Alors non, le « Téton de Vénus » n’est pas le seul sommet prévu pour aujourd’hui. Ce n’est pas non plus le plus haut. Mais clairement, c’est celui au nom le plus accrocheur, et il faut bien que je fasse venir un peu des visiteurs sur mon blog de temps en temps ! Et je me dis que c’était quand même plus vendeur que « le puy de Seycheuse » dont le nom est, il est vrai, un tantinet exotique… mais moins vendeur. Et il s’agirait donc de ma dernière rando avant… avant la prochaine…
C’est, je crois, le principal défaut de Montréal. Ils ont oublié de mettre des randonnées inspirantes et des montagnes dans le coin (désolé St Bruno et St Hilaire, mais comment dire…). Y’a bien le nord des Adirondacks, mais il faut passer les lignes, et envisager 200 km de route… pas grave ; je remplacerai la randonnée par des festivals et de la poutine. Parce que bon, Montréal a clairement vachement plus de qualités et d’avantages que de défauts. Pourquoi on pouvait pas manger de poutine à Huesca d’abord ?
Bref, il me restait une dernière randonnée à faire. J’étais en train de me préparer à partir quand ça a fait « toc toc » à la porte. Et j’ai donc discuté écriture, voyage et photo avec Laurent pendant une bonne demi-heure, dans une ambiance bien agréable et sympathique.
Et donc je suis parti marcher.
La première petite grimpette, plutôt tranquille, m’amène à la barrière. Si si, vous vous en souvenez, la barrière que j’étais allé voir hier (oui, bon, il s’est passé quelques années -environ- depuis mon dernier post, donc dans la temporalité de l’écriture, c’est pas tout à fait hier, je le concède ; mais dans la temporalité du voyage, c’était bien la veille ; il n’est pas toujours évident de suivre deux temporalités en même temps).
Puy Bataillouse
Le programme de la balade est assez simple : enchaîner tous les mini sommets qui se suivent et qui ont l’air sympa. Faire une boucle. Et rentrer à la maison.
Pour rejoindre le premier, ça grimpe assez raide, mais ça se fait quand même plutôt bien.
Et de là haut ? Et bien oui, on a une jolie vue à 360 !
Téton de Vénus
Le voilà, enfin ! La petite bosse qui est sensée faire tripler le trafic sur mon blog (bin oui, clairement, je n’ai fait cette randonnée que pour obtenir des visiteurs supplémentaires sur mon blog, c’est sûr !).
Comme c’est le pic juste après, je m’y retrouve assez vite.
Bien évidemment, j’ai envie de faire une photo à 360 du téton. Enfin depuis le téton serait une formulation plus correct. Mais quand j’arrive, il y a deux « sportifs » qui sont déjà là. Ils parlent (forts) et arrivent à occuper tout l’espace. Je décide d’être patient, et d’attendre. L’un des deux se décide enfin à y aller. Mais pas l’autre. Il préfère sortir son téléphone, et appeler quelqu’un pour lui donner toutes les dernières nouvelles. Pas grave. Je serai plus patient que lui. Et en effet, au bout d’un moment, il finit enfin par raccrocher et repartir. Et moi je peux faire ma photo !
Puy de Seycheuse
Et ma photo (enfin mes photos) dans la poche, je peux repartir. J’avais deux options. La balade courte : je continue tout droit et je redescends, ou la version longue qui, clairement, rallonge pas mal. La météo semble favorable. Les annonces de pluie et d’orage semblent avoir disparues. Je décide donc d’en profiter. J’irais rendre visite au Puy de Seycheuse. Parce que ! Le nom est moins vendeur, mais je l’aime bien quand même !
Du coup, je tourne à gauche et attaque ma balade à travers champs (en suivant une piste quand même) qui me permettra d’aller voir un peu plus loin dans le paysage… et qui me confirmera aussi que de ce côté là, j’aurai un peu fait le tour de ce que j’avais envie de voir. Je ne serai pas allé voir la trouée de (l’épée de) Roland, ni le Puy de Peyre Arse, à qui j’aurai bien aimé rendre visite… je n’aurai pas été contre avoir un ou deux jours de plus dans le coin. Mais en même temps, j’ai quand même envie d’avancer. Et d’arriver. De passer à autre chose. De tourner la page.
Le message, en arrivant au sommet de Seycheuse, est assez clair. Il ne faut pas aller plus loin. Pour autant, je n’ai aucune idée de ce qu’est un tir d’été. Et comme c’est pas l’été, je me dis que mes chances de survie restent non négligeable.
Et puis il faut bien que je fasse un 360 ici aussi, non ?
Bec de l’Aigle
Avec le Téton de Vénus, c’est le pic le plus souvent affiché dans la région. Faut dire que si son nom est un peu moins… poétique, sa silhouette est plus inspirante. Il est plus rocailleux. Et surtout, il domine la station juste en dessous. Et il est assez difficile à rater.
En suivant la ligne de crête (oui, c’est un bien grand mot, je sais) suivante, j’arrive même à ne pas faire de mon détour par la Seycheuse un aller retour, mais bien une seule continuité !
Et puisque c’est la journée où je collectionne les panoramiques à 360 (je crois bien que c’est un record sur une seule journée !), j’en fais un petit dernier pour la route
Comme pas du tout annoncé par la météo, la pluie qui avait été annulée, a bien lieu. Heureusement, il ne pleut pas trop. Juste ce qu’il faut pour rendre un peu tout boueux. Et glissant. Et pas hyper agréable. Mais ça n’est pas trop grave. J’arrive quand même à gérer la descente assez bien.
Je commence à en avoir plein les jambes. Faut dire que j’ai quand même pas mal marché au final. Surtout avec le cumul des deux derniers jours. Avec pas mal de montée. Descente. Montée. Descente. Et cette dernière descente est quand même plutôt beaucoup pas mal raide !
Je me retrouve dans la partie basse de la station. Une dernière petite remontée, et je suis enfin de retour au Chamion !
Il recommence à pleuvoir. J’ai terminé ma rando (ma dernière rando ? ) juste à temps… c’est étrange, après avoir autant marché, de se dire qu’il se passera sans doute très longtemps avant de remarcher à nouveau. De redécouvrir une région en profondeur, et dans les moindres détails. Enfin non, je sais que je ferais des dizaines de kilomètres à pied dans les rues de Montréal. Que j’aime marcher dans les rues de Montréal ! Mais clairement, ça ne sera pas la même chose…
Enfin, je fini avec une belle dernière rando. Les paysages étaient inspirants. Et je n’ai pas fait 14,97 kilomètres. J’en ai fait 15. Sisi !
Et 956 m de dénivelé. Quand même !
Ambert
La suite du programme était déjà décidé. Il me restait une nuit à passer quelque part, et j’ai décidé de la passer à Ambert. C’était sur ma route, c’était à une distance raisonnable, ça permettait de faire une étape correcte pour couper en deux les (plus ou moins) 350 kilomètres qu’il me restait à faire.
Bon, d’accord. Aussi parce que la fourme c’est quand même super bon. Et que traverser le Cantal sans faire le plein de Cantal, de Saint Nectaire, et de Fourme d’Ambert, on n’est pas loin du crime de lèse-majesté !
Je reprends donc la route, et attaque la grande descente sur Murat. Je m’arrête après 15 minutes. Je laisse passer l’énorme orage qui s’annonçait depuis un moment maintenant. Content de mon timing de rando !
Puis je reprends ma grande descente, tout tranquille. Pour m’arrêter à nouveau 10 minutes après. Faut dire que la panneau « Cantal fermier » il était stratégiquement positionné !
Et je continue de suivre la N122, qui est quand même assez belle.
Je finis par rejoindre Massiac… non sans un certains (gros) pincement au coeur. Pas parce que Massiac à un quelconque intérêt quelconque… mais parce que j’y suis passé… au tout début de cette aventure… quand mon objectif annoncé, en toute innocence, était d’aller à Royan, puis de tourner à gauche… Il s’en est passé des choses depuis… de surprises, en déceptions, en imprévus, en changement de programme… une interruption très étrange, le temps de ramener le Chamion à son camp de base, de partir à Montréal, de revenir en France, de récupérer le Chamion… tout cela a été très chaotique… et je n’ai pas envie de replonger dans ce chaos.
À Massiac, je saute sur l’autoroute, pour repartir vers le nord. Entrée d’autoroute en pente. Autoroute assez raide. Pas de voie pour les véhicules lents… je me tasse le plus possible sur la bande d’arrêt d’urgence alors que le Chamion gravit comme il peut la côte à 40 km/h ; et que les camions me doublent en dépassant difficilement les 60… clairement le genre de situation que je déteste et que je cherche à tout prix à éviter. Mais cette fois, je me suis raté on dirait bien… enfin… je fini par reprendre une visite de croisière plus normale, et je continue.
Je n’ai pas envie de faire la route en me plongeant dans la carte. Je suis le GPS. Il me fait sortir à Lempdes. Avant de m’envoyer sur toutes les petites routes qu’il arrive à trouver. Je l’insulte copieusement à plusieurs reprises, mais je ne peux pas faire grand chose, à part avancer sur ces routes pas du tout adaptées à la conduite en chamion. Je suis fatigué. Épuisé. Physiquement. Nerveusement.
Il m’aura fallu du temps pour écrire cette dernière étape de voyage… c’était il y a quatre semaines (déjà). Pourtant, je ressens encore ma fatigue. Ma lassitude. La saturation émotionnelle. L’abandon d’un projet ; la fin d’un rêve ; le début d’une nouvelle vie. La construction d’un nouveau projet. La quête de nouveaux rêves. Je n’annonce rien d’original en disant que les deux dernières années auront été chaotiques et compliquées…
Je déteste ces phases de transition. Toujours autant… plus tout à fait là, pas encore là-bas. Impossible de vivre dans le présent. Ni dans le passé. Ni dans le futur… mais il faut avancer. Et j’avance. Et à ce moment là, je ne peux espérer meilleur compagnon de route que le Chamion. Il m’écoute. Il est là. Imperturbable. Dans les montées comme dans les descentes. Rien ne l’arrête. Il me porte. Et je l’en remercie, alors qu’il se gare sur le parking de la gare de Ambert.
Je vais faire un tour en ville. J’en reviens perplexe. La ville n’est pas particulièrement vivante, et en même temps, il y a partout des affiches pour des animations, des bars associatifs, des projets un peu différents (irais-je jusqu’à dire marginaux ? ).
Je cherche un resto qui pourrait m’inspirer, en me souvenant à quel point le burger de Aurillac m’avait fait du bien. Mais je ne trouve pas l’inspiration. Tant pis. À la place, je ferais des photos de trains. Ça fera plaisir à mon papa !
J’attaque la dernière étape le lendemain, après une brève escale chez un producteur de fourme, le temps de remplir le frigo…
Quelques heures plus tard, le Chamion retrouve son parking herbeux, à l’ombre des arbres, avec vue sur les fleurs tout autour… voilà. Fini. Pour… pour combien de temps ?
Je n’en ai pas la moindre idée…
Que de beaux trains ! Je ne savais pas qu’il y avait une mine ferroviaire à Ambert.
Quant à la fourme… Ah la fourme !
Il y a même un petit train touristique au départ de Fourme !
En t’accompagnant à la gare ce matin, j’ai regretté de ne pas photographier les deux gros sacs à dos avec la flûte amoureusement fixée, le sac de cabine, tes vêtements bariolés – la veste défraîchie maintenant.
Ça y est, la transition est terminée, c’est “le début d’une nouvelle vie” comme tu le dis toi-même, “la construction d’un nouveau projet.”
Enfin… presque terminée ! Mais tu dois pouvoir dire que la page est tournée avec ce train que tu as pris et cet avion qui est en vol au moment où j’écris.
“Que le vent sous tes ailes te pousse où le soleil chemine et où la lune fait route” – j’espère avoir à peu près mémorisé le salut de Tolkien aux aigles…