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J16- En route vers Maligne
Journée d’une rare intensité que celle d’aujourd’hui. Rien de tel que la chaleur d’un feu de camp pour se la remémorer ! Riche en émotion, en paysage, en tant de choses !
Je n’ai pas du tout aimé l’auberge de jeunesse. Si l’ambiance avait un côté sympathique la veille au soir, le côté chalet (à 26 $ la nuit en dortoir) ne me tentait pas vraiment. J’ai quand même bien dormi, malgré une soufflerie un mètre de mon oreiller. Il faut dire que je ne fais que super bien dormir depuis que je suis là. Vues mes journées, ça me paraît plutôt normal.
Je regarde mes saucisses cuire tranquillement.
Je me suis réveillé à 8h. Je ne me suis pas posé de questions : je me suis levé, je suis parti. Même pas de clés à rendre. Direction : Maligne Lake et Maligne Canyon. Je ramasse un auto-stoppeur en route. Vraiment pas sympa. Une chance, je ne l’aurais pas pour longtemps. Il me fait même un coup à la Coluche : « je suis tombé sur un gars sympa hier soir, qui m’a donné un peu d’argent pour que je puisse manger ». Je fais semblant de ne pas saisir l’allusion, et le laisse sur la route d’Edmonton, pendant que je prends la direction Maligne.
J16- Les six ponts de Maligne Canyon
L’idée c’est de trouver un coin sympa pour le petit déjeuner, avant d’aller voir le canyon, le lac, et de m’offrir une petite marche. Un panneau m’intrigue : « sixième pont ». Je le suis. J’avais en tête de commencer la journée au téléphérique puis d’aller à l’info touristique, mais pour l’un comme pour l’autre il est beaucoup trop tôt. Je suivrais donc mon instinct, qui m’emmène au début d’une randonnée le long du Canyon : six ponts ont été aménagés pour le découvrir. Parfait pour moi : 3,4 kilomètres, 150 mètres de dénivelé, ça commencera bien la journée après les deux tartines de Nutella et les trois biscuits.
Longue balade, tranquille, avec absolument personne. Elle commence sur le bord d’une rivière toute calme. Au 5e pont, les berges de la rivière commencent à devenir un peu plus escarpées. À partir du 4e, c’est un canyon magnifique, mais presque sec : il n’a d’eau qu’en été, quand les glaciers fondent. Au printemps, l’eau circule en partie dans un gigantesque réseau souterrain.
Au 3e pont, on devine que le parking principal et la boutique de souvenirs ne sont pas loin : on commence à croiser quelques personnes. Le canyon ne fait même pas deux mètres de large à ce point, mais probablement une trentaine en profondeur.
J’arrive finalement à l’autre extrémité de Maligne Canyon. La route est là (le 6e pont est pour elle). Les touristes aussi. Je peux m’en rentrer tranquillement jusqu’à la voiture.
J16- Le lac Médecine
Je reprends la route vers le lac Maligne, après une courte pause au lac Médecine. Courte, parce que le lac est vide. Surprenant. En fait, c’est un lac qui n’est pas étanche : il se vide plus vite qu’il ne se remplit en hiver, et le contraire en été. Les indiens attribuaient celà à la sorcellerie d’un homme… médecine.
J16- Maligne Lake
Le lac Maligne est beau, grand, dans un emplacement magnifique. Pas surprenant, donc, que ce soit une destination touristique de choix. Mais en dehors des croisières en bateau (qui commenceront une fois le lac dégelé) il n’y pas grand chose à faire.

J16- L’aigle
Moment d’une très grande intensité, par contre, au moment où un aigle à tête blanche traverse mon objectif pendant que je prenais une photo. Je le regarde s’éloigner ensuite, saisi d’une émotion indescriptible. Ça n’a rien à voir avec un animal à quatre pattes. Rien à voir non plus avec un animal en cage. Je ne suis pas particulièrement un admirateur d’oiseaux en général. Pourtant, j’adore les rapaces depuis mes 11 ans. Alors pouvoir en voir un, si majestueux, traverser aussi sereinement le lac, avec une telle prestance…
J16- L’écureuil
Je m’arrête quelques kilomètres plus loin, sur la route du retour, pour faire quelques photos du paysage. Un écureuil vient jouer les modèles, et je décide d’en profiter.
J16- L’orignal
J’ai repéré une petite balade, un peu plus loin, vers le lac Beaver : 4 kilomètres, aller-retour, ça ne devrait pas prendre trop de temps. Sur la route en voiture, je croise une femelle orignal. Puis, sur le chemin du lac, à pied cette fois, je vois un orignal qui se promène de l’autre côté de la rivière. Nouveau coup de force sentimental : c’est quelque chose à voir en vrai. Je le regarde un peu, fais quelques photos, puis continue mon chemin pour le laisser tranquille. Rencontre intense, mais stressante un peu aussi. Comme souvent, ce fais ce qu’il est conseillé de faire dans les guides du parfait touriste. Je m’arrange pour faire du bruit. Je me parle à moi même, tanné de chantonner toujours les deux mêmes chansons. Je me récite un de mes contes. Celui du chat qui n’a pas de nom. Je commence à bien le maîtriser.
Au retour, l’original est toujours là. Il me voit. Me fixe intensément. Part en courant. Nouveau moment de stress intense quand je l’entends qui traverse la rivière à toute vitesse. Je ne suis vraiment pas à l’aise : on fait quoi quand un original vous charge ? Ce n’est pas écrit dans les guides de bonne conduite : ils ne parlent que des ours. On se cache dans les bois ?
J’hésite, mon bâton à la main. Oui, c’est aussi pour répondre au code de bonne conduite : si vous n’arrivez pas à éviter l’ours et qu’il vous attaque, ne faîtes surtout pas le mort : battez vous ! Dans le cas d’un face à face peu éventuel avec un ours, le bâton me paraît un plus très appréciable. Et sinon, et bien il reste très agréable pour marcher.
L’orignal sort de l’eau. Il n’est vraiment pas loin, mais je ne le vois pas. Au bruit, je l’entends qui continue à s’approcher, dans les sous-bois. Il traversera finalement le chemin en courant, cinq mètres devant moi. Instant magique, stressant et rassurant. Il se fout superbement de moi.
Je rentre à la voiture, perplexe et perturbé.
J16- Et l’ours
Le tas de voitures arrêtées n’importe comment sur le bord et au milieu de la route est devenue une vision classique.
Cette fois-ci, c’est pour un joli petit ourson noir.
Le photographe s’excuse pour la qualité des photos, mais il a décidé d’appliquer à la lettre le guide de bonne conduite du parfait touriste, qui demande de ne pas s’arrêter (ou alors très loin) et de ne pas sortir de son véhicule.
J16- In loving memoriam
Suite du programme ? Courses rapides en ville, téléphérique (il faut bien que j’en prenne un quand même) puis départ pour Mont Robson.
En route vers Jasper, à la sortie d’un virage que je ne prends pourtant pas particulièrement vite, avec une voiture qui arrive en face, un écureuil se précipite sous mes roues. Aucune possibilité d’esquive. Le « poc » me donne mal au cœur. Il est d’autant plus triste que je vois un deuxième écureuil traverser juste après dans le rétroviseur. Je les imagine en train de jouer. Je l’imagine cherchant son compagnon de jeu. J’essaie de me faire sourire en pensant à la blague des deux citrons qui traversent la rue : « presse toi un peu ! » mais ça ne marche pas. Je me sens vraiment mal ; parfaitement conscient de la vie que je viens d’enlever, et de l’irréversibilité de la chose.
En Colombie Britannique et en Alberta, il y a des plaques commémoratives sur presque tous les bancs. Une façon intelligente, j’imagine, de financer leur installation. Je me demandais à qui serait dédié ce récit de voyage. J’ai pensé pendant un temps à mes chaussures, car je ne suis pas sûr qu’elles reviendront… mais finalement, ça sera à un pauvre petit écureuil qui voulait simplement jouer. Ses quelques dizaines de grammes d’amusement n’auront pas fait le poids face à ma tonne de tourisme.
Sorry for that, little squirrel.
J16- Des montagnes plein les yeux
Petit message depuis Jasper, avant d aller prendre le téléphérique, puis de quitter le parc pour Mont Robson.
Tout va bien ici. Je devrais réapparaître sur la toile vendredi ou samedi normalement.
J16- Le téléphérique de Jasper
J’arriverais au téléphérique après un passage rapide en ville, et une quinzaine d’élans (troupeau en train de brouter à l’entrée de Jasper). Je monte dans la cabine avec une certaine inquiétude. Au final, c’est ma peur d’avoir peur qui me stresse plus qu’autre chose. Aurais-je vraiment perdu le vertige ?
Le panorama d’en haut est magnifique, malgré un important couvert nuageux un vent violent, et de la neige ! À 2300m d’altitude, on voit plutôt bien ! Ce sera d’ailleurs le point culminant du voyage.
J16- 108
Pourquoi 108 ? Parce que c’est le nombre maximal de wagons autorisés aux trains au Canada. De ce que j’ai cru comprendre, c’est parce qu’un train de 108 wagons, roulant à sa vitesse de croisière, mets 15 minutes pour traverser un passage à niveau.
Cent huit, c’est quand même beaucoup, c’est quand même long. En fait, c’est long comme ça :
J16- Téléphérique version panoramique
C’est là que l’on découvre le photographe déprimé de devoir travaillé avec un ciel gris, et les conséquences sur les photos.
J16- Reprendre la route
Je redescendrais quelques temps plus tard, après un chocolat chaud et une petite conversation agréable avec la serveuse. Je monte nostalgique dans la voiture. Quitter Jasper semble signifier pour moi la fin du voyage. Je suis d’humeur à conduire loin et longtemps, pour me changer les idées. La route est toujours aussi magnifique, au milieu de paysages de toute beauté. Conduire me fait du bien et j’envisage une très longue étape, en oubliant Mont Robson : la balade que j’aurais aimé y faire et trop longue.
J16- Là où s’accrochent les nuages
Quand j’arrive au centre touristique et point d’observation du Mont Robson, je m’arrête. Un mastodonte de 3940 mètres vient d’apparaître, sorti de nul part. Les deux montagnes qui l’encadrent dépassent timidement les 2500 mètres. Le plus haut sommet des rocheuses canadiennes et tout simplement impressionnant.
« Là où s’accrochent les nuages… » j’ai cette image dans la tête depuis le quatrième ou le cinquième jour de mon voyage. Je suis bien conscient de ne pas être le premier à y penser, à la formuler. Pourtant elle me plaît. Et là, soudainement, elle vient de se matérialiser devant moi.
J16- Monter pour mieux redescendre
Je reste un long moment à admirer cette montagne fascinante, avant de repérer un camping juste à côté, et une balade d’un peu moins de 10 kilomètres avec 350 mètres de dénivelés, qui permet de découvrir la rivière voisine, avant de nous emmener à un sommet qui offre un magnifique point de vue sur la montagne.
Il est encore tôt, considérant l’heure de couché du soleil. En plus, je viens de changer à nouveau d’heure. En fait, ça ne veut absolument rien dire pour moi : je vis au rythme du soleil depuis un bon moment maintenant.
J’installe la tente en 8 mn 30s (gonflage de matelas inclus) et me prépare pour aller me balader. Il est 18 heures, je sais qu’il faudra que je force un peu le pas. L’idée de me tester me plaît.
La première partie longe un petit canyon agréable, avec une mini cascade en bonus puis, après avoir traversé la route, on monte pendant deux kilomètres. Ça me prends environ 40 minutes, d’un pas rapide et sans fatigue. Je suis fier de moi. D’en haut, la vue sur le Mont Robson éclairé par le couchant est grandiose. Je me fais plaisir : la descente en courant ; ça me manquait de courir sous les arbres. Douze minutes pour arriver en bas, essoufflé et en sueur, mais en pleine forme quand même, et tellement bien !
J16- Je ne vole que les riches
La fin de la balade repasse par l’info touristique. Juste comme j’arrive, un gars part fièrement en faisant gronder le moteur de sa Corvette. Sur une table à pique-nique, je vois une belle gourde de randonnée rouge, fabriquée en suisse. En métal. Beaucoup plus belle que ma bouteille en plastique. Je regarde tout autour de moi, mais il n’y a absolument personne. Je me décide donc de partir avec. Un peu plus tard, alors que je suis plutôt loin, je vois la Corvette revenir au parking. Désolé pour lui si c’était pour la bouteille.
Je rentre au camping juste comme arrive les responsables de l’enregistrement. Après leur départ, j’entasse les bûches qui me suivent dans le coffre depuis plusieurs milliers de kilomètres. Et cette fois, j’ai pensé aux saucisses ! Elles étaient moyennes, certes, mais c’est pas grave : je les ai bien méritées !
J16- Photographies abstraites
Il eut été dommage de ne pas profiter au moins une fois du fait qu’il faisait noir, que j’avais un beau feu de bois, des boules lumineuses et une lampe de poche avec moi !
Si vous lisez « coucou » sur la troisième photo non seulement vous n’avez pas la berlue, mais en plus je serais très fier d’avoir réussi à faire quelque chose de lisible !