couché de soleil !
Et puisque l’on est toujours sur une thématique de variation des plaisirs, je m’essaie au Didgeridoo pour la première fois, et je m’en sors pas trop mal après quelques essais infructueux. En fait, j’aime énormément l’expérience et la sensation. Je joue donc pendant un bon moment. Ne me reste plus qu’à apprendre la respiration circulaire. Ça, c’est pas gagné !
Le soleil disparaît complètement, et on migre bien au chaud à l’intérieur du van. La température a légèrement remonté juste à la fin de la journée, et on est relativement bien dehors, mais faut pas exagérer non plus.
Je prépare une petite salade variée pour le repas (concombre, maïs, haricot rouge, fromage, betterave) et on mange une petite part de gâteau au fromage en guise de dessert, en hommage aux gens dont c’est l’anniversaire le 5 novembre !
Pour couronner le tout, j’ai même le droit à ma petite séance de musique rien que pour moi dans le van. Moi je dis qu’il y en a qui sont chanceux quand même !