Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionJune 3rd, 2019
  • « J’ai passé la journée enfermée dans ma chambre. Sur mon bureau, un atlas ouvert. Une carte routière de l’Amérique du Nord. La veille, Conny m’avait montrée un point. «?C’est ici que j’habite?». Je l’avais regardée m’indiquer Eureka, dans le nord de la Californie. J’avais marqué l’endroit d’une petite croix verte. Je suis restée de longues heures à regarder ce point. À regarder les lignes qui en partaient, dans toutes les directions. À chercher l’itinéraire le plus simple pour aller de Anchorage à Eureka.
    J’étais persuadée d’être emprisonnée à Anchorage. Exilée à tout jamais. Jusqu’à aujourd’hui. J’ai la solution devant les yeux. Il me suffit de suivre les lignes de couleur sur la carte. Ces lignes sont ma liberté. Elles sont la clé du cadenas. Elles peuvent m’amener partout où je veux.
    Suivre la 1 vers le nord-est. À Tok, bifurquer vers le sud, sur la 2. Passer la frontière. Entrer au Canada. Traverser le Yukon, en passant par Dawson et White Horse. Continuer en Colombie Britannique. Prince Georges. Toujours vers le sud. À Vancouver, continuer tout droit. Passer à nouveau la frontière. Retour aux États-Unis. Seattle. Portland. Puis dans une ville du nom de Grants Pass, prendre la direction de l’océan. Arriver en Californie. Suivre la côte vers le sud jusqu’à Eureka.
    Tout cela est simple. Je pourrai y arriver sans problème. Bientôt.
    À compter de ce jour, j’ai passé des heures entières à regarder des cartes en rêvant de voyage. En rêvant de partir. En rêvant de liberté. Je savais que ça finirait par arriver. » – La Demoiselle de l’Alaska, toujours en recherche d’éditeur.

    Je n’aime pas les GPS. Je préfère les cartes. J’ai prêté à ma demoiselle de l’Alaska cette habitude qui est mienne (et que d’autres voyageurs doivent partager sûrement). Passer des heures à regarder des cartes, à suivre les traits de couleurs, et à essayer de deviner à quoi peut ressembler le paysage. Juste avec les lignes. Lignes droites : paysage plat. Quelques arrondis : collines. Des zigzags dans tous les sens : montagnes et falaises. Beaucoup de lignes : zone urbaine, ou trop habitée. Peu de ligne : campagne perdue. Jouer à deviner les forêts, les rivières, les lacs. Si en plus la carte à des courbes de niveaux, on visualise alors les reliefs avec précision. Sur certaines cartes, on découvre les châteaux, les ruines, les églises et autres attractions touristiques. Sur une carte Michelin, un liseré vert le long d’une route invite au détour… pour moi, voyager ça ne commence pas par regarder des photos du lieu, ou lire sur la culture du pays, ou en apprendre la langue. Ça commence par regarder une carte. Suivre les lignes de couleur, et jouer à deviner où on a envie d’aller.

    En plus de mon atlas routier qui me raconte tous les secrets de la France, j’aime bien récupérer les cartes régionales touristiques (oui, quand vous regardez des vidéos youtube sur « les dix trucs à faire pour voyager éco responsable » ils disent souvent d’éviter les brochures touristiques ; un jour, je commenterai ces vidéos en disant qu’une carte qui présente les petits secrets d’une région, ses producteurs -de fromages de chèvre, et autre- et ses points de vue cachés, ça peut être très éco responsable ; mais là n’est pas mon propos actuel). Sur notre petite carte du Berry, il y avait ce petit logo qui m’a intrigué. Et sans ce petit logo, nous ne serions jamais passé par Saulzais le Potier.

    centre

    Grâce à ce petit logo, el Chamion s’est retrouvé au centre de la France. Et comme c’est bien connu, la France est au centre du monde, pendant un moment, el Chamion est devenu le centre du monde. Et ça, ça en jette. Et on le doit à des lignes de couleurs ; à une carte régionales pas du tout éco-friendly qui ferait sûrement hurler les réalisateurs de vidéos éco-friendly sur youtube.

    Et finalement, comme la route était belle, que le soleil était de la partie, et qu’en prenant des routes secondaires la conduite était moins pénible, on a dévoré les 140 kilomètres qui nous séparait de notre objectif suivant. Et nous avons donc posé le chamion sur le bord de l’étang de Tronçay, dans le village du même nom, dans la forêt du même nom. Et comme il était encore tôt, on a pu commencer par installer les hamacs dans les arbres pour une longue sieste sous les arbres, au bord de l’eau, avant de s’offrir une petite balade de fin de journée.

    Tronçay, on peut le dire, est assez propice à la promenade. Un axe majeur qui traverse d’est en ouest, deux axes secondaires nord sud. Et le reste, ce sont surtout des petites routes, et des chemins d’exploitation forestière. On peut donc marcher tranquille, et profiter du calme des lieux. Avec quelques incontournables. Quelques chênes remarquables, parsemés ici et là. Et la futaie Colbert où, déjà une fois, j’ai eu la chance de m’aventurer. Une dizaine de chênes gigantesques. Pluri-centenaires. Combien de fois ? Beaucoup. Suffisamment. Pour moi, une chose est sûre. S’il y a une entité créatrice, quelque part, une volonté supérieure en arrière de tout cela, il me semble beaucoup plus propice de lui rendre hommage dans ces cathédrales naturelles projettent leurs feuilles vers le firmament. Pleines de vie et de sagesse. Pleines de calme et de sérénité. Pas dans des constructions de pierre au toit inflammable…

    Trois heures de marche plus tard, nous sommes de retour à la maison. J’étais persuadé que nous allions revoir un arbre sur le bord d’un étang, déjà aperçu par le passé lors d’une balade antérieure. Mais je me suis trompé d’étang. Du coup, je propose à Gaëlle un déménagement un peu plus loin, sur les bords de l’étang de Pirot. Mon arbre est là. Je suis ravis.

    arbre

    Et la vue par la fenêtre, comme bien souvent, est juste magnifique.

    vue

    Suite à une suggestion de Gaëlle, on part profiter de la lumière de fin de journée pour faire quelques photos du chamion dans son élément naturel. Belle lumière, télé objectif, étang au premier plan, c’est parfait.

    L’endroit, en plus d’être magnifique, nous offre une nuit parfaitement calme. Et on peut reprendre la route tout tranquille le lendemain.

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