Mon voyage commence ici et maintenant. Certes, on pourrait arguer que tout voyage commence « ici et maintenant ». Et pourtant… pourtant, cela n’a jamais été aussi vrai qu’aujourd’hui. Je suis ici. Je suis maintenant. Je pars pour un autre ici. Je pars pour un autre maintenant.
Fidèle à mes habitudes, l’aventure commence dans un train. Mon sac à dos est là, à côté de moi. Je l’ai bouclé le matin même, en moins d’une heure. Je pars pour une durée indéterminée. Avec un sac au contenu un peu aléatoire. Pour suivre un itinéraire que je ne connais pas. Tout est beau. Tout est parfait.
Mon sac à dos est trop lourd. Comme d’habitude. Je ne sais pas voyager léger. Je ne veux pas voyager léger. Je ne pars pas faire du stop. Pas cette fois. Je pars retrouver Laurie, avec qui j’ai voyagé à l’automne passé. Je pars retrouver Laurie, qui se ballade actuellement dans les environs de Montréal avec son van. Je pars retrouver Laurie, qui m’embarque avec elle pour l’Amérique du Sud.
Comme disait Oscar Wilde, « la sagesse, c’est d’avoir des rêves suffisamment grands, pour ne pas les perdre de vue quand on les poursuit ». Le rêve a commencé petit. Dans les deux sens possible. Je devais avoir douze ans, quand j’ai vu pour la première fois la couverture d’un livre dont je ne me rappelle plus le nom, alors que je l’ai revu il y a quelques jours à peine. Un livre parmi tant d’autres, dans la bibliothèque de mes parents. Un livre que j’ai feuilleté et refeuilleté. Un livre dont la couverture présente une photo du Machu Pichu. Étrange comme certaines décisions peuvent être prises. J’étais encore un enfant ; j’affirmais déjà « un jour j’irai là bas ». Oui, un jour j’irai à Machu Pichu.
Le temps a passé. Le rêve a grandit. Au moins, j’étais sûr de ne pas le perdre de vue. « Machu Pichu » est devenu « Pérou ». « Pérou » est devenu « Cordillère des Andes ». « Cordillère des Andes » est devenu « Amérique du Sud ». Plus de vingt ans que j’ai ce rêve. Je suis dans un TGV ouigo bleu et rose. Un TGV qui m’emmène réaliser ce rêve. À grand renfort de tours, de détours, de contours.
Je suis parti à l’automne dernier pour terminer l’écriture de « À Portland, tourne la page ». Je suis parti chercher l’inspiration mais aussi les images qui me manquaient. Les images dont j’avais besoin pour terminer ce projet magnifique. J’ai trouvé toutes les images dont j’avais besoin. Et surtout, j’ai rencontré Laurie. Laurie que j’ai côtoyée pendant dix jours à peine, et à qui j’affirmais à la fin de notre voyage commun « voyager en Amérique du Sud avec toi, je signe sans hésiter ! ». Partir chercher des images et trouver la personne qui va nous aider à réaliser un rêve. La vie n’est elle pas bien faite ? Je vais voyager pendant plusieurs semaines, plusieurs mois, avec une fille au moins aussi folle que moi. Ne faut il pas un (magnifique) grain de folie pour s’engager dans un voyage de plusieurs mois avec quelqu’un que l’on n’a connu que pendant dix jours ?
Doutes, interrogations, inquiétudes… il y en a eu. J’ai mis longtemps avant de me décider. Avant d’affirmer haut et fort « je pars rejoindre Laurie ; nous partons en Amérique du Sud ». L’inquiétude n’est pas vis à vis de ma compagne de voyage. Je sais que tout se passera bien. Nous avons la même approche du voyage. La même légèreté du quotidien. La même soif de liberté et d’indépendance. Le même enthousiasme. Les mêmes envies. Non, l’inquiétude tient au tournant sur lequel je viens d’entrainer ma vie. « Life changing decision ». Ce départ signifie énormément de bouleversement. Au niveau personnel, au niveau professionnel, au niveau spirituel.
Oui, la (ma) spiritualité sera au coeur de ce voyage. Je voyage désormais autant intérieurement qu’extérieurement. Ou plutôt, je le fais désormais de façon consciente. Car tout voyage extérieur est aussi intérieur. « Nous aimerions bien faire cette promenade que nous n’avons jamais fait dans ce monde réel et qui est parfaitement symbolique de la route que nous aimons suivre dans le monde intérieur idéal ». (Thoreau / Walden : Marcher). Nous avançons dans les deux plans, en même temps.
J’ai préparé mon voyage spirituel bien plus que mon voyage physique. Les voyages physiques, j’ai l’habitude. Il ne me faut plus que 40 minutes pour faire mon sac à dos (et oublier « inconsciemment » mon téléphone portable). J’ai ma routine. Je sais quoi emmener. Je sais qu’il est trop gros. Je sais que c’est pas grave. Mais un voyage spirituel, c’est autre chose. Alors je m’y suis préparé. Déconstruit puis reconstruit. Démolir et reconstruire la chambre de son enfance est une forme de méditation très particulière. Hautement symbolique. J’ai tout démonté, j’ai tout reconstruit. J’ai fait la paix avec mon passé mais aussi avec mon futur. Je me suis construit un sanctuaire qui peut désormais m’accompagner partout où je vais. Un lieu chargé d’amour et de passion. Je suis prêt à partir. Comme d’habitude, mon voyage ne commence pas. Il continue.
Il y a une question que l’on pose souvent aux voyageurs. « Que trouve-t’on dans ton sac à dos » ? Dans le mien, beaucoup de choses dont je pourrai me passer, mais que je suis heureux d’avoir avec moi. Du matériel photo, un ordinateur, un didgeridoo, quelques bouteilles de bières (qui n’iront pas plus loin que Montréal). Deux reblochons (idem). Un petit cadeau pour le van de Laurie. Petit gadget amusant et potentiellement pratique. Dans un sac, il faut toujours au moins un livre (« l’art de la méditation » de Matthieu Ricard, que Anissa m’avait recommandé alors que j’étais encore en Australie et que je n’avais toujours pas acheté – mon petit doigt me dit que des citations de ce livre apparaitront dans les prochains posts ). Une brosse à dent pliable (cadeau très pratique improvisé à la dernière minute de Bernadette. Merci !). Mon camelback. Parce qu’avoir trois litres d’eau sur le dos, c’est toujours pratique en randonnée (je vous rappelle que « Cordillère des Andes » fait partie de ma destination et que Laurie aime marcher au moins autant que moi ; vous en lirez, du dénivelé !). Et de quoi camper, si Laurie et moi décidons d’avancer chacun de notre côté pendant quelques temps.
Tout cela, je pourrai m’en passer au besoin. Mais je l’ai avec moi, alors pourquoi m’en priver ? Rien d’autre dans les poches que mon portefeuille. Quel plaisir de ne plus avoir aucune clé ! L’essentiel est beaucoup plus réduit : ma flûte (et son magnifique étui protecteur, merci Bernadette !), de quoi écrire, de bonnes chaussures de marche. Je suis allé les acheter hier ; un autre cadeau de dernière minute. De ma maman cette fois. Vous vous souvenez peut être de mes anciennes chaussures. Celles qui ont fait tous les continents (traversant l’Australie du sud au nord, les États Unis d’est en ouest et d’ouest en est, des balades dans tous les sens en Europe, quelques petits sauts en Asie, et un minuscule clin d’oeil au Maroc). Ces chaussures ne me suivront pas plus loin. Malgré tout l’attachement que j’ai développé pour elle (y’a de quoi, en plus de quatre ans !), je ne pouvais pas continuer. Souhaitons à mes nouvelles compagnes de marche un avenir aussi intense et actif que leurs prédécesseurs !
Le paysage défile. Mon TGV bleu et rose continue d’avancer à toute vitesse. Il parait que l’avenir m’attend. C’est possible. On verra bien quand je serai rendu là. Pour le moment je suis ici. Pour le moment je suis maintenant. Pour le moment je suis bien. Pour le moment, je suis heureux. Ce n’est pas tant l’avenir qui m’attend qu’un autre « maintenant ».
« Je construis ma réalité comme je la nomme ». Il y a quelques semaines, je construisais un rêve temporaire, entouré d’un groupe de personnes magnifiques. Le rêve a vécu. Le rêve s’est terminé. « Mais que deviens le rêveur, quand le rêve est fini ? » demande Thiéfaine. Dans mon cas, la réponse est évidente : le Rêve n’est pas fini. Il ne se terminera jamais : jour après jour, je construis le rêve de ma vie…
Et le prochain article il arrive quand? On s’impatiente!
On y travaille, on y travaille !
Pour de la construction et un beau boulot de volontariat comme tu les aimes :
http://intiecolodge.com/
Je viens de lire un article sur leur travail et apparemment ils cherchent du monde en continu…
Bises!
Pour plus d’infos :
https://mrmondialisation.org/un-eco-lodge-en-amazonie-au-profit-des-indigenes-lance-par-une-jeune-francaise/
[…] de toutes ces vérités communes… on verra bien ce que mon exploration m’apportera. Mais je parlais de voyage spirituel avant de prendre l’avion pour Montréal, et il me semble qu’il est temps que tout cela […]