Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionFebruary 8th, 2022
  • Peña del Fraile

    Il y a quelque chose de surréaliste. De pas naturel. Dans ces formes, mais aussi dans ces associations de couleurs. Un peu comme si on regardait un paysage dessiné par un enfant. On pourrait alors le regarder et lui dire « tu as vraiment beaucoup d’imagination »…

    J’avais eu un sentiment similaire en explorant les différents parcs nationaux du sud de l’Utah. L’impression d’être dans un univers parallèle, à cause de ces paysages non crédibles… il y a des années de cela, j’avais commencé à m’intéresser à la modélisation 3D, grâce à un logiciel du nom de Bryce. J’aimais beaucoup les terrains extra-terrestres qu’il permettait de générer. Jusqu’à ce que je comprenne que son nom faisait référence à Bryce Canyon, dans l’Utah. Et que tout cela n’avait rien d’extraterrestre. Et là, alors que je me promène tranquillement dans la Peña del Fraile, je repense un peu à tout ça. À ces textures qui ne me paraissaient pas normales, et qui sont là, tout autour de moi. À ces paysages, que l’on pense irréels…

    Parce que oui, je suis de retour dans les Bardenas. Évidemment ! Vous ne pensiez pas que j’allais régler un endroit comme ça avec un seul article, deux jours de balades, et quelques centaines de photos ! Parce qu’il y a autre chose que je retrouve dans les Bardenas, et qui me fait un bien fou. L’immensité des paysages. Le regard qui se perd dans le lointain. J’avais peur que les Bardenas se résument à quelques magnifiques monuments géologiques… mais ça n’est pas le cas. On peut errer, explorer, s’y perdre si on a envie. C’est grand. Et du coup, il est vrai, peu propice aux promenades à pied. Quoique… il y a quand même quelques balades à pied indiquées sur la carte que l’on m’a donné. Elles ne sont pas nombreuses, mais elles existent.

    Du coup, quand j’ai finalement réussi à quitter Tudela et que les galères se sont arrêtées, j’ai pris la route vers le sud est. Jusqu’à Buñuel ; puis encore un peu après. Et juste avant d’entrée en Aragon, j’ai pris le petit chemin de terre qui partait à gauche, et je l’ai suivi, sur une dizaine de kilomètres.

    Et au bout du chemin, je suis parti me balader. On me proposait 4,6 km de marche, 200 m de dénivelé, ça me tentait bien. Il était 16h, le timing était bon pour la promenade, et je pouvais ensuite revenir à Buñuel pour la nuit.

    Je suis donc parti marcher, sans trop savoir à quoi m’attendre. Si ce n’est ce paysage magnifique, et ce sommet assez impressionnant juste à côté. J’ai assez vite compris que la balade devait sans doute en faire le tour.

    Mais alors que j’avançais et que je montais, j’ai fini par douter de plus en plus… en fait, peut être que je ne suis pas en train de faire le tour. Peut être que je vais… là haut ?

    Ce matin, je me suis lavé les cheveux (ça fait parti des choses qui n’ont pas été galère). Et quand je me lave les cheveux, j’aime bien les garder détacher pendant plusieurs jours après. D’ailleurs, en ce moment, je suis de nouveaux dans une période cheveux détachés, qu’ils viennent d’être lavés ou non. Ce que je n’ai pas prévu, c’était le vent qui commençait à se lever de plus en plus alors que je grimpais… mais je persistais.

    Et puis je suis arrivé en haut, et franchement, aucun regret… fin de grimpette un peu raide, certes… mais un paysage pareil… une vue pareille… et un vent qui souffle autant…

    À mon grand regret, l’heure, mais surtout les rafales de vent de plus en plus violentes, font que je ne peux rester aussi longtemps que je l’aurai souhaité en haut. Mais là, clairement, avec le vent, je commence à avoir froid. C’est fou comment ça refroidit vite se truc… du coup, je peste contre la météo, tout en admirant le paysage. Quand j’y arrive…

    Je sais, c’est rare que je poste des photos de moi… je devrais le faire plus souvent pour aider mes lecteurs qui ne me voient pas souvent à me reconnaître.

    La descente me permettra parfois d’avoir des petites accalmies ventesques, mais pas tant que ça. Je ne peux m’empêcher de penser au livre dont j’ai attaqué la lecture il y a quelques jours. « La horde du contrevent ». L’objectif : trouver l’origine du vent. Clairement, moi on m’engage pas pour ce genre d’expédition. J’aime pas le vent. Mais peut être que je l’ai déjà dit. Par contre, c’est sûr, j’adore ce paysage !

    Buñuel

    De retour au Chamion ; je démarre, et reprends sagement la route. Retour à Buñuel donc. En profitant de l’éclairage de la fin de journée.

    Buñuel, j’ai traversé à l’aller ; ça ne m’a pas parlé plus que ça. Je n’ai pas prévu de m’y arrêter, de visiter, ou d’y prendre mon temps. Je vais juste squatter un bout de parking. Pour autant, ça me laisse quand même l’occasion de parler de ce panneau.

    La partie rose (Buñuel ne tolère pas les agressions sexistes) on la trouve à l’entrée de chaque ville et village de Navarre. Jusqu’à présent, je n’ai pas vu une seule agglomération qui échappe à la règle. Des fois, c’est bien de rappeler certaines choses… la partie bleue nuit (Buñuel ne tolère pas les agressions LGBT-phobe) je l’ai vue moins souvent. Qu’à trois ou quatre reprises, seulement. Notamment à Pampelune (un bon point supplémentaire pour Pampelune). Mais même si ces rappels sont plus rares, ça fait aussi du bien de les voir passer…

    Et donc, j’ai garé le Chamion pour la nuit. Essayant de l’orienter du mieux possible pour ne pas qu’il tangue trop à cause du vent. J’ai fini ma journée tranquillement, selon mon habitude, les plans de la journée de demain prêts en avance.

    Castillo de Santa Margarita Gaztelua

    Je ne sais plus quand j’ai entendu parlé des Bardenas pour la première fois. C’est peut-être bien Iris, la première à avoir mentionné le nom (Iris, si tu lis ça, c’est le moment de revendiquer, je te dois un verre de kombucha ! ). Ce qui est sûr, donc, c’est que l’endroit est tout de suite arrivé très haut sur ma liste des destinations à voir rapidement. Du coup, il y a quelques temps, quand Aude m’a appris qu’elle y allait, j’ai pas du tout du tout était jaloux. Et je me suis vengé en lui envoyant des photos. Elle m’a alors suggéré d’aller à l’hôtel/ermitage Sancho Abarca. Je ne sais pas si j’aurai fait attention à l’endroit si elle ne me l’avait pas dit. Mais à partir du moment où il était mentionné et repéré, et voyant que ça me permettait de faire un itinéraire sympa de plus dans les Bardenas, je l’ai ajouté. Et c’est donc mon objectif du jour. Faire de la route de gravier, marcher un peu, rouler encore, et finir la journée là-haut. Oui, là-haut. Parce que hier, depuis la Peña del Fraile, je l’ai bien repéré l’ermitage :

    Je suis reparti. Retour jusqu’à Fustiñana, en suivant la NA126 (goudronnée) que l’on quitte bien vite, pour repartir sur du caillouti ; et revenir dans les Bardenas.

    C’est quand même très bizarre d’avoir à la fois cette terre rouge et blanche qui fait une croute épaisse, et qui a une bonne tête de truc pas fertile où l’on ne fera rien pousser, le vert (printanier par moment) de l’herbe qui a décidé que elle, elle pousserait quand même, le noir des montagnes, et le blanc de cette montagne beaucoup plus haute en arrière.

    Après une dizaine de kilomètres de piste, retour sur la grand route. NA125 ici. C’est reparti, pas longtemps, pour un peu de goudron. Avant de me garer à une intersection capitale. À gauche, chemin de terre pour aller voir des jolies montagnes à pied, à droite, chemin de terre qui conduit à l’ermitage Sancho Abarca, en voiture, et tout droit, du goudron qui nous fait entrer en Aragon.

    Je gare le Chamion, lui colle le nez (et les panneaux) plein sud, et je pars marcher. Cette fois, j’ai à peu prêt estimé la distance. Il y a un point de vue sur la plaine centrale (Bardenas Blancas, là où jouent les militaires, et où les touristes tournent en rond) à environ 7 ou 8 km à pied (donc 15 aller-retour, estimation faite à l’œil sur la seule carte que j’ai). Oui, les Bardenas se découvrent quand même mieux en vélo… mais aujourd’hui, j’ai envie de marcher un peu. Et puis franchement, ce magnifique mur, que je vais suivre un moment… et bin il est magnifique, tout simplement. La première partie de la balade se passe sans accroc, et comme d’habitude, j’use mon appareil photo.

    Je m’éloigne ensuite de ce magnifique mur, même s’il reste quand même presque tout le temps visible.

    Je marche un long moment. Plus longtemps que j’aurais pensé. Le paysage, dans le coin, est quand même un peu plus ennuyeux. Pas grand chose à voir. Pas grand chose à faire pour tuer le temps. J’avance patiemment. Les distances me paraissent plus longues que ce à quoi je m’attendais. J’ai des doutes, à quelques reprises. La (seule) carte dont je dispose (fourni par le centre d’informations) n’est pas hyper précise. Mais je fais des recoupements avec google map, qui me confirme que je suis bien sur le bon itinéraire. Même si j’ai des doutes à plusieurs reprises.

    Je commence même à m’énerver un peu, me demandant où je vais… je commence à en avoir un peu marre de marcher, et je sais que je dois encore faire demi-tour et en faire autant dans l’autre sens. Je me sens un peu comme dans ses films où on attend l’explication à la fin. Et où la fin nous permettra de décider si on a aimé ou pas ce film.

    Ok. Je retire ce que j’ai dit. Aucun regret. La vue sur les Bardenas Blancas est magnifique. Je retrouve tous les points de repère que je m’étais trouvé lors de mon excursion « basse ». La jeune fille, la base militaire (mouais…) les falaises impressionnantes au fond… je l’ai mentionné à plusieurs reprises : j’aime les boucles ; j’aime aussi pouvoir revoir des endroits que j’ai déjà vus, sous un autre angle. Ça crée une continué. Cette balade d’aujourd’hui vient créer une continuité avec les explorations de l’autre jour. Il n’y a plus de zone « floue » ; j’ai fait disparaître la « terra incognita ». J’ai une bien meilleure vue de l’ensemble désormais.

    Bon… bin il ne me reste plus qu’à rentrer maintenant…

    Le retour est long ; un peu moins long que l’aller. Je fais une mini boucle au début, avant de rejoindre mon itinéraire initial. Je marche d’un bon pas. J’arrive au Chamion beaucoup plus tard que prévu. Après vérification, j’ai marché 19 kilomètres en 5 heures.

    Il y a 19 kilomètres de route jusqu’à Sancho Abarca. De route de gravier. Je ne me sens pas d’attaquer ça maintenant. Si c’était autorisé, je dormirais bien là dans le Chamion, sans le bouger. Mais j’ai pas le droit. Alors je pousse un peu plus loin. Je suis à 6 kilomètres de Valareña. Ce soir, je dors en Aragon !

    Valareña

    Le Chamion est garé. J’ai repéré une panaderia dans le village. Ça fait un moment que je veux acheter du pain. Je veux me refaire des sandwichs. Et puis j’ai aussi un morceau de gorgonzola dans le frigo qui me fait de l’œil depuis un moment. Du coup, c’est une motivation nécessaire pour partir marcher dans le village. Malheureusement, et pour mon plus grand regret, la boulangerie est fermée. Je m’offre encore un peu de marche. Disons que si je marche 20 minutes, ça fera le kilomètre manquant, pour dire que j’ai fait mes 20 bornes aujourd’hui. Et ça me permet de faire le tour du village !

    Le village a un look très… colonial ? Par certains côté, il me fait penser à des villages que j’ai vu au Guatemala… et son plan en grille est particulièrement inhabituel. Une plaque me fait comprendre que le village est récent. Une vérification sur wikipedia me le confirme. Fondé le 8 avril 1959. Pas beaucoup de rues étroites et sinueuses dans ces moments là. Bref, un petit village sans grand intérêt et avec une boulangerie fermée.

    Un endroit où les cigognes se sentent bien, toutefois ; et où moi, je peux dormir.

     

    Un commentaire

    1. Commentaire de Patrice GEORGES

      J’aime bien te situer sur Google Map, impossible de trouver Pena del Fraile. Enfin, si j’en trouve un mais loin au nord ouest de Madrid près de Teruel. Ça m’agace! Sinon encore de belles photos même si moi ce genre de paysages ne fait pas rêver. Mais les goûts et les couleurs!…

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