Tête en bas

Down under wandering. Archipelagoes to islands; beaches to deserts; mountains to cities.

Rêves


Tout à la base de ce voyage, il y a un rêve. Un rêve qui m’habite depuis bien longtemps. Ce rêve est accompagné d’images d’immensités désertiques rouges et poussiéreuses. Des images qui me suivent depuis mon enfance. Je suis tombé dans l’Australie tout petit, et ça dure depuis. Mes parents se souviennent peut être que j’avais recherché à faire de la correspondance avec quelqu’un en Australie. La première lettre que j’avais reçu venant d’Autriche, tout le monde s’était bien moqué de moi dans la maison. Et moi, je m’étais mis à douter aussi. Australia, Austria, je me fais encore régulièrement avoir dans les menus déroulants sur internet… quoi qu’il en soit, quelques temps plus tard, j’avais aussi reçu une lettre d’Australie. Si je me souviens bien, le magazine qui mettait les correspondants en contact cherchait aussi des personnes avec des goûts similaires dans d’autres pays. Je me rappelle ni du nom de l’Australienne, ni du nom de l’Autrichienne. Je ne me souviens absolument pas si j’ai répondu à l’une ou à l’autre. Oui, il me semble me rappeler que c’était toutes les deux des filles. C’est bien un truc de filles, ça, de vouloir écrire à des gens à l’autre bout du monde…

Le Working Holliday Visa est présenté, et vu, comme un produit miracle. Le visa facile à obtenir, qui permet de venir faire fortune en Australie. La fortune, personnellement, ne m’intéresse pas. L’argent non plus, mais malheureusement, il en faut quand même pour vivre. Et pour payer l’essence pour traverser les grandes immensités rouges oranges.

J’ai répété à plusieurs reprises à Iris « un Working Holliday visa, c’est ce que tu en fais ». Je l’ai toujours vu comme un visa pour les audacieux. La possibilité de faire plein de choses, d’ouvrir plein de portes. Je dois bien reconnaître que je commence à douter. Un peu. Parce qu’il y en a qui ne joue pas le jeu. Qui ne sont pas intéressés par des rêveurs temporaires. Qui veulent juste des gens terre à terre, et permanent.

J’avais imprimé 40 CVs sur papier. Je n’en ai plus un seul. J’ai arrêté de compter ceux envoyés sur internet. La conclusion est simple. À Melbourne, il est extrêmement facile de trouver du travail. Si vous êtes prêts à faire de la vente, payé uniquement à la commission (donc probablement ne pas gagner d’argent les premières semaines, le temps d’apprendre) ou si vous êtes prêts à essuyer des assiettes en dessous du salaire minimum. Pour l’occasion, je vais rejeter la faute sur mes parents. Ils m’ont appris que c’était mal d’être exploité, que c’était important de garder une certaine estime de soi, y compris au travail. Du coup, je refuse de jouer ce jeu là. Je n’essuie pas d’assiettes, et je ne sonne pas aux portes de la moitié de Melbourne. La conséquence est radicale : du moment que l’on montre que le salaire nous importe, les employeurs ne rappellent pas. Je les comprends : ce sont des idéalistes, qui pensent que le salaire est quelque chose de secondaire et sans importance, et qui cherche des employés qui partagent leur opinion. Je ne partage pas leur vision socialiste du monde. Je suis un capitaliste qui veut gagner toujours plus. Hum…

Les journées se suivent et se ressemblent quand même beaucoup. Le matin, j’envoie des CVs et des lettres de motivations pour tout les postes de graphistes que je trouve. Puis ensuite, je fais le tour des annonces Gumtree. L’après midi, je choisis une rue vivante parmi celle que je n’ai pas encore fait, et je vais distribuer mes CVs. C’est un peu comme à un mariage ; au bout d’un moment, on est quand même un peu tanné de sourire. Le soir, je retourne sur internet, pour une deuxième série de CV sur Gumtree…

J’ai commencé à y croire un peu moins. Absolument personne qui ne rappelle, c’est pas terrible pour le moral. Et puis hier, j’ai reçu le mail de Benjamin. « Merci de votre candidature, vous nous intéressez, quand est-ce que je peux vous rappeler ». Sursaut d’optimisme. La vie tout entière ne serait elle donc qu’un long voyage en stop sans fin, à perdre patience en cherchant désespérément un travail, puis d’un seul coup à repartir super motivé au premier coup de téléphone ?

J’ai brièvement parlé au téléphone avec Benjamin aujourd’hui. « Hélas, nous cherchons quelqu’un de permanent ; pas juste 6 mois. Et nous ne pouvons pas offrir de sponsor ». Donc voilà… je les intéresse, ils aiment mon profil, mais ils n’aiment pas mon visa. Pas bon pour le moral tout ça. J’ai perdu courage pendant un bon trente minutes. Le temps de me retrouver dans un tram qui m’amenait au centre ville, et d’échafauder un plan. Après tout, j’ai un visa pour rêveur audacieux. Et, de l’audace, j’en ai. Puisque dans ce pays où les gens ne sont pas matérialistes, ils cherchent des gens qui ne sont pas intéressés par le salaire, c’est ce que je lui réponds. Je prends en compte l’expérience que ça m’apportera (c’est vrai que sur un CV, expériences de boulots internationales, je vois ça comme un gros plus ; et je pense aussi à la Nouvelle Zélande qui s’en vient). Le fait, aussi, que la boîte à l’air très sympa. Est-ce que je préfère un boulot de caissier chez IGA ou, pour quasiment la même paie, un boulot de graphisme ? Poser la question y répond un peu quand même. Les caissiers sont quand même bien payés ici. Mais ça non plus, ça n’a pas l’air d’un post pour rêveur audacieux. On verra bien si ça abouti à quelque chose ou pas. Au moins, j’aurais essayé.

Et puis à un autre moment, dans la journée, j’ai reçu un mail. D’un recruteur, qui cherche un développeur flash, pour début immédiat, à Richmond (rendu dans mon top 4 de mes quartiers préférés de Melbourne, depuis que St Kilda s’y est subrepticement glissé. Il faudra que je recommence à vous parler de choses moins personnelles et plus touristiques bientôt). Bin écoute, si je dois écrire des lignes de codes pour trouver un boulot, let’s go mon gars. On verra comment il va réagir à mon visa… quand à la madame de Brisbane, toujours pour un contrat en graphisme, qui m’a appelé un peu plus tard, et qui m’a dit qu’elle non plus n’aimait pas mon visa, de toutes façons, je la trouvais pas sympathique au téléphone.

Alors voilà… toujours du surplace, mais maintenant, la moitié de Melbourne sait que je cherche du travail. Oui, je sais, il me reste encore une autre moitié à informer ! Demain, je retourne imprimer des CVs.

Cette demoiselle, je l’ai trouvée sur le chemin du retour. Je trouve qu’elle correspond parfaitement à mon humeur du moment. Moi, en tout cas, j’arrive à cerner l’humeur qui se dégage de tout ça. Le petit texte, pas forcément évident à lire, dit simplement « Be Free » (rien à voir, je pense, avec un fournisseur internet français). Ça m’a rappelé que j’avais l’habitude, pendant mon voyage en van, de mettre parfois une simple photo, avec juste un titre, et pas de légendes. Il y a certaines habitudes qu’il est temps que je reprenne.

One Response to “Rêves

  1. March 22nd, 2012 at 7:16 pm

    Simon says:

    Le marché de l’emploi semble vraiment difficile en Australie. Continue d’écrire, on aime te lire. Bon courage!