Je pensai en avoir fini avec Horta. Sans forcément avoir absolument tout vu de la région et du village, je commençai à en avoir bien profité. Et avoir rayonné un peu. Peut-être était-il temps que je lève l’ancre ? C’était sans compter sur un petit point sur la carte. Alors que je vérifiai un nom pour je ne sais plus quel raison. « Les Olles ». Ça fait pas beaucoup de lettres… mais je me suis rappelé avoir vu ça sur un panneau en me rendant à l’ermitage. Du coup, par curiosité, j’ai regardé une photo. Pas besoin de plus. Juste pour se donner un petit ordre d’idée…
Je n’ai pas repris la route tout de suite. Je me suis dit que ma maison pouvait dormir encore une nuit à Horta. Et je suis parti marcher ; en suivant le même chemin que pour aller à l’ermitage, et en croisant de nouveau la Via Verda. Puis, rendu au lavoir, au lieu de tourner à droite vers l’ermitage, j’ai tourné à gauche, descendant dans la petite vallée en contrebas. Et tout en descendant, je pouvais garder un oeil sur la Via Verda, un peu plus haut, apercevant quelques petits aménagements par moment.
Et finalement, j’ai rejoint le cours de la Canaleta. Oui, découvrir que c’était la même rivière que celle que suivait l’ancienne voie de chemin de fer m’a encouragé à venir jeter un oeil. Apprendre à connaître une région, c’est aussi apprendre à connaitre ses montagnes (en les observant sous tous les angles) mais aussi ses rivières, en les longeant le plus possible.
À partir de cet endroit, donc, je suis de nouveau la rivière. Qui, plutôt que couler tranquillement dans la verte prairie, s’est installée juste à côté, sur un magnifique sol rocheux. Ce qui, d’un point de vue esthétique, présente un certains nombre d’intérêts je trouve…
Mais c’est un peu plus vers l’aval que commence « les Olles ». J’étais tenté de traduire ce mot (catalan) par « oeil » ; ou peut-être par « trous » ; j’y voyais des similitudes. Mais il semblerait que la traduction exacte soit « pot » (olla/ollas en espagnol, olla/olles en catalan, pour que tout soit simple). Les pots, en tout cas, j’y arrive. Même si je préfère l’appellation « marmite de sorcière » qui a quand même plus la classe.
Ça commence par la rivière qui disparait complètement. Ou presque.
Et oui, soudainement, la rivière un peu large et un peu tranquille, qui s’étalait nonchalamment sur le rocher, elle a décidé de changer de vocation. « Papa, maman, moi je veux être un canyon ». Et même si papa et maman essaient de lui expliquer que peut-être, ici, elle est un peu petite, qu’elle pourrait attendre plus loin (par exemple dans le coin de Fontcalda) où elle sera plus grande pour creuser un immense canyon, peu importe. Petite rivière a décidé de creuser son canyonito. Et elle s’y prend merveilleusement bien !
Je la regarde et je l’admire. Je l’encourage à creuser son canyon, tout en sachant déjà qu’elle en a fait plusieurs autres magnifiques en aval. Mais il y en aura un de plus par ici, dans quelques milliers d’années. On a l’habitude de voir changer le paysage au fil des saisons, ou même des décennies. Je crois que c’est la première fois que je regrette de ne pas pouvoir voir un paysage changer au fil des millénaires… ce n’est pas tous les jours que l’on a la chance d’assister à la naissance d’un canyon !
Le canyonito n’est pas très long (pour le moment), mais il continue sur quelques magnifiques piscines naturelles. Il parait que l’endroit est un incontournable pour les locaux à la belle saison. et je peux facilement comprendre pourquoi. Par curiosité, je me décide à enlever mes chaussures ; m’attendant à trouver l’eau bien froide. Froide, elle ne l’est pas. Glacée me parait plus approprié.
La rivière continue, en s’échappant discrètement entre deux énormes rochers. Le coin est un magnifique chaos. Je m’essaierai pendant un moment à trouver un passage pour continuer plus loin, mais sans succès. Que ce soit en essayant de passer par en dessus ou par en dessous, ça ne traverse pas de ce côté. Il me faut revenir au chemin.
De retour au chemin, donc, je décide de continuer encore un peu, pour voir la suite de la rivière. Si la partie la plus impressionnante est derrière, elle reste encore très belle. Et surtout, il y a quelques aménagements qui ont été faits pour l’irrigation que je trouve particulièrement réussi, notamment un petit canal qui traverse la rivière perpendiculairement…
Je me souviens du tracé de la Via Verda et des deux viaducs que j’ai traversés. Du coup je me dis que ça pourrait être chouette de marcher un peu plus loin sur la route, pour essayer de les voir depuis en bas. Et puis peut-être tout simplement de la rejoindre et de rentrer par là.
Ne voyant les viaducs, ni de chemin permettant un accès facile à la Via Verda, me revoilà confronté à la problématique de l’aller-retour. À quel moment dois-je décider de rebrousser chemin ; me dire que j’ai assez avancé, que j’en ai assez vu, et qu’il est temps pour moi de faire demi-tour et rentrer ? Après tout, l’idée initiale était de faire un aller-retour totalisant 12 kilomètres au total. Autant ne pas trop augmenter le total.
Et puis je suis tombé sur un panneau. Un panneau qui m’a beaucoup fait rire, et qui m’a apporté la solution. Je m’étais suffisamment éloigné de Horta… et je me trouvai donc désormais plus prêt de… Bot ! Où je n’étais pas passé depuis au moins trois jours il me semble. L’idée me plaisait. Je pouvais continuer de suivre la rivière. J’arriverai en fin d’après midi, et je n’aurai qu’à me poser pour prendre une bière en attendant que le bus de 19h15 arrive. Oui, je commence à connaître par coeur les horaires de bus de la région. Et alors ?
Je n’arrive pas à savoir ce qui m’a motivé le plus à continuer mon chemin. J’aimais l’idée de continuer à suivre la Canaleta et d’apprendre à la connaître un peu plus. J’aimais l’idée de ne pas faire un aller-retour. Mais plus que tout, je crois, j’aimais l’idée de transformer mes arrivées à Bot en comique de répétition. Y aller, juste pour la blague, était une raison parfaitement valable à elle seule !
Et oui. Tout ça pour ça. Et moi, ça me fait rire !
Petite déception, par contre, de découvrir que le Club Sportif est fermé pour vacances du 7 au 14 février (exception faite du 12 au soir, où ils seront quand même ouverts pour la diffusion du match de Barcelone, faut pas déconner non plus). Du coup, je me balade un peu dans le village, avant d’aller me poser dans un des deux bars à côté de l’église, à l’ambiance un peu moins inspirante que mon club sportif. Mais que voulez-vous…
À 19h15, le bus arrive. Le chauffeur me reconnait. Il sait que je vais à Horta. Je regrette juste de ne pas avoir eu un seul et unique chauffeur de bus pendant tous mes différents trajets. Je pense qu’il aurait eu du mal à comprendre mon itinéraire global… je commence moi même à en perdre le fil…
J’étais donc de retour à Horta, pour une nuit supplémentaire. Nuit qui m’a permi, le lendemain matin, de découvrir la vallée de la Canaleta envahit par la brume.
Puisque j’étais resté une journée de plus pour profiter de ma balade, je décidai de rester une autre journée de plus. Parce qu’aujourd’hui, nous sommes le 15 février. Et qu’à Horta de Sant Joan, le 15 février, c’est carnaval ! Dans l’après-midi, d’abord, c’est le carnaval des enfants. Les costumes sont assez classiques. Footballer, policier ou super héros pour les garçons, princesse, papillon ou pompom girl pour les filles. À noter toutefois une policière, une démone, une vache, un lézard, une star de rock et mention spécial pour la famille rubic’s cube (4 couleurs par face pour les enfants, 9 pour les parents). Les costumes du côté adulte sont un peu plus variés. Les classiques maquillages mortuaires des célébrations del dia del muertes, un bourriquet, ou la famille Simpson au grand complet. Mention spéciale pour le groupe de flamands roses venus manifester pour la sauvegarde du delta ! Tout ceci se déroulant, bien évidemment, sur la place du village sur le bord de la route pour que ce soit plus amusant.
Le défilé peut alors commencer dans les rues de la ville, mené par le « char » du défilé (un pick-up maquillé de points de couleur à l’arrière de laquelle un grand fauteuil est installé pour que le roi du carnaval encourage ses troupes) et accompagné par l’immanquable fanfare. Après une petite balade dans les rues de la ville, sous les regards enthousiastes des riverains à leur fenêtre, petite pause musicale sur la place de l’église. On danse. Et on chante. Des chansons qu’a priori, tout le monde (sauf le touriste) connait.
Le défilé reprend un court instant, le temps de revenir au point de départ. Puis tout le monde se disperse, petit à petit, et je fais de même. J’en profite pour attraper une photo d’un ciel absolument magnifique… au dessus d’un de mes paysages préférés de la région…
Le carnaval des petits est terminé, et je rentre à la maison. J’ai noté le prochain rendez-vous, mais celui-ci m’interloque. Rendez-vous à 23h30 sur la place de l’église ? Pourquoi pas…
La brume qui s’était levée dans la journée est retombée. L’air est humide quand je resors. Mais l’ambiance un peu étrange, un peu fantomatique, est parfaite pour un soir de carnaval. Je marche en prenant mon temps, pour rejoindre la place de l’église. Il y a là une dizaine de personnes qui discutent. Mais plus le temps passe, plus les gens se rassemblent. J’observe, interloqué. La majorité des gens sont en costume, mais il reste quelques anonymes comme moi. À noter un magnifique déguisement de Corona (couronne) Virus. Il faut savoir vivre dans l’air du temps !
Il est presque minuit quand la fanfare attaque la musique. Parce que oui, à Horta de Sant Joan (et dans beaucoup d’autres endroits, j’imagine) on n’a pas oublié que le but de carnaval, c’était de faire la fête. De faire du bruit. De faire du tintamarre. Et le faire la nuit, c’est encore mieux ! Musique, chant, danse, et déambulations nocturnes dans les rues. Pour être sûr que tous les voisins en profitent au maximum ! Je me laisse entraîner à la suite de cette foule joyeuse et dansante. Cet esprit festif fait du bien !
Le réveil le dimanche matin est très calme. Pour des raisons pratiques, je reste encore une dernière journée à Horta. J’ai deux trois choses à faire sur internet, et la suite de mon programme implique deux ou trois jours plutôt déconnecté de tout. Je fais donc les choses que j’ai à faire, profite de mon dimanche tranquille et ensoleillé. Appréciant la vie douce et calme de Horta une dernière fois. Que c’est agréable ; que c’est appréciable. Que je suis bien ici…
Nous sommes lundi matin. Le Chamion a un peu de mal à démarrer ; comme souvent le matin. Il n’aime pas l’humidité et le froid de la nuit. Son premier réveil de la journée est toujours un peu plus difficile. Après, une fois que tout roule, plus rien ne l’arrête. Faut juste pas le presser au réveil. Dernière petite pause technique avant de partir. Vidange des eaux grises, remplissage des eaux propres et décollage ! Une fois de plus, le mot est approprié. Ça descendait sévère pour atteindre le parking… ça remonte grave pour en sortir !
Bonjour Seb,
Bien belles photos surtout celle de la rivière. Ses passages dans le fond des rochers fait penser aux pertes de la Valesserinne près de Belgarde. Si tu ne connais pas, c’est un coin à aller voir quand tu seras de retour.
Bises.
L’Europe de l’Est est prévue aussi. Mais je finis l’Espagne d’abord. Ce qui me prendra une durée que je ne suis plsu du tout capable d’évaluer !
Wikipédia :
Oule est la francisation du nom commun occitan ola, prononcé oul(o), signifiant « marmite dépourvue d’anses », ou « chaudron », du latin olla < aulla < aul?la « marmite ». Ce terme, comme son équivalent français « marmite », est couramment utilisé dans tout le midi de la France pour désigner des trous d'eau ou des excavations de forme circulaire formés par l'érosion dans des torrents ou d'anciens cours d'eau. Par extension, il désigne les cours d'eau sur lesquels ils se trouvent, ou les villages auprès desquels où on les trouve.
Et oule lala c’est quand on se crame sur la marmitte !
Si je puis me permettre… Valesserine près de BELGARDE, c’est en France, il ne s’agit pas de BELGRADE. C’est même pas tellement loin de chez tes parents… enfin d’ici quoi…
Oooooooooh ! Aaaaaaah ! Ah bin c’est moins loin du coup.