Les Fatals Picards (avec, hélas, Léonid en première partie)
[Un échange de commentaires très intéressants a eut lieu, à la suite de ce post, avec le chanteur de Léonid. Je recommande fortement de lire les commentaires qui recadrent justement mes propos]
Les Fatals Picards, je ne connais pas tant que ça. Mais Iris, elle, est fan. Alors quand elle a vu qu’ils jouaient à Chatte, une ville qui existe réellement, et qui n’est pas si loin que ça de chez mes parents (environ 1h30 de route) on s’est dit que ça pouvait être l’occasion de faire une petite sortie culturelle.
Je vous ferais grâce de la route pour se rendre là bas. On s’est perdu, reperdu, retrouvé, etc… avant de finalement arriver. On a attendu pendant 15 minutes pour se commander des frites avec une godiveau. Parce que Iris voulait absolument manger de la saucisse à Chatte.
Je vous ferais également grâce de la plupart des blagues calamiteuses que l’on a pu faire à cause du nom de la ville. Parce que, quand même, faut pas déconner.
On avait prévu d’arriver avec beaucoup d’avance. On est arrivé avec 5 minutes d’avance. La première partie a commencé avec plus de trente minutes de retard. Mouais…
Cette première partie, parlons en. Après tout, je suis quand même -en général- assez ouvert côté musique. Je suis bon public, j’aime pas trop dire du mal. Mais là, pour une fois, j’ai quand même envie de faire une exception. Ils étaient quatre sur scène. Ils s’appelaient du nom du chanteur : Léonid. Et c’était nul. Voilà, c’est dit. En fait, les musiciens n’y étaient pas pour grand chose. Le chanteur, lui, y était pour énormément de choses. Pour commencer, et ça j’avoue qu’on n’y peut pas grand chose, ça tête ne me revenait pas. Avec son look de supporter de foot qui sort d’un bar PMU, ça partait mal. Ensuite, ils ont attaqué en massacrant une magnifique chanson de Brassens. L’Orage. En fait, pour faire un commentaire constructif : pendant toute leur prestation, le chanteur hésitera entre différent style de « chant ». Rap, polyphonie, parolier, slam, … et la plupart du temps, il mixera tout dans une même chanson. Faire du semi-rap sur du Brassens, pour moi c’est aussi criminel que chanter « Je l’aime à mourir » en anglais.
Léonid a fait de nombreuses interventions. Ce qu’il avait à dire était relativement intéressant. Il cherchait à avoir un message engagé. Bien. Très bien même. Mais en même temps, il cherchait à se rendre drôle et comique. Alors autant j’attendais des Fatals Picards qu’ils fassent plein de blagues stupides sur le nom de la ville, autant je trouve ça pathétique de la part d’un chanteur qui se veut parolier engagé et qui fait de longs discours sur les émeutes en France et les conditions de vie dans les Cités. Léonid a également massacré une autre chanson de Brassens, ainsi que deux chansons de Renaud. Quand je parle de massacrer, c’est quand il essaie de transformer « les Charognards » en chanson joyeuse, en lui donnant un rythme limite Samba, et en invitant la foule à répéter joyeusement et à l’infini « j’ai des millions d’étoiles, au fond de mon caveau ». Renaud devait se retourner dans sa tombe. Je parle du premier, le vrai, l’authentique. Celui qui est mort il y a quelques années maintenant et qui a été remplacé par un clone décérébré.
Enfin… heureusement, on a réussi à en rire plutôt qu’à en pleurer. J’ai quand même trouvé assez agréable de voir que le public, relativement jeune, semblait quand même connaître ses classiques de Renaud. Ça a un côté rassurant. Et puis si l’humour de Léonid était plutôt mauvais, le public, lui, nous a bien fait rire !
Et puis même les mauvaises expériences finissent toujours par se terminer. Ils se sont décidés à quitter la scène. Et on est reparti sur une bin bin bin longue entracte, avant que les Fatals Picards se décident enfin à apparaître.
J’avoue que le changement a été impressionnant. Du petit concert extérieur de petit village, on est passé à un véritable spectacle. À force de faire trainer, il faisait complètement nuit. Le responsable du son a boosté les décibels, et le responsable de l’éclairage a commencé à s’amuser avec ses projecteurs. Sur scène, les musiciens savaient ce qu’ils faisaient et ce qu’ils voulaient, et on s’est donc brusquement retrouvé au milieu d’un vrai concert.
Avec toutes les mauvaises choses que ça implique également. On était bien et heureux, nous, au deuxième rang tout à l’avant. C’était sans compter un public composé principalement d’imbécile de 15-17 ans qui se sont mis à pogoter, sur la moindre chanson. Si ça restait supportable au début, trois gros cons (oui, des fois certains mots ne sont pas assez forts) imbibés d’alcool ont commencé à y aller vraiment violemment. Comme les alternatives étaient de soit leur rentrer dedans et risquer beaucoup trop de bleus (et probablement plus vu leur agressivité) soit de simplement reculer, on a pris la deuxième option.
Ne connaissant pas vraiment les Fatals Picards, j’ai eut du mal à apprécier. Surtout avec la bande d’idiots qui me retombaient dessus en permanence. On se retrouve toujours à surveiller le prochain qui va arriver pour placer le coude à l’endroit où ça lui fera mal.
À la base, le rock absurde (je sais pas si il y a un vrai terme pour ce style de musique, moi le mien me plait bien) n’est pas vraiment mon style. Ça me rappelle trop la crise d’adolescence de mon frère, qui a duré un an et demi, à base de Gogol Premier, de Berrurier Noir et de Ludwig von 88. J’ai donc un blocage. Il me manque également la culture nécessaire pour apprécier une bonne partie de leurs blagues. Et oui, je suis pas mal déconnecté de ce qu’il s’est fait en France au cours des dix derniers années. Et puis ce genre de musique, il faut être capable d’en comprendre les paroles. Hors, sur une grosse sono dont on pousse les décibels à fond, on perd au moins la moitié du texte…
Il n’empêche que j’ai bien aimé la prestation à défaut d’apprécier pleinement la musique. Ça ne m’a pas donné le goût de découvrir les Fatals Picards plus que ça, mais ça n’est plus grave. Je ne regrette pas mon expérience. C’est pas mal ça qui compte le plus, non ?
July 26th, 2011 at 23:00
Simon Gauvin says:pogoter?
July 26th, 2011 at 23:04
Sébastien Chion says:Elle est belle, moi je vous dis, la technologie qui ramène automatiquement le commentaire que Simon essayait de cacher sur Facebook ! Bon, reste à savoir si les commentateurs facebookéens vont apprécier se transfert automatique ou s’il va falloir que j’essaie de configurer ça un peu mieux…
Quoi qu’il en soit, pour nos lecteurs du Québec, “pogoter” pourrait se rapprocher de “mosher” je pense : on saute dans tout les sens, on se saute dessus, on rebondit, tout ça tout ça. Comme dans un concert de trash metal, mais sur la musique des Fatals Picards.
July 27th, 2011 at 15:52
Simon Gauvin says:En effet, c’est surprenant ce transfert automatique…
D’accord pour «pogoter». Par chez nous, on disait «slammer» mais je ne suis plus à jour concernant le vocabulaire des Metalleux.
August 18th, 2011 at 18:17
fafa says:Salut,
Je viens de découvrir tes impressions sur notre concert de Chatte du 22 Juillet. C’est la première fois, depuis que je fais le chanteur (c’est à dire pas longtemps), que je me fais déboulonner avec autant d’ardeur et de rigueur dans les argument (J’ai faillis écrire “clairvoyance” mais le minimum vital d’estime de soi m’en a empêché). Le début de la gloire? Les risques du métier? J’opte pour la deuxième solution, surtout lorsqu’on se frotte à des monuments comme Renaud (avant sa mort en 1985) ou Brassens (qui lui est toujours vivant). Je n’ai pas de certitudes quand à l’intérêt d’aller triturer les petits chef d’oeuvres que sont “l’orage”, “la prière” ou les “charognards” comme nous le faisons et encore moins sur la légitimité que nous avons a le faire. Je me suis posé et me pose encore beaucoup de questions à ce sujet. Je prend note de ton avis sur la question, même s’il fait mal, il est recevable. A l’exception peut être de ton analyse sur notre orchestration des charognards qui, si elle t’as semblé merdique, n’a strictement aucun rapport avec la samba.
Puisque nous parlons des charognards, permet moi de revenir sur ce que tu appel “longs discours sur les émeutes en France et les conditions de vie dans les Cités”. Je parles beaucoup, certe, trop sûrement, mais depuis que j’ai l’occasion d’être derrière un micro, j’attache un soin tout particulier à essayer de ne pas tomber dans les discours pseudo-politique et démagogiques que je redoute par dessus tout chez les chanteurs. J’ai pour ligne de conduite de ne parler que de ce que je connais et qui me touche personnellement, sans donner de leçons, en l’ occurrence, la Villeneuve de Grenoble, le quartier que j’ habites depuis 20 ans. Pendant les ” événements ” qui l’ ont tristement rendus célèbre l’été dernier, cette sublime chanson de Renaud ne lâchait pas mon esprit et me semblait illustrer parfaitement ce que je ressentais. Voilà pourquoi j’ai voulu la reprendre, cela me permettrais justement de partager mon ressenti tout en évitant les discours hasardeux sur ” les émeutes en France et les conditions de vie dans les Cités”. L’essentiel de mon “discours” à ce sujet consistait à dire du bien de mon quartier que j’aime, pour de vrai. Le message n’est visiblement pas passé, ou de travers, j’en suis confus.
Que mon humour ne t’ai pas décroché un sourire, je suis bien obligé de l’entendre, on est tous le Bigare de quelqu’un d’autre…Mais tu auras remarqué que j’ai mis un point d’honneur à ne pas faire de blague salace sur le nom de ce pauvre bled! Je me suis contenté d’appeler ses habitants les “chatons” ou les “chatoyants”. Je trouvais ça mignon et plutôt sympathique. Pas toi visiblement.
Pour finir ce trop long plaidoyer (je t’ai déjà bousillé ta soirée du 22 juillet, voilà que je te fais encore perdre ton temps!!), j’aimerais revenir sur une ou deux incohérences de ton article qui, je dois l’avouer, m’ont un peu rassuré quand a l’objectivité de son auteur. Pour marquer le contraste radical entre notre (ma) prestation pathétique et le “véritable spectacle” des fatals picards, tu t’appuies notamment sur la lumière et le son. Concernant la lumière, désolé de n’avoir pas pu combler l’amateur de light-show que tu es mais, malgré la meilleur volonté du monde, nous n’aurions techniquement pas pu satisfaire tes attentes. J’attire ton attention sur le fait que nous avons joués en plein jour… Pour ce qui est du son, tu te réjouis d’abord du fait que l’ingénieur du son des fatals picards ait enfin le bon goût de” booster les décibels ” pour finir par déplorer que ” sur une grosse sono dont on pousse les décibels à fond, on perd au moins la moitié du texte…”
Bon…Décidément, il a pas envie d’être content l’ monsieur.
Tout ceci étant dit, je préfère me faire tailler un costard par quelqu’un qui a pris la peine de nous écouter que de me faire encenser par un pilier de bar qui n’a d’intérêt pour moi que parce que j’étais sur le podium!
En espérant sincèrement croiser a nouveau ta route et avoir encore une chance de te faire partager un tout petit peu du plaisir qu’on éprouve a faire ce que l’on fait.
Fafa (Léonid)
Ps: merci d’avoir épargné mes musiciens, c’est des bons!! La prochaine fois, s’il y en a une, essaye de faire abstraction de ma gueule, tu le constateras sûrement!
August 18th, 2011 at 19:18
Sébastien Chion says:Bonjour Fafa,
quand j’ai décidé d’écrire mon « article » sur le concert, j’ai longuement hésité, justement, sur la ardeur que j’allais mettre. J’essaie d’éviter d’être « méchant », et surtout j’essaie encore plus d’éviter de l’être gratuitement. J’ai essayé d’être constructif, un peu, ça aurait peut être pu l’être un peu plus. Mais du coup, ton commentaire a été l’occasion pour moi de relire ce que j’avais écris, et je peux donc apporter quelques précisions supplémentaires.
D’abord sur ton discours : peut être que je n’ai pas été très clair là dessus, mais j’étais tout à fait en accord avec. Peut être un peu trop long à un moment, mais c’est aussi une question de perspective : j’ai habité pendant trois ans à Grenoble et, même si je ne connais pas vraiment la Villeneuve, je sais que le quartier ne mérite pas la réputation qui lui a été fait. Le côté « trop long » pouvait donc venir de là. Ensuite, comme je le relevais, j’ai trouvé que discours très engagé n’allait pas avec humour un peu graveleux. Mais là, vu ce que tu écris, il s’agit simplement d’une incompréhension : j’ai interprété ta façon de revenir régulièrement sur le nom de la ville et des habitants comme un « ah ah ah, c’est dont bin drôle, vous habitez une ville qui s’appelle Chatte ah ah ah ». Mixer humour et discours engagé, c’est faisable mais pas évident.
Pour ce qui est des reprises, même si je n’ai pas aimé, je t’encourage quand même à continuer (puisque tu sembles aimer mes incohérences autant que moi aussi je continue). Il faut essayer, il faut jouer avec. Une chanson est faite pour vivre, changer, évoluer, voyager, bouger… Il y a de très belles reprises qui ont été faites. Pour moi, ça ne doit pas être un monde fermé. Comme je le disais, ce qui m’a dérangé le plus, autant dans les reprises que dans la prestation en général, c’est le côté incertains au niveau du style vocal. Parolier, chansonnier, rapeur, slameur, pour moi ça fait trop. Surtout sur la même chanson. Pour « les charognards », le choix de la chanson n’est pas le problème. Je suis d’accord avec toi : pour le peu que je connais de ce qu’il s’est passé, c’est une chanson qui convient très bien. C’est l’interprétation qui, personnellement, me pose problème : pourquoi essayer de la rendre joyeuse, rythmée et enthousiaste, j’avoue que je ne comprends pas. Je trouve que ça vient la détruire complètement.
Sinon, concernant mes incohérences, je vais aussi essayer de m’expliquer un peu plus clairement : quand je parle du contraste ambiance/son/éclairage entre ta prestation et celle des Fatals, ce n’était pas dans l’intention de rabaisser votre première partie. C’était plus une constatation du genre « wo, on a été téléporté d’un univers à un autre complètement différent » ; c’est vraiment la sensation que j’ai eut au début de la deuxième partie. Je ne pense pas que ton style de chanson/musique/parole ait besoin de lumières dans tout les sens, et d’une sono tellement forte qu’on ne comprend plus les paroles. Au contraire : pour moi, qui ne connaissait pas plus que ça les Fatals, la sono a définitivement desservi leur prestation. Dire « on s’est retrouvé au milieu d’un vrai concert » était peut être un peu maladroit de ma part.
Après, mes commentaires valent ce qu’ils valent. Je n’ai pas aimé, mais je ne regrette pas du tout de m’être déplacé : faire de nouvelles découvertes musicales, ça vaut toujours la peine. Même si c’est mieux, certes, quand on apprécie. J’espère aussi que tu comprends qu’en arrière de mon propos, il faut comprendre « j’ai pas aimé, c’est pas mon style, et j’aime pas son approche » et non pas « ce gars est nul, il faut qu’il arrête la musique ». Je ne suis qu’un spectateur lambda, qui a ses goûts à lui. Si vous avez du plaisir, c’est tant mieux ! Ma route étant très sinueuse et allant un peu partout en ce vaste monde, je ne sais pas si elle recroisera la tienne un jour. Qui sait, peut être !
Et quoi qu’il en soit, bonne continuation et bonne chance dans la musique ! Et surtout, bon courage !
August 26th, 2011 at 8:36
fafa says:Salut Sebastien,
Merci pour ta réponse.
Reste curieux et critique!
Bonne route.
Fafa
August 29th, 2011 at 22:20
Sébastien Chion says:C’est en sifflotant dans ma canette de bière à la fin du repas que j’ai réalisé que j’avais complètement oublié de mentionner quelque chose dans mon post : l’époustouflante performance en dernier rappel, à base de flûtes de pans heineken. Mea culpa d’avoir oublié de le relever, parce que franchement, ça, ça m’a laissé sans voix !