Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionJuly 16th, 2021
  • Quand j’ai coupé le contact du Chamion, sur les bords du lac Lavaux il y a six mois de ça (comment ça six semaines ? vous êtes sûrs ?) mes plans étaient clairs. Enfin… aussi clairs que mes plans habituels. Arriver en Espagne, fin mai (j’avais à peine 10 jours de retard) et me balader par là-bas. J’avais rapidement enregistré que le lac Lavaux, c’était le début de la fleuve Charente mais sans y prêter plus attention que ça. Voilà. Une fleuve parmi tant d’autres.

    Six mois plus tard (six semaines, vraiment, vous persistez ?), à Port-des-Barques, à l’embouchure de cette même Charente, je me sens vide. C’est un vide habituel. C’est le vide de la transition. Plus ici, pas encore là bas. On commence à bien se connaître lui et moi. Après, c’est vrai que ça fait un moment qu’on ne s’était pas croisé…

    J’aime bien les symboles ; parfois ils peuvent être efficaces pour faire passer des sentiments, des idées, des envies… la Charente a involontairement accompagné mon voyage depuis quelques semaines. J’aimais l’idée de lui dire au revoir comme il faut. En prenant mon temps. Une semaine pour faire Angoulême – L’Île Madame… certes, je n’ai pas fait toute la Charente ; j’en ai quand même fait un joli bout.

    Le projet de remonter complètement un fleuve m’accompagne depuis un moment maintenant. Depuis que je suis tombé amoureux de la Vilaine (en Bretagne) qui est loin de l’être. Son parcours me plait. Et depuis un moment, je me dis que je vais prendre mes petites jambes, mon sac, ma tente, partir de la source et la suivre jusqu’à l’océan. J’ai désormais la même envie avec la Charente. Même si je l’ai faite en Chamion, j’ai bien envie de la faire à pied. D’autant que pour ce que j’en ai vu, une grande partie des berges sont aménagées pour les marcheurs. Même dans les villes et les villages, une bande est réservée (il parait, d’ailleurs, que c’est dans la loi : vous avez le droit d’accéder à une bande de 3m le long d’un cour d’eau).

     

    Saint Simeux

    J’ai commencé à Saint Simeux. Une étape de moins de 20 km depuis Vaux-Rouillac. Mais il fallait que je le fasse ; il fallait que je réussisse à décoller alors que je ne voulais pas partir. J’étais bien au près de Julie et Damien. J’étais bien avec Philéas, Énée, Tia et Hélios. J’étais bien avec elleux et je n’avais pas envie de leur dire au-revoir. Plus on s’attarde, plus c’est difficile… j’ai dû m’attarder vraiment beaucoup (deux mois sans doute ?).

    Je me suis garé sur une petite aire de repos, et je suis parti marcher. Essayant de me vider un peu la tête…

    Après le tour du village, une deuxième balade tranquille, vers l’aval. J’ai vraiment besoin de marcher.

    Occasion de découvrir un concept que je ne connaissais pas : les galets voyageurs ! J’ai trouvé ce magnifique galet qui attendait sagement dans un environnement tout auant magnifique… après un (tout petit mini) peu de recherches, il semblerait que l’idée soit de ramasser le galet, et de le faire voyager un peu avec nous. Du coup, je suis désolé Eileen, ton galet n’aura pas voyager cette fois-ci ; dommage un peu, parce que j’aurai pu le déposer à tellement de place ! Je me rattraperai sur le prochain galet coloré qui croisera mon chemin.

    Sérieusement… on dit souvent du mal des réseaux sociaux… mais moi je trouve que le simple principe des livres et des galets voyageurs justifient leur existence !

    Damien m’avait prévenu « la Charente est le plus beau fleuve de France ». Forcément, la beauté c’est bien suggestif… et puis les fleuves et les rivières belles en France, ça ne manquent pas ! Mais quand même, c’est assez superbement magnifique et joli. Il m’a aussi dit « la Charente est le fleuve le plus pollué de France ». Ça, malheureusement, c’est moins subjectif. Et avec toutes les vignes du Cognac partout autour, pas vraiment surprenant…

    Pas de soirée jeux, pas de discussion, juste un tête à tête avec moi-même. Des fois j’ai l’impression qu’il est immense mon Chamion…

    J’avais repéré une petite balade sympa au départ de où j’étais. Une dizaine de kilomètres, en remontant la rivière d’abord, puis en revenant par les terres. Dix kilomètres, plutôt sur du plat, ça me plait bien. Faut dire que ça fait au moins deux mois que je ne marche plus, et que j’ai été particulièrement bien nourri (c’est pas vrai que je me réveille au milieu de la nuit en rêvant de gigot !). Du coup, oui, marcher ça fait du bien. La balade se passe bien. Elle n’est pas vraiment indiquée, mais tant qu’il s’agit de suivre la fleuve, c’est facile. Bon, par contre je fais le retour un peu en freestyle ; mais je finis par me retrouver à mon point de départ !

    Je resterai une deuxième nuit au même endroit. C’est bien de reprendre la route, mais on va pas non plus se précipiter, faut pas exagérer ! Le soir, le bar de l’autre côté de l’eau donne un concert. La musique est moyenne, mais de toutes façons, quitte à la subir, autant le faire une bière à la main. Et la bière, elle, est bonne.

    Vibrac

    Je me décide quand même à décoller le lendemain. Faut dire que j’ai recommencé à rythmer mon voyage à coup de rendez-vous ; du coup, il faut bien avancer un peu. En commençant par un petit retour sur mes pas. Je ne suis pas loin d’Angoulême ; j’ai repéré un Darty. Je fais quelque chose que je voulais faire depuis bien longtemps. Je m’achète un vrai, bon, casque audio de qualité. Du genre que tu apprécies la musique que tu écoutes dedans. En fait, mon projet à un peu plus long terme, serait de faire une installation son complète pour une immersion parfaite dans le Chamion. Je suis sûr que le volume s’y prête bien. Mais pour le moment, les travaux/modifications/changements du Chamion sont mis en pause pour durée inconnue et indéterminée.

    Le détour par Angoulême fait que j’ai quand même roulé un peu quand je m’arrête à Vibrac, à moins de 10 kilomètres de mon point de départ. La Charente a quelques jolis bras dans le coin, et j’ai bien envie de jeter un oeil. Petite balade rapide dans le coin donc.

    Juac

    Retour dans le Chamion. Dans le coin, je sais pas ce qu’ils ont, mais la moitié des routes sont barrées ; on se retrouve à faire des détours un peu dans tous les sens. Je suis obligé de rouler au moins 5 ou 6 kilomètres au lieu des 4 initialement prévus pour avancer jusqu’à Juac, où je pose à nouveau le Chamion, pour une nouvelle balade sur le bord de la Charente. En marchant tranquillement, je peux me rendre jusqu’à un peu après Bassac, le village suivant. Le chemin ne suit pas autant la fleuve que j’aurais aimé, mais c’est pas grave. Je profite quand même bien de la balade. Et d’une des nombreuses écluses que je croise régulièrement le long de la Charente.

    Mes pas me ramènent à Bassac ; j’ai dans l’idée de rentrer directement au Chamion en suivant la route, mais je découvre un village particulièrement joli à visiter. L’abbaye a un certains charme mais c’est surtout la petite rivière qui traverse le village qui m’inspire le plus !

    Je me posais la question de dormir là où j’ai laissé le Chamion… mais en même temps, l’endroit ne vend vraiment pas du rêve. J’avance donc jusqu’à l’étape suivante.

    Jarnac

    Je dois bien reconnaître que visiter le village de naissance de François Mitterrand me laisse quand même plutôt indifférent. Mais ça avait l’air joli. C’était sur ma route. Et j’avais repéré un endroit sympa pour dormir sur le bord de l’eau. Je décale de quelques mètres mon parking initialement prévu parce qu’une madame m’explique que je ne peux pas me garer là, parce que sinon elle verra mon camion plutôt que la rivière. Ah mais il est très beau mon Chamion madame ! Mais comme je suis gentil, je me gare 10 mètres avant. Et je peux commencer ma journée du lendemain par une visite de la ville. Qui, je dois dire, est plus jolie que ce à quoi je m’attendais. Un peu moribonde pour un dimanche matin, mais on peut pas trop trop lui en vouloir je pense…

    Cognac

    Ce soir, je dors à Saintes. Parce que demain, j’ai ma première injection de 5G. J’étais persuadé que j’allais avoir des milliers d’heures de conduite à gérer, vu comment je me suis trainé jusque là, mais en réalité, je me fais une image complètement fausse des distances dans le coin ! J’ai donc clairement le temps d’aller visiter Cognac. Parce que bon, j’ai pas assez vu de caves à Jarnac. Et puis là c’est la vraie ville avec le vrai nom. Donc go ! Une autre ville que je pourrai dire que j’ai vue ; une autre ville qui a quand même un peu de charme, et à qui on ne peut quand même pas trop reprocher d’être moribonde un dimanche après midi…

    Saintes

    J’ai même pris les petites routes détournées pour prendre mon temps, mais en effet, les distances sont vraiment toutes petites. Du coup j’arrive à Saintes très peu de temps après avoir quitté Cognac. Je m’installe sur le magnifique grand parking préalablement repéré (qui a ce côté pratique d’être à 51 mètres du centre de vaccination) et je coupe le contact. Il est encore tôt ; décidément, les journées ne se terminent jamais en fait !

    Je décide d’aller faire un petit tour en ville. Rapide excursion dans le centre un peu plus historique. Ça a un peu de charme ; mais je vais pas reprocher à la ville d’être moribonde un dimanche soir… en même temps, comme tous les magasins annoncent être aussi fermés le lundi, ça ne change pas grand chose que je visite maintenant. Le lendemain, je pourrai digérer tranquillement mes effets secondaires en me transformant en grenouille dans mon Chamion, espérant désespérément avoir une luciole qui passe à ma portée pour la manger !

    J’ai prévenu l’infirmière. Je suis stressé. Pas par le virus ni par le vaccin, mais par la piqure. Je déteste les piqures. Comme je n’ai absolument rien senti, et que je n’ai pas eu le moindre effet secondaire après (même pas de coup de fatigue) je me dis qu’elle a peut être eu pitié de moi et qu’en vrai elle a juste fait semblant de faire une injection. Après, ma dernière piqûre avant celle là, je l’avais pas senti non plus. Alors que c’était une piqure de dentiste. Bon, faut dire que ma dentiste ressemblait à Lucy Liu, et que j’étais en hyper ventilation (à cause du stress de la piqure, bien sûr !).

    Je reste quand même un petit moment dans le Chamion à profiter de la pluie pour ne rien faire. Et puis comme j’ai été un grand garçon et que je n’ai pas pleuré, je vais chercher ma récompense au kiosque à pizzas d’à côté pour le repas de midi.

    Et je reprends la route. Je voulais suivre la Charente par la rive droite ; meilleur feeling. Mais quand j’ai enfin réussi à sortir du bordel de screugneugneu de mélimélo de routes mal indiquées du centre-ville, je suis arrivé sur un nouveau panneau route barrée… j’ai donc fait demi-tour, j’ai refait le mélimélo dans l’autre sens, et je suis reparti. Rive gauche.

    Pont d’Envaux

    Je finis par arriver à l’objectif que je m’étais fixé. Simplement par une autre route. Donc c’est quand même pas trop trop grave la vie, y a des choses pires qui pourraient se passer.

    À Pont d’Envaux (ou plutôt, il me semble, dans le village d’à côté, mais c’est contagieux) il y a un festival d’épouvantails. Les gens installent des épouvantails un peu partout. Et c’est sympa ; ça rajoute une dimension ludique à la visite de la ville. Moi j’aime bien. Petit village de caractère, très joli. Avec une fleuve parfaitement accessible, dont on peut profiter au maximum et ça c’est chouette !

    Et comme ce matin j’ai été très sage et que je n’ai pas pleuré, en récompense, j’ai le droit à une glace et à une petite bière !

    Saint Savinien

    La journée démarre vraiment pas vite le lendemain. Beaucoup de choses à gérer… la météo est grise, pluvieuse, ça me donne pas non plus beaucoup de dynamisme. J’arrive quand même à m’émouvoir jusqu’au parking du Super U de Saint Savinien histoire de faire un mini ravitaillement. Paraît y a des trucs à célébrer demain (des révolutionnaires aux seins nus qui démontent des prisons) et que du coup les magasins seront sans doute fermés. Puis du parking du super U je m’émouvois une deuxième fois, direction les quais de la Charente. Ici les camping-car sont bien reçus. C’est chouette ! La journée a été très chargée même si je n’ai pas joué aux touristes ; je me réserve la visite du village pour le lendemain.

    « C’est vrai qu’ils sont plaisants, tous ces petits villages, Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cités. Avec leurs châteaux forts, leurs églises, leurs plages… »

    Sur la fin de ma balade, je me rapproche d’un endroit où il y a des gens. Beaucoup de gens. Je sais très bien pourquoi ils sont rassemblés ici. Je sais très bien qu’ils sont ici pour remercier cette dame aux seins nus d’avoir guidé le peuple et lui avoir expliqué comment démonter une prison (c’est peut être pour ça que maintenant y en a ils ont peur que les femmes elles se mettent au bricolage ? ils veulent pas que les femmes démontent les prisons sociétales qu’on leur a construit ?). En ce moment, j’ai quand même un peu envie de rencontrer, d’échanger, de discuter.

    Mais y a un moment, faut pas déconner non plus. J’ai jamais été fan des célébrations du 14 juillet depuis que je comprends ce que ça représente. Et aujourd’hui, moins encore que d’habitude, j’ai envie d’être là.

    À la place, je regarde le feu d’artifice par la fenêtre du Chamion, en cachette sans que personne ne sache ! (du coup, merci de ne pas répéter !)

    L’Île Madame

    Tout au bout de la Charente, dans son estuaire, il y a l’Île Madame. La plus petite île de la Charente Maritime. On peut y accéder à pied. Quand la marée est basse. Du coup, faut bien se timer. Être bon nageur. Ou espérer que la nuit sera pas trop fraiche.

    Bon, c’est vrai, avant d’y arriver, j’ai refait une petite escale par Rochefort. Parce que déjà, c’était sur ma route. Ensuite, j’avais pas eu le temps de voir une partie de la ville qui me tentait bien (les bâtiments et les quais côté corderie royale). Et puis je voulais passer par le gros pont au dessus de la Charente (en vérifiant quand même la vitesse du vent avant pour être sûr ; le Chamion commence à collectionner les jolis ponts, il les grimpe fièrement, les uns après les autres).

    Et donc, l’Île Madame. Suite à une habile organisation et planification (j’ai regardé les heures des marées avant de venir) je me suis présenté devant la Passe aux Boeufs à une heure où il était possible de traverser. Et j’avais trois heures pour faire le tour et revenir. Large !

    Elle est jolie cette île moi je trouve ; je me suis habitué à ces cabanes de pêcheurs qu’on trouve un peu partout sur la côte océane. Et c’est vrai que je les aime bien. Elles ont un certains charme. Agréable. La balade se fait pas mal au soleil, mais celui-ci a la gentillesse de ne pas être trop violent en fin de journée. Tant mieux.

    Et sinon, les spécialistes vous le diront, dans l’estuaire de la Charente, on trouve un autre truc bien connu :

    Ok, il est vachement loin en fait, et avec le 200mm j’arrive pas à le rapprocher suffisamment. Mais il a une forme assez caractéristique pour être reconnu quand même, n’est-ce pas ?

    La marée n’est pas revenue pendant ma balade. Par contre, un marché d’artisan est apparu. Et ça c’est chouette. Je fais un mini tour rapide. Avant de me poser un peu à ma maison. Puis de revenir voir le march…. oh ! wah ! ok, faire un détour pour admirer le coucher de soleil.

    C’est quand même une belle façon de dire au revoir à la Charente, non ? Un petit soleil dans le lointain. D’ailleurs, j’en profite pour lui raconter une histoire, à mon petit soleil. J’aime lui raconter des histoires !

    Et pour compléter mes aux-revoir, je rajoute un sorbet. Parce que c’est bon, les sorbets fraise et pineau !

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