Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionNovember 26th, 2015
  • Ce sont les plus proches. Ce sont aussi les seules sur le bord de l’océan. Ambiance carte postale : premier plan, une pyramide maya. Arrière blanc, l’eau turquoise des Caraïbes. Difficile d’y échapper, n’est-ce pas ?

    Mes quatrièmes ruines. Je suis toujours loin de m’en lasser. Au contraire. Je continue de découvrir des lieux complètement différents d’une fois à l’autre. Des lieux qui n’ont rien à voir. Qui dégagent une énergie, un sentiment, unique à chacune. Je suis mieux de ne pas me lasser, j’en ai encore au moins trois autres de prévues au Yucatan. Peut être plus. J’essaierai sans doute d’en voir au Belize, aussi. Et puis après, bien sûr, il y aura le Guatemala…

    J’y suis allé avec Laurie. En van. Ça faisait longtemps que je n’avais pas conduit. Je me souviens encore. C’est toujours ça !

    L’arrivée sur le site n’est pas forcément très agréable. Grand parking -cher- et beaucoup de boutiques pour touristes. Arrivés en même temps qu’un bus, il y a des gens un peu partout. Ça ne fait pas forcément très envie. On remonte tant bien que mal les flots, on se faufile entre les gens, contourne le gros groupe à l’entrée. Non, vraiment, l’arrivée n’est pas évidente. Et puis ça se dégage un peu. On est à la muraille, les gens commencent à se disperser, à partir un peu dans toutes les directions. Et soudain, c’est beaucoup plus tranquille. Et ça devient joli.

    Les remparts permettaient de contrôler les activités intérieures à la ville, en marquant la différence entre les élites, vivant à l’intérieur de l’enceinte, et les gens du peuple, vivant à l’extérieur. Les remparts servaient aussi à assurer la protection des lieux bien évidemment. Leur hauteur est assez irrégulière. Ils ne suivent pas complètement les déclivités du terrain. C’est un rectangle à trois côtés. Le quatrième côté étant protégé par la mer.

    Ils ne disposent que de cinq entrées. Une à l’ouest, deux au nord et deux au sud. S’ajoute à cela deux tours de guets, sur le mur opposé à la mer. De plus, par choix stratégique, la ville a été construit sur l’un des points les plus élevés de la région. Le mur de Tulum n’a rien d’exceptionnel : de nombreuses autres cités disposaient de mur identiques. Mais celui-ci est particulièrement bien conservé.

    La ville est aussi connue sous le nom de Zama. Pour ceux qui n’ont pas révisé leurs cours de Maya récemment, Zama veut dire Aube. Parce que c’est l’un des endroits où l’aube se lève en premier dans le pays.

    Il s’agissait d’un port commercial, très actif du fait de sa location. Actif aussi bien comme centre de redistribution de produits locaux, mais aussi d’échanges avec d’autres pays. Les marchandises provenant alors d’aussi loin que l’Amérique Centrale, la côte du Pacifique ou le centre du Mexique. Que ce soit par la mer ou par la terre.

    La vie quotidienne a Tulum était rythmée par la politique, les rituels magiques religieux, les arts et les observations astronomiques. Notamment de la planète Venus, l’étoile du matin et du soir, représentante de Kikulkán Quetzalcóatl. L’orientation de la ville, plein est, est en lien direct avec tout cela.

    La côte est comptait de nombreux ports. Certains murés. D’autres non. C’étaient les points principaux d’une route commerciale s’étirant du centre de la péninsule du Yucatan au centre du Mexique et de l’Amérique Centrale. Dans la région, Tulum était très clairement la ville dominante, offrant de nombreuses connexions vers d’autres villes d’importances.

    Casa del Cenote 

    En entrant par la porte nord est, on arrive directement à la Casa del Cenote. La maison porte ce nom pour la simple et bonne raison qu’elle est construite au dessus d’une petite cenote. Les villages mayas de la côte est ont tous le même problème : l’accès à l’eau douce. Il est donc très fréquent de trouver des bâtiments construits directement au dessus d’une cenote. Celui-ci en particulier était sur deux étages. Une maison ordinaire au dessus de la cenote, qui a été agrandie par la suite en ajoutant un étage, dans lequel on a trouvé des ossements. Le bâtiment était sans doute une crypte.

    Templo del Dios Viento 

    De l’autre côté de la rue, un peu plus loin, sur une hauteur, se trouve le temple du dieu du vent. Dans la culture Maya, les dieux sont associés à de nombreux éléments. Parfois à la météo (dieu du vent ou de la pluie), parfois à l’astrologie (dieu de la lune, dieu du ciel), parfois à des plantes (dieu ceiba – un arbre que je ne connais pas), parfois à des concepts (dieu de la guerre, dieu de la mort, dieu du suicide) et parfois à des animaux (dieu jaguar, dieu serpent).

    Aussi bien les saisons que les activités quotidiennes sont marquées par des rites dédiés à la divinité concernée. Ceci afin de s’assurer que le travail des hommes soit récompensé du mieux possible.

    La ville de Tulum était dédiée à a planète Venus, une déité double. Celle de l’étoile du matin et de l’étoile du soir. Le Dieu Descendant (dieu du soleil couchant) est fortement associé à Venus, et on retrouve son image sur certaines façades de bâtiments, toujours orientée en direction de là où la planète disparaît à l’horizon.

    Un autre dieu important de Tulum était le dieu Ek Chuah, le dieu du commerce, à qui un tribu était payé lors des échanges commerciaux.

    Mais ce temple là, donc, c’est le temple du vent. Il honore Kukulkán. Vu du ciel, il a une forme circulaire. Comme tous les temples qui honorent Kukulkán. Il est construit sur une petite élévation, qui domine la mer. Premier front aux intempéries. Et en contact direct avec son dieu, donc.

    À ses pieds, des mini temples – assez classiques sur la côte est. Beaucoup trop petits pour être utilisés pour la moindre cérémonie, on imagine qu’ils servaient d’autels où laisser les offrandes.

    Casa del Noroeste 

    Après le temple, on décide de s’éloigner un peu de la côte, pour avoir un meilleur aperçu d’ensemble sur la ville. Et pour dire bonjour à un chouette iguane.

    iguane1

    Certains iraient jusqu’à prétendre que la légende de cette photo devrait être
    « on lui dit que c’est un caillou ? »
    Mais l’auteur de ce blog ne veut pas choquer son lectorat et préfère intituler cette photo
    « bel iguane se faisant bronzer ».

    On passe à côté de la Casa del Noroeste (maison du nord ouest). Régulièrement, des panneaux donnent quelques informations sur les mayas. Ici, on apprend que pour eux, la Terre était plate et immobile. Ils avaient un contact particulier (et presque privilégié) avec la nature. Elle fournissait tout ce dont ils avaient besoin, pour assurer leur hébergement, leur protection et fournir les ressources nécessaires. La jungle était une ressource à part entière, et elle était respectée pour cela. La ville était surtout tournée vers la pêche. La chasse et l’agriculture étaient des activités secondaires, mais nécessaires à la survie. La ville comptait aussi des massons, des tailleurs de pierre, des briquetiers, des sculpteurs, des peintres… la société était divisée en trois niveaux : les dirigeants, les spécialistes, et les travailleurs.

    El Palacio 

    Templo del Dios Descendente

    Le Dieu qui descend. Associé au soleil couchant. Les murs du temple ne sont pas droits. Ils penchent un peu dans toutes les directions. Le temps n’y est pour rien. Il a été construit comme ça.

    Comme toutes les ruines, on a l’habitude de les voir grises. Couleur de la pierre brute. Comme la plupart des bâtiments anciens, ceux-ci étaient en réalité très colorés. Les murs étaient peints. Souvent d’images représentant les dieux. Ou alors la nature. Les couleurs étaient vives. Brillantes. Et elles changeaient en fonction de l’orientation de la façade. Chaque point cardinal avait sa propre couleur.

    Les intérieurs étaient peints également. Souvent. De nouvelles murales recouvrant les anciennes.

    El Castillo 

    Juste à côté de Descendente, un peu plus gros. Beaucoup plus gros, même. Le bâtiment emblématique de Tulum. Un temple, surplombant tout le reste de la ville, avec la mer des Caraïbes en arrière plan. Parfait pour les cartes postales. Très joli pour les touristes aussi.

    Ce sera d’ailleurs mon opinion finale sur les ruines de Tulum. Je le disais, elles sont toutes différentes. Celles-ci confirment ce sentiment. Tulum est un musée à ciel ouvert. Un musée de toute beauté. L’herbe est propre, rase, bien coupée. Les bâtiments sont bien entretenus. Pas de jungle. Juste des points de vue magnifiques. Dans tous les sens. Sauf que… sauf que, comme dans beaucoup de musée, l’endroit est un peu froid, un peu impersonnel. Des cordes entourent les bâtiments / oeuvres d’art. Impossible de les approcher. De les sentir. De les ressentir. Impossible de monter sur aucun. On reste à distance respectueuse. On touche avec les yeux. Et en retour, les lieux ne nous touchent pas. Ou en tout cas, ils ne me touchent pas. Aucune énergie particulière n’émane des bâtiments, comme c’était le cas dans les autres ruines. Il y a quand même la puissance majestueuse de la mer. La beauté des éléments. La beauté des lieux. Après tout, c’est déjà beaucoup. Là encore, que l’on ne se trompe pas : je suis heureux d’être ici, et je ne regrette absolument pas d’être venu. Heureux, aussi, de continuer à ressentir des émotions différentes, de voir que toutes ces ruines sont différentes.

    Le chemin contourne ensuite El Castillo. On peut passer derrière. Se retrouver sur la côte, en haut des falaises. Dominer la mer. Admirer les vagues. Admirer l’arrière des bâtiments. Admirer l’ensemble. Et rester sans voix, parce que oui, l’endroit est de toute beauté. Si Tulum ne prendra pas la première place dans la catégorie « mes ruines préférées » il prend la première place dans la catégorie « les ruines les plus belles ». Mais voilà, c’est un classique : la beauté, ça ne fait pas tout ! Si je ferais volontiers un one night à Tulum, pour voir le coucher et le lever de soleil, je passerai facilement plusieurs jours à Coba ! Ahem…

    Structure X

    Pourquoi celle-ci n’a jamais été nommée, je ne sais pas. Peut-être parce qu’elle est toute seule dans son coin. Que l’on a aucune idée de son utilité. Et en plus, je ne me souviens même pas de son vrai numéro de structure… Quoi qu’il en soit, moi j’habiterai bien ici. La vue est saisissante. D’ailleurs, si je passais une nuit à Tulum, c’est sans doute ici que je dormirai. Le réveil avec la mer et le soleil en train de se lever doit rentrer dans la catégorie des souvenirs éternels.

    El Templo de las Pinturas 

    De tous les bâtiments encore debout, c’est celui qui garde le plus de décorations. Notamment les sculptures en façade, mais aussi des fresques à l’intérieur. Que l’on ne peut pas voir…

    Il est constitué de deux niveaux. Au premier niveau, un temple. Dans un temple. Au deuxième niveau, un temple tout simple. Trois en un, donc. Le temple intérieur est décoré de murales. L’extérieur de sculptures en relief. Des masques dans les coins, et trois niches en façade, au centre desquelles une représentation du dieu descendant. La décoration du temple supérieur est beaucoup plus simple : des empreintes de mains, de couleur rouge.

    Les pigments étaient produits de différentes façons. Le noir et le rouge était fait de terre et de minéraux. Les autres couleurs, notamment le bleu et le rouge, étaient obtenues grâce à des plantes.

    Vue d’ensemble 

    En s’éloignant un peu de tout ça, en prenant un peu de recul, on arrive à avoir une vue d’ensemble de toute beauté. Seul regret : on ne peut pas monter suffisamment haut pour voir la mer en arrière plan. Mais on va pas se plaindre. Le panoramique que l’on obtient depuis l’arrière des ruines est déjà plutôt intéressant !

    tulum_ruines_pano

    Je quitte les lieux satisfait. Ravi. Il y a beaucoup de touristes, mais ils restent facile à éviter : le touriste avance vite. Il faut juste un peu de patience. Et quand on attend un peu, les lieux se dévoilent. Beaucoup plus beaux, beaucoup plus tranquilles.

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