Rue du Pourquoi Pas



Parce qu’il y a toujours une route qui, quelque part, m’attend.
Carnets de route, photos de voyages, et pensées vagabondes.

Écrit par : Sébastien ChionAugust 13th, 2014
  • Moins de 24 heures. Ça n’est évidemment pas assez, comme beaucoup trop souvent ces derniers temps. Heureusement, à partir de maintenant, je peux ralentir…

    J’aurais quand même pu explorer un peu les rues d’Amsterdam. Pas assez, évidemment. Je reviendrais sans doute. J’ai toujours envie de revenir.

    J’ai assez vite compris que je n’étais pas dans le bon mood (je devrais dire “dans le bon état d’esprit” mais je suis déjà en train de réadapter mon vocabulaire) pour passer une soirée seul à Amsterdam. J’ai bien essayé de contacter du monde via BeWelcome et Couchsurfing, sans succès. Amsterdam fait parti de ces villes où trouver un hôte relève un peu du miracle… alors à la place, je me suis pris une chambre en auberge de jeunesse. Comme je suis en correspondance, je n’ai pas eu à récupérer mes bagages. Je suis donc passé à l’AJ le temps de m’enregistrer, puis de repartir. Je suis décentré, et ça me convient parfaitement. Pas envie d’être dans une AJ avec des jeunes à moitié défoncés qui rentre à 4h du matin se ventant de leurs “exploits” dans le Red District. Pour rentrer là où je reste, il faut prendre le train. Le dernier étant vers minuit et demi, je suis assez tranquille. En plus d’être juste à côté d’une gare, j’aime bien le quartier de l’Auberge. Résolument moderne. Je l’aurais exploré avec plaisir si j’avais eu du temps pour ça.

    Je suis remonté dans le train, et dix minutes après, je me retrouvais à la station centrale. Mon oeil a été attiré par le bord de l’eau. Un magnifique bâtiment. Un genre d’Opéra de Copenhague, avec un design différent. Et pas à Copenhague, évidemment. Mais j’ai jeté un oeil, parce que ça me plaisait bien.

    Copenhague m’est revenue très rapidement à la mémoire une deuxième fois, juste après. Au moment de traverser la rue. Parce que là aussi, il faut penser aux vélos. Je me souviens encore que j’avais écris “Parce que ces parkings à vélos, remplis, partout, dans tout les sens, c’est exactement comme ça que j’imagine Amsterdam“. Paroles prophétiques, comme souvent, quand j’y pense…. au final, j’ai quand même l’impression qu’il y a un peu moins de vélos à Amsterdam. Les parkings ne s’étalent pas à l’infini. Et il y a beaucoup moins de vélos “spéciaux”. Et puis je trouve la circulation beaucoup moins agréable à Amsterdam où, bien souvent, les vélos ont à slalomer entre les piétons. Autant pédaler à Copenhague ne m’aurait pas déranger du tout, autant je me demande si c’est bien agréable au centre-ville d’Amsterdam. Trop chaotique à mon goût, je pense.

    Je n’ai pas pris le temps de lire quoi que ce soit sur Amsterdam. Je savais que je n’aurais que le temps de me promener un peu au hasard, comme j’aime bien le faire, sans but particulier. M’ajouter un but m’aurait compliqué la vie. Alors j’ai préféré ne rien savoir.

    Il y a pourtant ces classiques, que l’on ne peut éviter. Plusieurs personnes m’ont demandé si je voulais aller au Red District (le quartier de la prostitution -légale- de Amsterdam). Je ne savais pas si j’en avais envie, mais on m’a dit que de toutes façons, c’était immanquable.

    Il y a aussi les Coffee Shop. Mais je n’avais pas particulièrement envie de me fumer un joint. Loin d’être un gros fumeur, je n’aime pas fumer seul de toutes façons. Je sais que des gens protesteront. Aller à Amsterdam sans fumer, c’est comme visiter la France sans manger de fromage, le Québec sans goûter au sirop d’érable, ou l’Australie sans manger de kangourous au barbecue. Et pourtant… l’odeur de cannabis est suffisamment présent dans la rue. On a du mal à l’oublier. Dommage. Ça n’est pas une odeur que j’apprécie particulièrement. J’ai fait avec.

    Il y a aussi les canaux. Et là, par contre, impossible de passer outre. En réalité, le centre-ville d’Amsterdam est une véritable toile d’araignée de canaux. Ils sont partout et vont dans toutes les directions. Si bien que l’on passe son temps à monter et descendre des petits ponts. Amsterdam ville plate ? Pas tant que ça. Ils sont souvent raides, les ponts !

    Ajoutez à cela plein de petites ruelles, de petits passages, et de rues secondaires, et vous obtenez un labyrinthe magnifique. Le genre d’endroit où j’adore me perdre, et où je me suis perdu. Pas complètement, pas totalement, mais je me suis retrouvé suffisamment désorienté pour ne plus savoir exactement où j’étais et où je m’en allais. Je n’en ai qu’aimé un peu plus découvrir la ville.

    Le défaut ? On a très vite l’impression de tourner en rond, et de toujours voir la même chose. C’est beau, même très beau assez souvent, mais un peu trop pareil à mon goût. Canaux, petits ponts, petites ruelles, boutiques, gens. Canaux, petits ponts, petites ruelles, boutiques, gens… alors on marche, et on marche encore, et on finit par se lasser par ce manque de changement.

    La ville est très verte -il y a des arbres partout- et pourtant assez étouffante. Il me faudra tomber sur un parc gazonné pour réaliser que c’est le seul gazon que je vois. Partout ailleurs tout est pavé. Pas de terre, pas d’herbe… je me rends compte que ça me dérange, sans que je sache trop expliqué pourquoi, vu que de la verdure, il y en a beaucoup dans les arbres… et il y a quand même quelques grandes places, suffisamment ouvertes, pour compenser avec l’étroitesse de certaines rues.

    Je déambulerais longtemps, sans vraiment faire de pause. Il y a beaucoup de pubs, mais aucun ne m’inspire vraiment. Je finis par m’acheter une frite et un hamburger, que je mange tranquillement assis sur un banc, le temps de me reposer les jambes.

    Et puis je me décide finalement. On m’a dit qu’il était immanquable, pourtant je l’ai raté. J’ai traversé le Red District sans m’en rendre compte. J’ai bien marché dans des rues où l’on retrouvait pas mal de sex-shops, mais rien de bien original au final pour quiconque s’est promené quelques fois sur Sainte-Catherine. En fait, j’essaie difficilement de trouver ce qui fait la réputation d’Amsterdam. J’en déduis que c’est un mélange de beaucoup de choses… beaucoup de pubs, des endroits où l’on peut fumer tranquillement, des sex-shops… pourquoi pas… mais en effet, ça n’est pas vraiment ce que je recherche.

    À force de regarder la carte, j’arrive à me retrouver en plein coeur du Red Distict. Dans ces rues où l’on retrouve les célèbres “vitrines” d’Amsterdam. Je ne savais pas comment réagir. Je n’arrive toujours pas à me faire une opinion sur la prostitution. Sur le fait de vendre son corps. Est-ce un travail si différent qu’un autre ? Comme graphiste, je vends mes idées et ma créativité. Comme écrivain, je vends une partie de ma vie privée, une partie de mes expériences, de mes pensées. Je suis assurément mal placé pour juger ces filles qui, au final, ne vendent “que” leur corps. Ça tombe bien, ça n’était pas mon intention. Peut être essayer de les comprendre alors ? Après tout, si c’est leur choix (et j’imagine que c’est ça le point le plus important – une amie résume la question de la prostitution à une autre question : “qu’est-ce que le libre arbitre ?”. J’ai d’abord trouvé ça un peu radical comme “simplification”, mais plus j’y pense, et plus je crois que je suis d’accord).

    Bref… je me suis promené devant ces vitrines, regardant sans honte et sans gêne. Puisque de leur côté, elles se montrent de la même façon. Elles ressemblent presque à des travailleuses comme les autres. Assises, à attendre que l’on s’intéresse à elles, en pianotant sur leur téléphone , ou en discutant avec leur voisine. À faire des sourires, à chercher à croiser les regards, à lancer des invitations d’un clin d’oeil ou d’un mouvement de tête… ne faisais-je pas exactement la même chose quand je me suis retrouvé dans la rue à essayer de récolter des dons pour une oeuvre humanitaire à Melbourne ? Je n’étais pas si loin que ça d’elle finalement… j’allais chercher l’argent d’inconnus, en jouant de mon empathie, de ma sympathie, et de mon sourire. Je vendais une des choses que je sais le mieux faire quand j’en ai envie : aller vers les gens. Et au lieu de jouer sur la carte de la culpabilité, elles jouent sur la carte du plaisir.

    J’en suis évidemment venu à me poser la question : serais-je capable de payer pour un service sexuel ? Serais-je capable de transformer un être humain en objet, que j’achète pour mon plaisir, le temps d’une petite demi heure ? Je ne suis pas sûr d’avoir réussi à répondre à la question. Pour une raison relativement stupide, en fait. Je n’ai trouvé aucune de ces filles belles. Ne vous méprenez pas. Elles sont jeunes, grandes, minces, maquillées, souvent avec de grosses poitrines débordant de petit maillot de bain… en fait, elles répondent aux canons de beauté de notre société actuelle… je les ai trouvées plastique, artificielles, sans intérêt. Ce qui m’intéresse chez un humain, c’est le côté humain, justement. Je n’ai jamais aimé les objets. Alors forcément, puisqu’il n’y avait pas de vraie attirance, puisqu’aucune n’arrivait vraiment à éveiller du désir en moi, je n’ai pas vraiment pu aller au bout du questionnement. À moins que… il y en a eu une, quand même, parmi toutes les autres. Une seule donc le sourire semblait naturelle, une seule dont le corps ne semblait pas avoir été transformé… oui, une qui m’a plu particulièrement. J’ai continué mon chemin. il y a des questions dont on ne veut pas connaitre la réponse…

    Amsterdam est une ville où les gens vont faire la fête. Le centre-ville ressemble à une fête permanente. Dans les rues, les gens qui crient, se déplacent, chantent, fument et boivent. Sur les canaux, les gens louent des bateaux, se retrouvent très nombreux dessus, crient, chantent, fument et boivent… je suis parti un peu avant minuit. je ne voulais pas rater les derniers trains. Et surtout, je n’avais pas vraiment envie de voir comment tout cela allait évoluer… de l’alcool, de la drogue et des filles presque nues dans des vitrines… je doute que ça puisse évoluer d’une façon qui me plaise…

    J’ai repris le train, et je suis rentré à mon auberge.

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    Le lendemain, j’ai déambulé encore un peu. Le Red District était beaucoup plus tranquille, mais les premières filles étaient déjà là à 11h. Peut être même avant. J’ai essayé de m’arrêter pour boire une bière. Il y avait là une jolie micro brasserie. J’aurais aimé goûter. Ils ne prenaient pas la carte. Je n’avais plus de liquide. Et suite à un problème, je n’ai pas pu en retirer. Alors à nouveau, j’ai marché un peu au hasard, avant de revenir à la gare, prendre le train qui me ramènerait à l’aéroport.

    Prêt de  sept heures d’avion devant moi. Peut être qu’une fois arrivé à Montréal, j’aurais l’impression que mon voyage a enfin commencé. Mais je ne crois pas vraiment. Pour le moment, je rentre à la maison. Je pense que mon voyage commencera réellement quand je quitterais Montréal et que, le pouce pointé vers le haut, je me lancerais à l’assaut de la transcanadienne…

    2 commentaires

    1. Commentaire de jacques C

      Je n ai jamais eu envie d’aller visiter Amsterdam; et je crois encore moins après tes commentaires….
      Bonne continuation !
      Jacques

    2. […] croisé des québécois à quelques reprises dans les rues d’Amsterdam. Entendre l’accent, la façon de parler, m’avait fait un bien fou. De retour à […]

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