Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionJune 27th, 2016
  • J’ai toujours aimé aller à Québec. C’est une ville qui m’a toujours plu. Depuis le premier jour où j’y ai mis les pieds. Depuis ce jour, seize ans auparavant, qui a changé ma vie. J’étais assis au sommet de l’Astral. Un kir impérial devant moi. La ville s’étalait à l’infini à mes pieds. Clément jouait du piano. Ce jour là, j’ai compris que j’étais amoureux. Pas juste de cette fille magnifique rencontrée quelques jours plus tôt, mais d’un pays tout entier.

    Je suis retourné tant et tant de fois à Québec par la suite. Pour le Carnaval d’Hiver, pour le Festival d’Été, pour les 400 ans, pour mon premier vernissage d’expo photo, pour la Sainte Barbe, pour des anniversaires, pour des concerts… et tant de fois pour visiter des amis et me changer les idées. Québec est devenu mon petit refuge. Ma cachette quand j’avais besoin de fuir Montréal. Une ville belle et confortable. Où il fait plaisir de déambuler sans but précis. Marcher au hasard. Retourner aux mêmes places. C’est l’une des raisons pour laquelle je n’ai jamais voulu habiter à Québec. C’était mon lieu d’évasion. Quand on ne peut pas aller se faire remonter le moral chez ses parents, il faut bien un palliatif !

    Le taxi m’a déposé devant le Somos où j’étais resté pendant deux semaines pendant la Semana Santa. J’ai tout de suite été reconnu en entrant. Accueilli avec le sourire. « Bienvenue Sébastien ; regarde ce qui a changé depuis ton dernier passage ». J’ai retrouvé le lieu et son énergie si calme avec tant de plaisir ! J’ai posé mon sac, je suis sorti de l’hôtel. J’ai pris à gauche. Puis la première à gauche de nouveau. 6a Calle. Parque Union et son lavoir. Mon lieu préféré dans toute la ville. Oui, j’étais bel et bien de retour à Antigua. Et j’ai compris qu’Antigua pouvait prendre la même place dans mon coeur que Québec. Un endroit magnifique. Confortable. Où l’on a plaisir à avoir ses habitudes, mais juste ça. Des habitudes. Pas un quotidien. Antigua est un lieu pour se ressourcer quand le billet d’avion est trop cher, que le temps disponible est trop court.

    Il est toujours difficile d’expliquer quand ça va mal en voyage. D’autant plus quand on vit au paradis. Je me sens pareil à ce jeune homme à la vie parfaite. Oui, celui de mon conte sur la flûte. Puis je vraiment me plaindre alors que j’ai une job de rêve dans un hôtel paradisiaque avec une collègue adorable ? Alors que tant de gens jalousent ma vie et ce que j’en ai fait ? Alors que tant de gens me disent chanceux ? Car c’est un des maux du voyage. Voyager n’est pas facile. Être seul n’est pas facile. C’est la face cachée du voyage. Celle dont peu de gens parlent. Celle dont je ne parle jamais. Celle sur laquelle je n’écris pas. Car j’ai ce sentiment que je n’ai pas le droit de me plaindre. Je ne fais après tout que subir les conséquences de mes propres choix.

    Pourtant, vous qui me dîtes chanceux, vous qui m’enviez, sachez que je n’ai rien fait d’autre que suivre mes rêves. J’ai créé ma propre chance. J’ai été audacieux, et j’ai réussi. Mais je peux vous assurer que la vie à Lyon, avec un CDI et une colocation géniale, un bon salaire, des amis super, des bons bars à bière, mes parents pas loin, une voiture et des billets d’avion pas cher… cette vie même à laquelle j’ai tourné le dos parce qu’elle ne me convient pas. Cette vie là est tellement plus simple ! J’ai quitté confort, stabilité, amis, familles… pour la solitude. Je ne m’en plaindrai donc pas.

    Faire un burn-out au milieu de la jungle ; dans un endroit si paisible et si reposant peut paraître surprenant. M’imaginer moi faire un burn-out me parait encore plus surprenant. Et pourtant… il a fallu un enchaînement d’événements impossibles. Une quantité de micro-détails et d’improbabilités. Je ne peux m’empêcher de regarder tout cela avec admiration. Comme si la vie avait décidé que ce devait arriver, et qu’elle allait donc faire en sorte que ça arrive. Coûte que coûte. Elle a employé les grands moyens, et je ne peux qu’être fasciné maintenant que j’ai réussi à faire quelques pas en arrière. Maintenant que j’ai pu prendre un peu mes distances avec tout ça.

    Merci à Antigua de m’avoir accueilli ! D’avoir offert un cocon pour me reposer et me recentrer sur moi même. Merci au Somos de m’avoir accueilli de nouveau. Merci à Alluvia, la meilleure cuisinière de Antigua, pour m’avoir reconnu et nourri de nouveau de ses toastadas magiques. Merci à Mathilda pour une chouette journée en dehors de l’hôtel. Qu’il est bon de voir les gens en dehors de l’Hotelito Perdido ! Quand dynamique et environnement sont complètement différents de notre petite île paradisiaque !

    Merci à Ali, qui m’a prouvé que la vie nous fait toujours rencontrer les bonnes personnes au bon moment.
    Pendant longtemps, j’ai eu envie d’écrire sur Antigua, mais je n’y arrive pas. Mon time lapse est un remplacement un peu bancal. J’ai testé de ombreuses adresses. De nombreux cafés. J’aimerai parler du Rainbow, de Fernando, de l’Union, du Bohème, mais pour en dire quoi ? Antigua est un petit refuge pour les touristes. Zone de transition à l’arrivée ou au départ. Je connais désormais les adresses pour les bières de microbrasseries locales. Je sais qu’il y a un café inspirant à chaque coin de rue où j’ai plaisir à m’asseoir pour écrire ou relire la demoiselle. Qu’il y a tant d’endroits où se sentir bien… où se retrouver. Se ressourcer ! Où prendre soin de soi !

    Revoir des Chicken Bus, me promener dans le marché central, marcher dans la rue… pendant quelques temps, j’ai eu l’impression d’être un peu revenu au Guatémala. Bien sûr, Xela, Quiche ou Coban me manquent… mais au moins, j’ai replongé un peu dans ce pays que j’aime tant !

    Alors voilà…. quelques jours pour me reposer, prendre soin de moi, reconnecter avec moi même. Plus la leçon est importante, plus le prix à payer est élevé. J’ai payé un peu trop, la vie s’est excusée. Je peux retourner dans la jungle. Serin !

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