J’aime beaucoup l’architecture moderne. J’aime les bâtiments recherchés et originaux. J’aime voir qu’il y a une réflexion en arrière. Un travail de conception. Une exploration des formes et des contre formes. Travail de perspective, de géométrie, de symétrie.
J’ai été fasciné par les gratte-ciels de Chicago ; je peux admirer une tour. M’extasier devant une construction de béton. Quand il y a une recherche ; quand il y a un travail. Et si certains courants de l’architecture contemporaine m’inspirent (je pense par exemple au courant moderne avec les travaux de Le Corbusier sur la Villa Savoye) celui qui me parle le plus est sans le moindre doute le courant futuriste.
Oui, pour moi le stade olympique de Montréal est un chef d’œuvre. Je peux passer des heures à tourner autour, à l’admirer sous tous les angles. Tout comme j’ai adoré l’Opéra de Sydney. Il y a quelque chose de grandiose dans la Philharmonique de Paris. Et selon moi, le musée des Confluences de Lyon est une réussite. Ces projets pharaoniques s’accompagnent toujours de dépassements de coût. De complications. De délais. De scandales. Mais je ne peux m’empêcher de ne considérer que le résultat final. De rester admiratif devant ces sculptures géantes dans lesquels nous pouvons évoluer. J’accepte la non praticité de certaines idées, parce que oui, selon moi, dans certains projets, la forme peut l’emporter sur la fonction.
L’architecture est un art, et dans le monde de l’art, il faut parfois aller plus loin ; aller trop loin. Pour cela, il est sans doute mieux que je ne devienne jamais maire ou président. Je conduirais vite la municipalité ou le pays à la faillite pour avoir voulu faire construire trop de bâtiments en trop d’endroits. Alors je me contente de m’extasier devant ce que je considère comme l’une des plus grandes preuves du génie humain : quand l’art et la science convergent pour atteindre des sommets d’ingéniosité et de beauté.
J’étais venu à Valencia parce que j’avais vu la photo d’un bâtiment… j’ai découvert la Cité des Arts et des Sciences avec plus d’émerveillements encore qu’un enfant trouvant une montagne de cadeaux sous un sapin de Noël. Je me suis soudain trouvé projeté quelques milliers d’années dans l’avenir. Dans un univers de science fiction. Où je pouvais marcher, en m’arrêtant toutes les trente secondes pour faire des photos.
J’ai parfois exprimé la frustration de l’écrivain lors de mes voyages. Alors que les mots peinent à exprimer ce que je ressens ; alors que je n’arrive pas à décrire ce que j’ai vécu. Parfois, pourtant, ce n’est pas l’écrivain qui est frustré. C’est le photographe. Parce que devant la succession de bâtiments que composent la Cité des Arts et des Sciences, j’avais l’impression que jamais je n’arriverai à capturer le ressenti. La fascination. La beauté de ces lieux. L’immense énergie qui s’en dégage. Alors j’ai fait de mon mieux. J’ai fait beaucoup de photos, des étoiles plein les yeux. Sans être capable de m’arrêter. Encore et toujours. Sous cet angle, puis sous cet autre. Et au moment de retranscrire tout cela sur ce blog, au moment de sélectionner quelles images je vais bien pouvoir utiliser, je me demande comment je vais faire pour vous présenter ce qui, à mes yeux, et l’une des plus belles merveilles d’architecture futuriste qu’il m’a été donné de voir.
Palau de les Arts Reina Sofía
Ce qui est fascinant, avec la Cité des Arts et des Sciences, c’est que c’est tout un ensemble de bâtiments qui s’enchaînent. Je m’attendais à trouver un bâtiment, et je me retrouve au milieu d’un gigantesque ensemble architectural. Ce n’est donc pas juste un ovni posé au milieu de la ville, mais bien une zone complète qui a été pensée et aménagée.
Quand on arrive par le nord, le premier bâtiment que l’on voit et le Palais des Arts de la reine Sofia. J’ai d’abord eu l’impression de voir le vaisseau de Boba Fett dans la guerre des étoiles. Puis un casque. Puis une fleur. Puis tant de choses…
L’ensemble est colossal. Les dimensions imposantes. Et pourtant, tout est ouvert. Tout est léger. Les différentes couches laissent imaginer un bâtiment destiné à la musique classique, avec un principe de double coque que l’on retrouve dans tous les bâtiments philharmoniques modernes.
Et puis on regarde les détails, les perceptives, les lignes de fuite, les symétries…
L’eau est omniprésente partout sur l’esplanade. Aérant l’ensemble, agrandissant encore les bâtiments par le biais de nombreux effets de réflexions.
Mais ce n’est qu’après avoir longuement observé le bâtiment que j’ai réalisé. Je parlais de mariage entre art et science. Je parlais de prouesse technique. Ce que je me suis mis à appeler « la feuille de palmier », délicate courbure de béton, qui surplombe le bâtiment… c’est bien sûr le prolongement de cette longue tige que l’on voit partir de l’autre côté du bâtiment. Et non, il n’y a pas le moindre support. Aucun renfort sur le dessus… il s’agit d’une seule et gigantesque courbe de béton. Un bras de levier, des tensions complètement folles… et ça tient !
Quand à cette coque extérieure, ce profilé digne d’un vaisseau spatial en effet… cette première pelure… quand on regarde les contacts au niveau du sol… quand on réalise que là encore, tout n’est qu’équilibre… peut-on réagir autrement que par l’émerveillement ?
Un bâtiment qui allie fierté, modernité, et formes organiques. Symétries et disymétries. Vitre et béton, en grande partie recouvert de mosaïques blanches (on est en Espagne après tout !).
Et forcément, un tel bâtiment s’il est magnifique de jour ne peut qu’être tout autant inspirant à la nuit venue, vous ne pensez pas ?
Et puis sérieusement… imaginez juste une seconde que l’on vous propose de jouer sur ce piano là… oui oui, celui qui est dans l’image. Vous ne vous laisseriez pas tenter ?
Si j’aime particulièrement la vue de dos que je vous ai présenté un peu plus haut… je dois bien reconnaître que la vue de face de nuit me plait tout autant. Aucune idée d’où vient cette bestiole, mais franchement… elle n’est pas mignonne ?
L’Hemisfèric
Il y a donc les bâtiments… mais pas que. Il y a l’aménagement de l’esplanade tout autour. Les bassins d’un bleu pâle et les reflets qu’ils renvoient contribuent à renforcer l’aspect futuriste des lieux. Tout comme les passerelles… et les passages sur les côtés.
Le bâtiment qui arrive juste après est l’Hemisfèric. Là encore, on devine assez rapidement son utilité : c’est une géode. Un dôme cinéma. La forme d’œil est parfaitement logique. Et on ne peut plus évidente. Et puis je ne peux m’empêcher de retrouver un peu la forme des omus, créés par Myiazaki dans Nausicaa de la vallée du vent.
J’ai jeté un œil rapide à l’intérieur, pour voir la programmation, voir si je pouvais être tenté. Forcément, un documentaire iMax de 45 minutes sur les parcs nationaux américains, il y avait de quoi se laisser inspirer. Un beau programme pour la fin d’après midi. Je note…
Mais à l’intérieur, j’ai surtout vu un livre. Et appris un nom. Santiago Calatrava. L’homme en arrière de tout ça. Et le livre présentait une partie de son travail. Et j’ai été très surpris parce que j’ai découvert… parce que j’ai déjà croisé la route de cet architecte originaire de Valencia (et oui, c’est un local en plus !) beaucoup plus souvent que je ne l’aurai cru. Et j’avoue sans aucun soucis que j’ai admiré chacune de ses créations que j’ai pu voir. Sans savoir qu’elles étaient oeuvres du même homme. Par exemple, la Torso Tower de Malmø en Suède. Certes, il est difficile de reconnaître le style de Calatrava. Mais si je vous parle de l’aéroport de Lyon Saint Exupéry par exemple et de sa gare TGV ? N’est-ce pas beaucoup plus évident ? Et le pont cadran solaire de Redding où j’étais allé avec Mowgly, vous vous en souvenez ?.
Alors de mon côté, je garde son nom dans un coin de ma mémoire… et je sais qu’il y a un certains nombres de ses œuvres que je vais essayer d’aller voir. Mes raisons de voyager sont nombreuses, et pourtant, je n’ai aucun soucis à en rajouter une nouvelle !
Et la nuit alors ?
La nuit, ça me plait aussi !
El Museu de les Ciències
Et quand on continue, on arrive au musée des sciences. Sur le coup, celui-ci ne m’a pas plus impressionné que ça. De loin, je l’ai trouvé un peu trop brut. Trop répétitif. Pas assez organique. Sans savoir pourquoi, je n’arrivais pas à dire ce qui ne me convenait pas…
Ça a changé d’un seul coup, sans que je me rende compte, j’ai eu un coup de cœur. En me promenant autour. En découvrant les effets de perspectives, les fausses symétries, les répétitions, les détails…
Et surtout, surtout, les alignements…
De toutes façons, j’avais arrêté de compter mes photos depuis un moment. Je savais que ça allait être l’horreur à trier. Je savais que j’allais avoir beaucoup trop de photos à l’arrivée. Mais je ne pouvais pas m’en empêcher. Et puis une fois que j’ai vu cet autre œil, j’ai compris que c’était l’une des signatures de l’ensemble… chacun de ces trois bâtiments était orné d’un œil…
Et la nuit alors ? La nuit, l’éclairage, les symétries (encore et toujours) l’absence de gens…
Et au final, les lieux m’inspiraient tant que j’ai décidé de revenir le lendemain, pour visiter. Après tout, un musée des sciences a toujours le potentiel d’être intéressant. J’avais envie de le voir de l’intérieur. De m’en approcher. De l’explorer.
Étrangement, je n’ai même pas envisager d’essayer de le faire avec le Palais des Arts. Parce que l’on parle de musique classique. Et que l’on a cette habitude de voir ces lieux comme des lieux sacrés où il est impossible d’entrer. Peut-être que l’on m’aurait empêché d’entrer, en effet… mais je regrette ce réflexe que l’on m’a enseigné. La musique classique et ses temples ne sont pas faciles d’accès… alors je n’ai même pas essayé.
En revanche un musée des sciences, il est assez facile d’y rentrer. Les expositions en tant que telles ne m’ont pas beaucoup parlé. Très (trop) confuses. Beaucoup (trop) de choses à voir, sans vraiment savoir où aller. Mais des perspectives intéressantes et de belles photos !
L’Umbracle
Surplombant l’esplanade, et donc un peu plus en contact avec la réalité, se trouve l’Umbracle. Un jardin public semi ombragé. Encore et toujours des perspectives, des transparences, des jeux de formes, des symétries… tout cela avec la douceur de ces formes organiques…
Pont de l’Assit de l’Or
Calatrava doit une partie de sa notoriété à son travail sur les ponts. Il en a réalisé un grand nombre et c’est ce qui l’a fait connaître petit à petit. Parce que ses ponts, comme tout le reste de son travail, sont des recherches magnifiques d’équilibre, de balance et de points de tensions…
À la Cité des Arts et des Sciences de Valence, il y a bien sûr les deux passerelles qui séparent le Palais des Arts de l’Hémisphère qui sont déjà inspirantes. Mais le Pont de l’Assit de l’Or, avec son mat et ses câbles, harpe gigantesque offerte à… à qui d’ailleurs ? En tout cas, la harpe est là…
L’Agora
Au bout d’un moment arrive l’impression que cela n’en finit plus. J’ai commencé par me demander si c’était à cause de la lassitude, mais non. Je sais très bien que je ne peux me lasser de bâtiments comme ça.
L’Agora, un gigantesque espace couvert, n’a rien à voir avec les autres bâtiments. Même si c’est le même architecte, même si il a été conçu en même temps, je trouve qu’il n’a pas sa place au près des autres. Il est trop différent. Et au final, je trouve cela un peu dommage…
Je me demande combien de fois dans sa vie un architecte – même un architecte vedette comme Calatrava – a la chance de travailler sur un complexe aussi gigantesque. Probablement aucune.
J’ai fait plus de 400 photos des lieux… les lieux m’ont inspiré, ils m’ont fait rêver et voyager… et j’espère avoir l’occasion de revenir les explorer. Refaire des photos. Étudier de nouveaux angles, de nouvelles perspectives… continuer à regarder ce site magnifique sous tous les angles différents…