Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionJune 13th, 2015
  • Et l’aventure continue avec un nouveau train. Celui-ci m’amène jusqu’à Prague. Pourtant, je serais bien tenté d’oublier de descendre… si je continue, je me retrouve à Budapest… forcément, ça donne envie de continuer. Mais je dois retrouver Laurence, à Prague. Laurence, elle est à Francfort en ce moment. Attendant sa correspondance après son vol depuis Montréal. C’est sa faute si je retourne à Prague. Mais bon, faire un « détour » par Prague pour revoir une amie de Montréal, c’est plutôt chouette.

    Je laisse Dresden derrière moi, avec un net sentiment que l’on se reverra. La ville a su me charmer. La vieille ville, un peu, parce qu’elle est quand même jolie et qu’il est agréable de s’y promener. Mais surtout Neustadt qui correspond à ce que je cherche de plus en plus dans une ville…

    Neustadt

    J’ai quitté Sophie et son amie pour partir explorer de mon côté. J’ai retraversé l’Elb, et je me suis retrouvé à sillonner les rues au hasard. La première partie de Neustadt, la plus proche du fleuve, est assez riche. Restaurant un peu luxueux, bâtiments assez classes… c’est plutôt joli.

    Mais surtout, je découvre mes premiers « Passages ». Un peu comme les traboules lyonnaises, les Passages sont ce qu’ils annoncent être : des passages dans les immeubles, permettant d’aller d’une rue à une autre. Et dans les passages, on trouve des petites boutiques, des restaurants sympas et des petits coins bien jolis. S’il n’y a pas beaucoup de vie dans les rues, il y en a un peu plus dans ces Passages, ce qui leurs confèrent d’autant plus un petit côté « passage secret ».

    Je suis remonté jusqu’à Albert Platz, qui marque la limite entre la Neustadt « moderne », plus touristique et plus « économique » et la Neustadt « à vivre ». Mes premiers passages m’avaient bien plu, mais j’ai découvert pourquoi Solenn avait affirmé sans la moindre hésitation « Dresden, je sais très bien ce que tu vas en penser ». Parce qu’en effet, ces petites rues vivantes, plein de petits restaurants, de bars alternatifs, de boutiques sympas… on n’est pas dans un univers Bobo type Croix Rousse aujourd’hui. On est dans un univers décontracté et alternatif. Style Croix Rousse il y a quelques années.

    Il ne faut pas l’oublier : à Dresden, on est en Allemagne de l’est. Les écarts avec l’Allemagne de l’ouest diminuent petit à petit, mais il y a encore des différences de salaire. Mais aussi de coût de la vie. Louer un appartement ne coûte pas grand chose, et les villes de l’est comme Dresden et Leipzig sont devenues des aimants à artistes, à étudiants, et à rêveurs. Comme San Francisco il y a très longtemps, comme la Croix Rousse ou Berlin, comme le plateau, à Montréal, comme Portland… le destin de ces villes ou de ces quartiers semblent déjà tracé. Obligés de suivre le même modèle : en commençant avec des loyers très bas, attirant une population jeune et dynamique, porteuse de projets alternatifs et inspirants. Petit à petit, le quartier va devenir de plus en plus attractif. Tous ces petits commerces, tous ces petits bars, tous ces lieux de création, il faut bien le reconnaître, ça plait. Petit à petit, de plus en plus de gens vont vouloir venir s’y installer. Petit à petit, les prix vont augmenter. Certains jeunes artistes vont voir leurs créations reconnues, et vont les vendre plus chers, leur permettant de rester. Les autres vont devoir partir. Lentement, une population pour qui l’Alternatif est une mode va les remplacer. Parce que ça fait bien de vivre à Neustadt, à Croix Rousse ou sur le plateau. Parce que l’écosystème qui a été créé par d’autres, il est vraiment bien, et on a envie d’en profiter. Parce que c’est là, tout simplement.

    Au hasard d’un panneau montrant une vache rose sur fond bleu, je suis entré dans Kunsthofpassage. Et ça a été le coup de coeur. Comme beaucoup d’autres gens l’ont eu avant moi j’imagine. Les façades peintes, décorées, aménagées, sont une affirmation évidente des habitants : « nous aimons notre quartier, nous aimons notre vie, nous sommes bien ». Comment ne pas être sous le charme de cette succession de façades, de couleurs et de décorations ? Bien sûr que j’aime. Bien sûr que j’ai envie de vivre ici. Comme beaucoup d’autres. Bien sûr qu’en faisant cela, la valeur des bâtiments a grimpé en flèche, et ce Passage est sans doute une source d’inspiration pour beaucoup de gens désormais. J’imagine qu’on en parle dans le guide du routard, et que les gens viennent de loin pour le voir.

    Je continue mon exploration de Neutadt avec plaisir. Oui, je m’imaginerai assez facilement vivre ici. Prendre mon temps pour découvrir tous ces recoins perdus, tous ces bars inspirants. Si à Francfort je n’ai repéré que cinq adresses me donnant envie de m’arrêter, ici je n’essaierai même pas de garder le compte…

    Je suis rentré chez Lili un peu tard. On avait eu un échange au téléphone dans l’après-midi, par rapport à nos projets respectifs. Dans l’idée, on se retrouvait le lendemain matin, pour un petit déjeuner ensemble.

    J’ai finalement fait sa connaissance le lendemain, en effet, quand elle est venue me réveiller, un peu plus tôt que prévue, pour me dire que les plans avaient changé. On retrouvait un groupe d’amis à elle pour un petit déjeuner commun. Je n’ai même pas été surpris quand elle m’a donné le nom de l’arrêt de tram où nous allions. Dans Neustadt. Un peu plus loin que où mes pérégrinations de la veille m’avait emmené. Plus loin, plus alternatif encore.

    On se retrouve dans un jardin semi aménagé qui ressemble à moitié à un squat, sur le bord de la voie ferrée. Petit déjeuner pris avec une douzaine de personnes. Des vêtements en toile, des vêtements déchirés, des cheveux longs, des dreads, une guitare, que des options végétariennes… rien de bien surprenant. Rien auquel je ne sois pas devenu habitué avec le temps. Je ne suis même plus surpris de me retrouver entouré de gens comme ça. Peut être que je les attire après tout.

    Ils parlent en allemand la plupart du temps. C’est clair : je n’arrive pas à suivre. Mais j’échange en anglais avec certains d’entre eux, de temps en temps. Beaucoup de français s’offusque quand ils entendent dire que les français ne savent pas parler anglais. Parce que eux, ils sont capables de prononcer quelques mots, même de faire des phrases complètes. De demander leur chemin et de commander à manger dans un restaurant. Oui, c’est vrai, il y a quand même pas mal de français qui ont un anglais suffisant pour survivre en voyage et pour établir un premier contact. Ce que ces personnes ne comprennent pas, c’est qu’il s’agit bel et bien de Parler anglais. Couramment. Pour avoir des discussions sur absolument tout et n’importe quoi et être capable de passer d’une langue à une autre sans la moindre hésitation. Il m’a fallut du temps pour avoir un anglais courant et fluide. Un anglais me permettant de discuter politique, philosophie, religion. Un anglais me permettant de travailler dans un pays anglophone. Un anglais me permettant d’avoir une discussion à battons rompus avec un groupe d’une dizaine de personnes. Je suis assez fier d’avoir atteint ce niveau. Il m’a fallut du temps, de la pratique, des voyages, des rencontres… tous les gens que je rencontre en Allemagne parle couramment anglais. Ils passent de l’allemand à l’anglais pour revenir à l’allemand sans la moindre hésitation. Ils n’ont pas forcément voyagé à l’étranger. Ils ont juste bénéficié d’un bon système d’apprentissage des langues… et moi, tout cela me motive à apprendre une troisième langue. Il est temps que je m’y mette pour de bon. Allemand ou Espagnol, je choisirai bientôt. Et évidemment, la meilleure façon pour apprendre une langue, c’est l’immersion complète…

    Nous avons passé un dimanche très relaxe tous ensembles. À manger, à jouer au ping pong, à boire quelques bières, et à discuter. Au bout d’un moment, on a déménagé. Du petit jardin caché à un grand parc public. Comme prévu pour un dimanche après midi ensoleillé, le parc est plein de gens un peu partout. Je retrouve ce que j’ai aimé la veille. Des gens. De tous les styles. De tous les profils. Familles, jeunes, vieux, gothiques, hippies, et gens « normaux » se côtoient dans la joie et la bonne humeur. Et quelques bouteilles de bières, aussi. On est en Allemagne après tout.

    Je terminerai la journée avec une autre petite balade exploratrice en solitaire. Je découvre quelques nouvelles rues de Neustadt, avant de me retrouver de nouveau dans la vieille ville, pour dire au revoir à Frauenkirche. Elle me plait bien, quand même, cette église… et puis je n’avais pas encore mis les pieds dans le palais, c’était un peu dommage, non ?

    J’ai retrouvé Lili et deux de ses colocs le soir. On a mangé ensemble. Là encore, ils discutaient en allemand. Sensation assez étrange que de se dire « pour le moment, je ne comprends absolument rien. Mais si ça se trouve, si je prends la décision de m’y mettre, tout ces mots finiront par prendre sens…

    J’ai dit au revoir à Lili. J’ai dit au revoir à ses colocs. Je suis resté un moment à écrire. À défaut de publier sur mon blog dans les temps, j’essaie de ne pas prendre de retard dans l’écriture.

    Le lendemain, je suis allé à la gare. J’ai pris mon train comme prévu. Prague m’attend. Je suis content d’y retourner. Et je profite d’avoir un peu de temps pour finir de rattraper mon retard d’écriture. Tout cela en admirant les gorges de l’Elb, et en me disant que non seulement Dresden semble chouette à vivre, mais que en plus, les environs méritent qu’on prenne le temps de les découvrir.

    Un commentaire

    1. Commentaire de Kaly

      Les paris sont ouverts : allemand ou espagnol ? Où sera ta prochaine résidence ?

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