J’ai bien dormi. Pas forcément très longtemps. Mais d’un vrai sommeil, profond et reposant. Sans bruit de voiture, Sans parking. Sans avoir trop chaud. Sans me faire piquer par les moustiques. Sans me réveiller… ça fait du bien ! Mon sac à viande en soie est doux, et a fortement contribué à apaiser mes démangeaisons pendant la nuit. Je ne me suis pas gratté, et je n’ai pas envie de commencer. Quand même… je passe une main sur mes jambes, sur mes bras. J’aimerai bien trouver un aveugle. Je suis persuadé que les moustiques ont laissé deux ou trois romans au minimum !
Après une longue discussion avec Laurie, nous arrivons à la conclusion que ça ne rime pas à grand chose de faire demi-tour. Vue la quantité de moustiques là où nous avons dormi, nous allons nous faire dévorer par les moustiques si on fait des balades par là-bas. Alors on préfère reprendre la route, et continuer d’avancer histoire de fuir les moustiques. Au moins, ça fait changement. Ce n’est pas la pluie qui nous empêche de faire ce que l’on veut. Nous avons un grand ciel bleu. Et il fait chaud. Très chaud !
Big Cypress National Preserve
Nous sommes dans la Big Cypress National Preserve. Cette zone protégée, donc, au nord des Everglade, qui sert à protéger une partie des sources d’eau du parc.
Nous roulons jusqu’à un autre centre de visiteurs, où nous récupérons quelques informations sur des balades à faire un peu plus loin sur la route. Un petit détour en voiture -les fenêtres fermées les moustiques ne rentrent pas- et deux petites balades assez courtes mais qui promettent de beaux points de vue. Sans oublier, évidemment, de dire bonjour aux alligators du coin !
Kirby Storter Roadside Park
Premier arrêt, une petite promenade sur pilotis, sous les arbres. Comme dirait les cowboys fringants, « c’était pas un mauvais spot, on entendant presque pas l’autoroute ». Et puis bon, c’est joli. Il y a énormément de promenades sur pilotis dans la région (assez logique, me direz vous, dans une région de marécage – et hop, on laisse une occasion unique à ma maman pour faire de la pub pour les marais de la Voure si ça s’écrit comme ça) et j’aime bien. Marcher sur du bois (parfois du vrai, souvent du faux) c’est agréable. Et ça se fait pieds nus sans problème.
The Loop Road
Juste après, nous avons quitté la route principale, pour faire le petit détour par une jolie petite route gravillonnée. Jolie, certes, mais un peu tout le temps pareil. Mention spéciale pour ce magnifique spécimen de Vaulturus Gandalfus dans sa célèbre position du « you shall not pass ».
Mention aussi pour le petit alligator posé tranquillement sur le bord de la route. Premier alligator que nous voyons en mode vraiment « sauvage ». Certes, ceux que l’on voit depuis les pilotis sont aussi des alligators sauvages. Mais le fait de les voir depuis une promenade organisée donne à l’ensemble un petit côté « zoo » qu’il n’y a pas ici, dans cette rencontre fortuite et sympathique.
Fakahatchee Strand State Preserve
La région est très sauvage, très protégée. C’est ce que je voulais voir de la Floride, quand j’ai compris quand la Floride fonctionnait. C’est peut être par là que je reviendrai, si je reviens un jour en Floride. On quitte Big Cypress pour une autre aire protégée, où on s’arrête juste après pour une autre promenade sur pilotis.
Et là, je suis tombé en amour. Est-ce parce que les lieux se trouvent sur une réserve indienne qu’ils dégagent une énergie aussi magnifique ? Je n’en ai pas la moindre idée. Mais l’endroit est juste magique. J’ai avancé en prenant tout mon temps, en faisant un câlin à un arbre qui me plaisait, en marchant lentement. En regardant partout. En oubliant le temps, en oubliant les contraintes. En vivant dans le ici et le maintenant, ce que je n’arrive pas à faire dans ce voyage où il faut toujours partir, toujours avancer. J’étais emporté par les lieux. Je suis allé jusqu’au bout de la promenade, et je suis resté un long moment, les yeux fermés. C’était un très bon spot. On entendait pas du tout l’autoroute. Le son de l’eau, le vent dans les arbres, les oiseaux, les ploufs d’origine inconnu… les arbres magnifiques sur le bord du chemin. Les figuiers étrangleurs, et la façon dont ils poussent, créant ces enlacements étrangement magnifiques (et mortels…).
Nous avons repris la route. J’avais le coeur beaucoup plus léger. Une bonne partie du stress évacué.
Ten Thousand Islands National Wildlife Refugee
Une dernière petite balade pour la route. Pour aller sur une tour d’observation, observer les marais.
Selon la bonne vieille tradition, j’aurai volontiers passé plus de temps ici. Mais nous avons continué d’avancer. Jusqu’à Naples. Oui, ça en fait de la route. Enfin non. Parce que c’est pas le même Naples. Enfin pas celui qui est très connu. Lui est moins connu. Il est sur la côte ouest de la Floride. On a continué encore un peu vers le nord, à Bonita Springs, et on est allé s’installer sur le bord de la route à Lovers Key State Park.
Lovers Key State Park
Retour sur la côte. Retour dans les maisons, les voitures, les constructions. On arrive pourtant à trouver un endroit sans panneau « no overnight parking ». Le grand parking de la Marina du parc. Je me doute quand même un peu que l’on a pas le droit de dormir ici, mais on tente le coup quand même.
Il est deux heures du matin environ. Peut être un peu avant. Le projecteur suivant est caractéristique. Il éclaire la voiture sous tout les angles. L’approche est caractéristique aussi. Un premier tour de la voiture pour s’assurer qu’il n’y a pas de danger. Puis se garer un peu en retrait, et poser le véhicule en plein phare. Ouvrir la porte, s’approcher.
J’ai deviné depuis bien longtemps. Nous ouvrons donc la porte avant que le shérif du coin n’ai le temps de toquer. Contrôle d’identité, quelques questions. La procédure est un peu long. Il nous confirme que l’on n’a pas le droit de dormir ici. Mais que comme en même temps on ne fait rien de mal et qu’on était « obviously » en train de dormir (cheveux dans tous les sens, tête de déterrés, pieds nus) et qu’on est en règle, il nous dit qu’on peut finir la nuit ici. On le remercie. Il repart. On se rendort.
Le lendemain, nous rentrons sagement dans le parc. On se dirige vers la plage, on se trempe un peu les pieds. L’eau est froide. Elle doit être dans les 22, je pense. C’est horrible. Mais on se force un peu, et ça ne se passe pas trop mal. On regarde un peu, on observe la faune locale. Il n’y a rien à voir dans l’eau. Mais hors de l’eau, je sors le télé. Parce que sinon, Boulette va se moquer que je trimballe un 70×200 pour rien (oui oui, ces créatures sont bien vivantes et en mouvement !).
On profite encore un peu de la plage, et puis on va faire une petite balade le long de la rivière. Et je me reconnecte à nouveau avec tout ce qui m’entoure. La forêt m’accueille. Les arbres m’apaisent. Je marche en prenant tout mon temps. En admirant, en étant heureux, en étant bien. J’ai fini d’évacuer le stress qui était en moi depuis quelques temps. Pas complètement. Je sais qu’il en reste encore du ancré bien profond. Du qu’il faudra que je trouve un moyen d’évacuer. Je sais très bien comment je ferais. Bientôt. Bientôt. En attendant, je fais la course avec une tortues, et j’en filme deux autres qui s’engueulent.
Nous quittons la Tamiami Trail (la première route reliant Tampa et Miami) et que nous suivions depuis un moment. Nous sommes posés sur l’autoroute. Et nous roulons plein nord.
les marais de Lavours !