Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionApril 3rd, 2022
  • J’ai passé beaucoup de temps à regarder les cartes. À réfléchir. À me demander où aller. Par quoi continuer. Il y avait encore ces deux randonnées que je voulais faire absolument : le pico Gratal et le Tozal de Guara. Les deux peuvent se gravir aussi bien par la face nord que par la face sud ; mais dans les deux cas, la face nord est généralement empruntée, vu que le point de départ permet d’économiser 200m de dénivelé. C’est pas rien. Pour le Gratal, il me fallait simplement retourner à Arguis. Pour le Guara, c’était un peu plus compliqué. Un peu plus loin. Et, la dernière fois que je l’avais entraperçu, il avait quand même blanchi du nord… j’ai regardé aussi ma carte de mes balades déjà faites dans la Sierra de Loarre. J’ai regardé, surtout, ce que je ne connais pas encore. Quels points je pourrais encore relier. Et c’est ainsi que j’ai décidé de laisser une deuxième chance à Bolea.

    Bolea

    Bolea, j’y avais passé une nuit, après avoir dû quitter le Salto de Roldan et avoir fait une très chouette et courte randonnée dans les gorges de San Julian. Il faisait gris, un peu plus vieux, plutôt venteux. J’étais maussade ; le village n’avait même pas eu sa chance. j’étais reparti ensuite à Huesca, faire la lessive, avant de continuer sur le château de Loarre, sans m’arrêter. Ce n’était pas le point de départ le plus idéal pour le Gratal ; mais je savais que je trouverai une aire de camping car pour me poser plusieurs jours sans problème. Et que de là, je pourrais faire plusieurs balades plutôt qu’une seule. J’aurais juste à marcher un peu plus longtemps. Conduire moins pour marcher plus. C’est une autre approche de slogan…

    La route n’a pas été rapide. Parce que le Chamion, avec un vent de face à 50 km/h, il peine quand même un peu ! Mais j’ai fini par arriver, et à m’installer confortablement dans l’idée de rester plusieurs jours. Et, comme l’après midi n’était pas fini, et que le vent commençait à retomber un peu, je suis allé faire un tour rapide du village. Les lieux, après tout, m’inspirant beaucoup plus avec le ciel bleu.

    Bon, clairement, ce que je préfère à Bolea, c’est la vue sur les montagnes et le Gratal qui reste un de mes sommets préférés du coin.

    (on retrouve la silhouette très lointaine du château de Marcuello, dominé par la peña del Sol, le château de Loarre, avec le Puchilibro au dessus de lui, les falaises où se cachent l’ermitage de la vierge de Anies -on peut même voir l’ermitage avec un bon zoom !- des sommets que je ne connais pas et des belles promesses de randonnées)

    La vue sur la plaine, de l’autre côté, offre un contraste assez saisissant. Parce que oui, de ce côté là, c’est quand même bien plat (mais bien irrigué et très vert) !

    Dans l’ensemble, dans la région, je continue de trouver les paysages et les randonnées plus inspirantes que les rues et les villages.

    Je rentre me poser au Chamion, finir la soirée tranquillement, préparer la balade du lendemain, et admirer la lune.

    L’ermitage de Santa Quiteria

    L’idée, c’est de partir sur une petite balade tranquille, histoire de m’assurer que je sais toujours marcher après mes 4 ou 5 jours de pause. Vérifier que les jambes vont bien, tout ça tout ça. Il y a une chouette petite vallée qui va vers la montagne. Parait même qu’il y a (oh surprise ! ) un ermitage. Après l’ermitage, on peut monter, et faire une boucle… en retournant voir l’ermitage d’Anies. Voilà. Donc. Balade simple ; pour relier des points pas encore reliés. Chouette programme !

    Et ça démarre tranquillement. J’arrive sur un premier ermitage, qui n’était même pas annoncé. L’ermitage de Santa Quiteria. Le genre d’endroits assez sympa si vous aimez partir vivre en ermite avec quelques amis. Pour la petite anecdote, suite aux photos de nuit de la veille, mon appareil photo est restée en mode « photo de nuit » pendant quelques temps, avant que je m’en balade. Mais, oh comme la vie est bien faite (et que des fois c’est bien que je prenne du retard sur le blog) je suis repassé par l’ermitage deux jours plus tard, dans une balade « détente de jambes ». Du coup, je peux quand même vous le montrer ! (pour les trois premières, j’ai simplement triché beaucoup dans photoshop, pour montrer la jolie vallée vers où c’est que je m’en vais)

    Après l’ermitage, le chemin devient plutôt agréable, en mode piste de randonnée, et je commence à m’enfoncer dans la vallée. Non sans admirer les magnifiques formations rocheuses du coin. Le fond de la vallée semble prometteur aussi. On est dimanche, il fait soleil, c’est chouette !

    L’ermitage San Cristobal

    J’avance d’un bon pas. Le sentier est confortable. La pente agréable. Et mes yeux se régalent. En approchant du fond de la vallée, je n’apprécie que plus la falaise qui apparait. Toute trouée, dans tous les sens. Encore un ermite qui a bien choisi son coin ! Je ne me précipite pas tout de suite vers la falaise. Je fais d’abord un peu de hors piste, pour descendre sur le bord de l’eau ; parce que là aussi, c’est quand même super beau ! La température a chuté ces derniers jours (-3 cette nuit, ressenti -10 avec le vent) et il reste même quelques traces de glace dans le coin.

    Je retourne sur le sentier, et me retrouve au pied des falaises. Celles-ci me fascinent. Et notamment la tour, sur le côté. Quand je serai grand, je veux un château tout pareil, avec une tour de princesse qui déborde sur le côté !

    C’est en faisant des photos plus détaillées de la falaise et de cette tour que je réalise enfin où se trouve l’ermitage. On m’avait pas dit. On m’avait pas prévenu… et pourtant… oui oui, il est bien là, dans la falaise. Bien caché, il est vrai. Suffisamment bien pour que je l’ai pris en photo plusieurs fois (depuis le ruisseau) sans même m’en rendre compte (toi aussi, lecteur pas attentif, tu peux retourner voir la galerie précédente si tu veux) !

    J’avais prévu de grimper dans tous les cas, mais ça n’est qu’une motivation supplémentaire à aller voir de plus près. L’endroit est absolument magnifique… un seul problème : on est dimanche. Et un groupe (une famille ?) d’espagnols se baladent dans le coin. Ils doivent être une dizaine, avançant à des rythmes différents, et communiquent les uns les autres en hurlant. C’est raté pour la tranquillité du coin, et c’est bien dommage. Je finis par comprendre ce qui se passe. Les plus rapides sont arrivés en bas en ratant l’accès à l’ermitage. Les moyens rapides appellent donc les plus rapides pour leur dire de monter, et les moins rapides pour leur dire de ne pas manquer le carrefour. Enfin, au moins, comme tout le monde s’attend en criant, j’arrive le premier dans l’ermitage, et je peux en profiter, pour moi tout seul, pendant quelques minutes. L’endroit est clairement inspirant !

    Enfin surtout la vue, on est bien d’accord !

    Le groupe/famille finit par envahir les lieux, et je me lance donc dans la fuite et la suite de l’ascension. La bonne nouvelle, c’est que eux descendaient, donc j’en suis débarrassé assez vite. Ça grimpe raide, mais sous les arbres, c’est super agréable… et surtout, d’un seul coup, la vue se dégage. Je me retrouve dans un cirque magnifique et, juste en face de moi, ma tour de princesse ! J’observe, je regarde, j’analyse. Bien sûr que l’on peut y accéder ! Bon, peut être pas à la tour en elle même, mais au moins à la première bosse !

    Je ne chercherai en effet pas à accéder au deuxième monticule ; le premier me suffit largement. Moi, à partir du moment où je peux faire un panoramique à 360, je m’estime satisfait de toutes façons !

    Donc à gauche, la vallée d’où j’arrive, au milieu un cirque magnifique (la grande coulée plus claire est à la verticale de la suite du sentier que l’on devine partir vers la falaise suivante) la forêt par laquelle je suis montée. Et toute à droite (et tout à gauche) le sommet de ma tour de princesse où mon prince, un jour, viendra. C’est bien ça, non ?

    Et moi, je repars à marcher avec un immense sourire. Il faut dire que je m’attendais pas du tout à ça. Ni à l’ermitage dans la falaise, ni même aux falaises. Après tout, du début de la vallée, on ne devine rien du fond… et qu’il est agréable d’être surpris par des paysages aussi majestueux !

    Je finis la grimpette qui doit me faire rejoindre la « route principale ». Non sans faire quelques détours pour profiter au maximum du lieu.

    La « route principale » c’est l’un des nombreux chemins forestiers du coin. Arpentable avec un bon 4×4 pour l’entretien, mais aussi signalisé pour les vélos. Et les piétons, donc.

    L’ermitage de la virgen de Anies

    Je reprends la route, tranquillement. Profitant de ce petit moment de calme après la grimpette. Et admirant le Chamion, de loin :

    De moins loin :

    D’encore moins loin :

    Mais jamais de super très très proche quand même :

    Et finalement, au détour d’un virage, la falaise apparaît. Mais pas que… toute la partie ouest de la Sierra de Loarre est là. Toujours les mêmes, que je commence, il est vrai, à bien connaître désormais.

    Et vous aussi, n’est-ce pas ? Plus la peine de les présenter rendu là !

    Une fois de plus, je suis impressionné par l’emplacement de cet ermitage. Impossible de ne pas faire le liens avec les météores, en Grèce. Et alors que je m’en rapproche, je me dis qu’une fois de plus, j’ai sans le faire exprès, fait les choses dans le bon sens : en découvrant l’ermitage en arrivant depuis Loarre, il est apparu d’un seul coup. Je suis tombé dessus. Bon, pas complètement littéralement ; et heureusement. Et là, maintenant, je le redécouvre en sachant à quoi m’attendre. Accroché à sa falaise, caché dans ses rochers. Je l’approche, petit à petit. Repère le sentier pour y aller. Les marches qui vont me permettre de l’atteindre. La grimpette, qui m’attend… Et qu’elle est belle cette grimpette ! Et qu’il est beau, encore et toujours, ce château, dans le lointain !

    Je reste un long moment à regarder le paysage. Les grimpeurs. Et les zozios qui pioupioutent dans le ciel… je suis bien. J’ai connecté un point que je connaissais déjà à d’autres que je ne connaissais pas encore. J’ai marché, sans discontinue, de Aguero à Loarre.

    Tiens, parlant de ça… il me reste encore à y rentrer, à Loarre. Je commence donc par redescendre jusqu’à Anies, le village au pied de l’ermitage.

    Le village ne m’interpelle pas le moins du monde, et je fais juste le traverser sans faire de détour. À la sortie, je retrouve les panneaux signalant le Camino Natural. Celui-ci va de Loarre à Bolea en passant par Anies, délaissant les ermitages de Viergen de Anies et de San Cristobal. Mais pourquoi ? Là, j’avoue, je ne comprends pas… c’est tellement plus beau en passant par le chemin que je viens de faire que par le chemin qui m’attend pour le retour :

    (sur l’avant dernière photo, le vallon innocent qui cache les falaises et l’ermitage de San Cristobal…)

    Je suis de retour au Chamion, bien content. Comme prévu, cette « petite marche » m’a permis de m’assurer que tout allait bien. Une petite promenade de 19 km (800m de dénivelé) histoire d’être en forme pour la vraie balade sérieuse du lendemain.

    Le premier gros tas de gribouillis, c’est San Cristobal, quand le GPS a paniqué un peu, en perdant mon signal un mini moment pendant que j’étais sous les cailloux. Puis un peu plus tard, alors que je me retrouvais au même endroit que là où j’étais un peu plus tôt, mais à la verticale juste au dessus. Le deuxième gribouillis plus raisonnable, c’est le deuxième ermitage.

    On repère quand même assez bien sur le profil de la balade aussi : San Cristobal est avant le premier pic, Virgen de Anies au sommet du deuxième. Facile, non ?

    N’empêche… pendant toute cette balade, enfin à partir du moment où j’ai découvert l’emplacement de l’ermitage de San Cristobal… j’ai pas pu m’empêcher d’imaginer la scène…

    Dans un bar, à Huesca. Deux amis ingénieurs sont en train de boire une bière. Ils viennent juste de finir deux petits projets qui, il faut bien le reconnaître, sont plutôt raisonnables par rapport à leurs projets habituels. Un barrage et une route (avec à peine 6 tunnels pour le rejoindre) à Vadiello et une autoroute (avec des tunnels, mais pas partout, pas tout le temps, pas pour tout le monde) entre Huesca et Sabiñanigo. Ça fait un moment maintenant qu’ils bossent sur des projets toujours un peu déments.
    – Tu sais, je crois que je vais bientôt envisager de prendre ma retraite.
    – Ah oui ? Tiens, marrant que tu en parles. Moi aussi. Me semble que le temps est venu.
    – Je trouve oui.
    – Tu as des projets ?
    – Bin écoute, il se trouve que oui. J’ai envie d’un peu de solitude. Vivre en ermite, pendant quelques temps. Et j’ai trouvé un endroit assez sympa pour me construire une maison.
    – Je pense que si on est d’aussi bons amis, c’est aussi parce qu’on a souvent les mêmes idées. Moi aussi je me suis trouvé un endroit plutôt agréable pour ermitter.
    – Bonne nouvelle ! Tu vas où ?
    – J’ai trouvé une chouette falaise, sur le bord du ruisseau San Cristobal.
    – Ça c’est top ! On sera voisin. Moi je me suis trouvé une super falaise au dessus de Anies !

    Un commentaire

    1. Commentaire de La Feuille

      Vu l’état des escaliers, faut pas qu’il soit trop bourré l’ermite quand il rentre de sa virée en boîte le samedi soir ! Par contre, il est bien placé pour lancer des cacahuètes aux visiteurs du dimanche qui le réveillent trop tôt.
      Magnifiques prises de vue !

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