Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionNovember 17th, 2015
  • Au début, j’ai pris le temps d’arriver, et de trouver mon rythme. De toutes façons, je ne suis pas pressé. Ensuite, il a plu. Pas mal. De toutes façons, j’ai tout mon temps. Alors j’ai déambulé un peu dans les rues de Tulum. Je suis allé au supermarché acheter un peu de nourriture, à la poste envoyer quelques lettres. J’ai un peu regardé des trucs sur mon ordi. De toutes façons, je suis tranquille. Après tout, ça ne fait que trois jours que je suis ici.

    Aujourd’hui, j’avais envie de bouger un peu. J’avais envie de jouer les touristes. En m’en venant de Mahahual, j’avais vu ce panneau, très rapidement, sur le bord de la route. « Muyil Ruinas ». C’était une vingtaine de minutes avant d’arriver à Tulum. J’ai posé quelques questions, j’ai regardé la carte… petit site archéologique. Pas trop grand. Ça me plaisait, pour commencer. Quelque chose de simple, de pas trop touristique. Et puis aujourd’hui, j’ai eu mon argent de poche.

    Je me lève à 7h45. Je me prépare un thé et j’attaque ma routine de nettoyage. Petite pause vers 9h/9h30, pour grignoter un petit quelque chose. Petite pause vers 10h30. Parce que quand même. Je finis le ménage un peu après midi. Une petite pause, pour un lunch léger, et je finalise les chambres et la lessive. À 14h, j’ai terminé. Ça veut dire que je fais deux heures supplémentaires par jour. Deux heures, à 30 pesos. Sur trois jours. J’ai gagné 180 pesos. 10 euros. Je suis un peu au dessus du salaire minimum local. 1,50 euro de l’heure. Quatre cent heures de travail pour un billet d’avion aller retour pour l’Europe. Ça permet de voir les choses autrement. J’en parlerai plus, mais une autre fois. Parce qu’aujourd’hui, je fais du tourisme.

    Je suis allé à la station de colectivo. « A que hora es el proximo colectivo per Muyil ». « Esta no colectivo per Muyil. Necessite de tomar el bus. ». Ou approximativement quelque chose du genre. Je suis de plus en plus à l’aise pour parler et pour comprendre l’espagnol. Les échanges simples se passent de plus en plus facilement. Ne me reste plus qu’à étendre mon vocabulaire. Et c’est là que ça deviendra amusant…

    Je suis allé à la station de bus. J’ai acheté mon ticket. J’ai pris le bus qui partait 10 minutes plus tard. Et un peu après, j’étais à l’entrée de Muyil. Le nom provient d’un lagon, situé à la limite du site. La région fait partie de la « Slan Ka’an Biosphere Reserve », toute une zone écologique protégée sur laquelle il faudra que je me renseigne un peu plus. Dans la zone, on trouve 22 villages datant d’avant la colonisation hispanique. Muyil était le plus grand.

    Le site est divisé en deux secteurs. Seul l’un des deux – qui s’étend quand même sur 38 hectares – est ouvert au public. Les mayas se sont probablement installés ici vers -300, et sont restés jusqu’au début du 16e siècle, quand Francisco Montero a conquis le Yucatan.

    Plaza de entrada

    Comme son nom l’indique, cette place se trouve à l’entrée du village. Elle était entourée de dix structures pyramidales, sur lesquelles étaient construits des temples. C’est ici que la population était rassemblée, sur ordre des dirigeants, lors des événements importants (civils comme religieux).

    Trois pyramides fermaient la partie nord. La partie sud était composée de plateforme sur lesquelles étaient construites des maisons. Entièrement en bois. Il n’en reste évidemment rien.

    Structure 8 I-13 : Castillo

    En continuant, on arrive au « château ». Le site est agréable. Très calme. Il n’y a presque personne. Je compterais une douzaine de touristes, au total. Et surtout, contrairement à Teotihuacan, les lieux sont loin d’être « déjunglé ». Les bâtiments principaux sont nettoyés, mais il reste encore beaucoup d’arbres. C’est d’ailleurs assez intéressant de voir les anciens bâtiments, devenus tas de terre, devenus « pot de fleurs ». Les arbres poussent partout. Du coup, on devine le site petit à petit. On voit la ruine, là bas, entre les arbres. Elle se dévoile lentement. Comme un paysage lors d’une rando en montagne. J’aime ce strip tease paysager.

    Et petit à petit, donc, el Castillo se dévoile. Du haut de ses (modestes) 17 mètres, il est la structure la plus haute de la région. D’après les archéologues, il a été construit en deux temps. Dans un premier temps, il y avait un temple, posé sur une base à trois étages. Par la suite, deux étages ont été rajouté. On voit toujours l’ancien autel (avec les deux sculptures de héron), au troisième niveau, et le nouveau temple, au sommet.

     

    Structura 9 K-1 : Palacio Rosa

    Le palais rose, ou encore le temple numéro 8, était au centre de la vie religieuse de Muyil. Il a été construit entre 1250 et 1550, à l’époque où le village était le plus dynamique.

    Lui aussi est très tranquille, au milieu de ses arbres, recouvert de mousse. Il est beau dans sa sérénité. Il a été actif, autrefois. Aujourd’hui, il ne fait plus que contempler. Elle chante un peu pour lui. Pas très longtemps. Nous sommes dans la jungle, après tout. C’est humide. Et oui, il y a des moustiques. Ils aiment la musique. Quand je m’arrête pour jouer, ils viennent me voir. À moins que ce soit l’immobilité…

    Autour du temple, quelques autres « bases » en ruine. Il ne reste pas grand chose. Mais c’est surtout ces pierres couvertes de mousse qui m’attirent… et les quatre arbres magnifiques, qui ont poussé au coin des murs.

     

    Perdu dans la jungle 

    Le tour du site se fait assez rapidement. Il n’y a, en effet, que ces trois « sites » à voir. Je n’en demandais pas plus. J’étais là pour voir, pour visiter, pour regarder. Pour me détendre. Pour me faire briller un peu les yeux. Ça fait toujours du bien, une fois de temps en temps.

    Les trois « sites » sont reliés par des chemins bien aménagés. Souvent en cailloux (plutôt doux avec les pieds – bin ouais…) ou en terre/boue. Les parties encore sous la jungle sont elles aussi magnifiques. Les arbres sont de toute beauté. Et les pierres que l’on trouve sont des plus inspirantes !

     

    Muyil Laguna 

    Je me suis retrouvé à l’entrée du site. J’ai jeté un dernier coup d’oeil à la carte des lieux. Me faisant réaliser que j’ai oublié de partir explorer le petit chemin qui part derrière le château ! Je ne suis pas pressé, je décide donc d’y retourner, pour voir. Petite promenade agréable sous les bois, qui m’amène devant une palissade. À ma gauche, une carte. À ma droite, une guérite pour payer. Je jette un oeil. A priori, il s’agit d’une petite promenade dans les bois, pour aller jusqu’à la lagune. J’échange quelques mots avec le gardien, qui me dit que c’est vraiment très beau, et que ça vaut la peine. C’est un peu cher (50 pesos, alors que l’entrée au site était de 39 pesos). Mais aujourd’hui, c’était jour de paie, alors je décide de flamber un peu, et je m’offre la visite de la lagune.

    Et je ne regrette absolument pas !

    Magnifique promenade aménagée, au dessus de l’eau, en dessous des arbres. C’est de toute beauté et, à ma grande surprise, il n’y a pas l’ombre d’un moustique. J’admire, je profite du calme, je regarde… l’eau est de toute beauté. Il y a quelques « ouvertures ». Un peu comme les sources en Floride. Ou au Texas. Mais en beaucoup plus petit. Elle chante encore.

    Je finis par arriver à une tour d’observation. Un panneau m’indique que l’ascension se fait à mes risques et périls. Même pas peur. Elle est jolie cette tour. Elle me fait envie. Elle a l’air solide. Certes, c’est un peu raide. Mais au moins, ça permet d’arriver en haut plus vite. Et la vue en vaut vraiment la peine ! Ce n’est pas le genre de paysage que j’ai l’habitude de voir d’en haut ! La jungle, c’est encore nouveau pour moi. Et c’est chouette à découvrir !

    Je finis par arriver à la lagune. Elle est assez jolie, certes. Mais j’ai trouvé le temple magnifique, la balade dans la jungle de toute beauté… du coup, elle arrive un peu à plat, et peut être que je ne lui donne pas toute l’admiration qu’elle mériterait de recevoir. Oui, elle me plait, mais voilà…

    De là part un chemin qui revient jusqu’à la route principale. Je le suis donc, marchant tranquillement. Regardant les arbres, les cailloux. Ils sont bizarres ces cailloux quand même. Il est joli ce promontoire rocheux. Mais il a un truc. Il me faut un moment pour comprendre. Il n’est absolument pas naturel. Je suis un muret… là, un petit escalier. Là, un bel angle droit. Là, des sculptures ? oui, absolument… toute cette zone n’a pas été nettoyée. Elle est juste simplement abandonnée, là, dans la nature. Et ça, c’est tout simplement magique ! Ce ne sont que quelques structures simples, que des centaines de personnes ont déjà vues, mais que j’ai découvert par hasard, juste en tournant les yeux. Je n’ose imaginer ce qu’un explorateur pouvait ressentir en tombant sur un temple, au milieu de la jungle… j’ai hâte d’aller à Tikal pour ça. Mais Tikal attendra un moment encore !

    Je me suis retrouvé sur le bord de la route, à l’arrêt de bus. Parfait. A priori, il y a un bus par heure. À quel moment ? Aucune idée. Deux options. Je peux m’asseoir sur le banc, et attendre bêtement ou…

    Je m’installe sur le bord de la route, avec mon plus beau sourire. Le pouce en l’air. Je suis dans la région la plus tranquille du Mexique. Sur l’une des routes les plus sécuritaires. Dans la région, le pire qu’il puisse m’arriver, c’est qu’on me pique mes chaussures. Pas de soucis à me faire à ce niveau là. Je trouve que c’est une chouette opportunité de m’essayer au stop mexicain…

    Il y a un peu de trafic. Les voitures passent. Se suivent et ne s’arrêtent pas. J’attends sagement, patiemment. Ma première expérience de stop au Mexique aura duré vingt minutes environ. Après vingt minutes, le bus est arrivé. Ne voyant pas l’intérêt d’insister plus, j’ai rangé mon pouce, fait un signe au chauffeur, et réglé les 25 pesos du billet retour. Y-a-t-il une raison pour laquelle le billet retour était 1 pesos de moins qu’à l’aller ? Pas la moindre idée !

    pano_muyil

    3 commentaires

    1. Commentaire de La Feuille

      Belle chronique, belle série de photos. La lumière est très particulière… Quant à la forêt, on pourrait parfois se croire en Inde du Sud, surtout si l’on n’est pas un botaniste très compétent. Au tarif des heures supplémentaires, va en falloir des coups de serpillère pour remplacer les chaussures ! Je pense quand même que celles-ci peuvent être utiles quand on se balade en forêt ou qu’on escalade des constructions en bois avec de possibles clous rouillés (j’en connais un rayon à ce sujet).
      Quand je pense que si on t’avait fait lever à 7h45 pour aller bosser cet été, on aurait été déférés devant la cour pénale internationale… Ouaf, ouaf !

    2. Commentaire de Sébastien Chion

      Certains prétendent qu’une semelle n’empêche pas de se percer le pied à coup de clous rouillés. Et d’autres prétendent qu’on peut passer l’été à bosser pieds nus sur un chantier, et se brûler la main à la cire. Alors bon, j’imagine que tout est possible ! Mais voilà, le problème des chaussures et temporairement réglé !

    3. Commentaire de Kaly

      Moi aussi j’aime beaucoup les photos, et la découverte inattendue en pleine jungle, et même si tu n’es pas le premier – tant pis !
      J’ai toujours rêvé de visiter ces régions, mais jusqu’à présent je n’ai pas encore joint le geste à la parole !

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