Tête en bas

Down under wandering. Archipelagoes to islands; beaches to deserts; mountains to cities.

Rufus


Le circuit du Mont Rufus. 18,5 kilomètres, 680 mètres de dénivelé. Vu comme ça, ça paraît quand même beaucoup. En l’occurrence, quand on commence à marcher, les jambes sont lourdes. Eliza n’est pas si loin derrière. Ni toutes les autres avant… alors on commence tranquillement. On grimpe. Un peu. Pas beaucoup. Le dénivelé est à peu prêt le même que celui que l’on a fait pour aller voir « Bishop and Clerk ». Certes, la distance est plus importante. Mais il me semble quand même que ça devrait monter plus. J’ai pas envie de me retrouver avec un énorme mur à grimper sur les cent derniers mètres, ou une mauvaise surprise du genre. Mais ça ne semblait pas être le cas, pourtant, quand on regardait depuis en bas…

Tout le début de la balade se fait sous les arbres. On ne sait pas trop où on va. On n’est pas sûr de ce qui nous attend… et puis soudainement, on sort des arbres. On voit le sommet, là haut, et le chemin pour y aller. Oui, ça grimpe un peu, mais ça reste tranquille tout le long. C’est exactement ce qu’il nous faut. Alors on continue de monter. Rendu au col, le vent se met de la partie. Des belles rafales, assez violentes. mais heureusement plutôt chaudes. On évite donc de finir congeler.

On grimpe encore un peu. Il y avait un piège. Le sommet n’est pas là. Il est en arrière. Un peu plus loin. C’est juste un peu de marche supplémentaire à faire. Ce n’est pas plus raide, à ça se fait sans problème. On arrive au sommet quelques temps après. On admire rapidement. Loin, là bas, au sud, on voit l’énorme panache de fumée de l’incendie de la veille. Il semble encore plus gros et plus impressionnant. Le vent ne se calme pas. Au contraire. Alors on se met à l’abris derrière une pile de cailloux, et on mange tranquillement.

Deux sandwichs plus tard, quelques gorgées d’eau, et un petit 5 minutes supplémentaires parce que bon, quand même, on peut bien se reposer un peu, on attaque la descente. Le vent de face n’est vraiment pas agréable. Il faut luter pour avancer, mais on y arrive.

On se retrouve à côté d’une jolie série de formations rocheuses, où on s’amuse un peu à faire quelques photos.

Un peu après, dans un mini vallon qui semble être un paradis à wombats (herbes rases et nombreux terriers), on a presque l’impression de visiter un jardin botanique. Il ne manque plus que les petits panneaux pour nous donner le nom des plantes.

On est tout enthousiasmé par le côté très agréable et très beau de la descente. Mais celle-ci finit par devenir un peu moins intéressante. On traverse une grande prairie avec rien à voir, avant de se retrouver sous les arbres avec à nouveau rien à voir, si ce n’est un joli lac à un moment. L’enthousiasme baisse. La motivation aussi. Les jambes sont lourdes.

On dit qu’en montagne, le temps peut changer très vite. C’est encore plus vrai en Tasmanie. Le magnifique ciel bleu que l’on avait deux heures avant et maintenant complètement gris. On a même le droit à quelques goûtes de pluie. Ça dure une vingtaine de minutes, avant que le ciel bleu ne revienne. On est rendu sur le bord du lac, à un endroit qui s’appelle « Platypus Bay ». Mais d’ornithorynque, nous ne verrons pas.

Les deux derniers kilomètres se font un peu en trainant la patte, mais on retrouve finalement le van. La journée est loin d’être finie.

Pour rejoindre Devonport (on prend le ferry demain matin), il y a deux options. La toute droite, qui devrait nous y amener en deux heures, via des paysages pas forcément intéressants, et la moins droite, qui devrait prendre 4 heures environ, dans des paysages beaucoup plus inspirant, avec au moins un superbe point de vue et une jolie cascade sur la route. Après hésitation et discussion, on prend finalement la deuxième option. Pourquoi faire simple, après tout ?

La route repart donc dans les montagnes, tournant, tournant, et tournant encore. On monte, on descend. C’est un peu pénible à conduire, mais c’est vrai que c’est beau. On s’arrête une première fois au point de vue panoramique, qui demande quand même 30 minutes de marche aller-retour pour en profiter. Mais ça en vaut parfaitement la peine. Et ça permet de découvrir, loin là bas, le magnifique « Frenchman Caps ». La falaise semble particulièrement impressionnante vue d’ici. Une randonnée de trois quatre jours pour l’atteindre. Il est temps que j’arrête de noter toutes les balades que j’aimerais faire en Tasmanie !

Et puis au moment de jeter un oeil au panneau, pour attraper le nom des sommets, mon oeil est attiré par une citation. Ou plutôt par la signature qui va avec. « John Muir ». J’ai passé nom temps à croiser sa route sur la côte ouest américaine. Les séquoias géants lui doivent beaucoup. Les parcs nationaux également. Du coup, je ne suis pas particulièrement surpris de trouver une citation de lui ici. Il convient parfaitement. « Nervermore, however weary, should one faint by the way who gains the blessings of one mountain day; whatever his fate, long life, short life, stormy or calm, he is rich forver ». Si j’en comprends parfaitement l’essence, je suis incapable de trouver une traduction correct de la première partie. Mais l’idée, c’est que quiconque a eut la chance de passer une journée dans les montagnes, quelque soit son destin par la suite, qu’il ai une vie calme ou tumultueuse, longue ou courte, il sera riche à jamais. Difficile d’être en désaccord. Retrouver John Muir ici, au milieu de ces montagnes, vient me toucher d’une façon que je n’explique pas. Un peu comme si d’un seul coup, ce panneau créait un lien entre mes précédents voyages sur la côte ouest, et ce nouveau voyage ici…

Je retourne au van le coeur et les jambes plus légères. On reprend la route, pour s’arrêter une nouvelle fois, un peu après, pour admirer les « Nelson Falls ».

La nuit commence à tomber. Il n y a plus vraiment de pause au programme. Juste de la route. Pas mal de route. Moi, ça ne me dérange pas. J’aime rouler. Même quand il s’agit de conduire un gros van.

J’avais demandé à quelqu’un, Bernd je crois, si la région de Queenstown était belle. Sa réponse ressemblait à « si tu aimes les montagnes dévastées par les pluies acides, ça peut te plaire ». Je ne savais pas trop à quoi m’attendre avec une introduction comme ça… et pourtant, on comprend vite. Même dans la pénombre de la fin de journée, on découvre les sommets entièrement dégarnis. Avec quelques brins d’herbe et un petit buisson de temps à autre, qui survivent comme ils peuvent. La terre est de toutes les couleurs. C’est à la fois beau et laid… je ne m’essaie pas à la photo, sachant que ça ne rendra rien. Il y a quelque chose de fascinant là dedans. Sans doute est-ce la preuve directe des conséquences que peuvent avoir les activités humaines sur l’environnement…

La ville de Queenstown fait un peu peur elle aussi. Il est même pas 21h, mais il n’y a plus une seule lumière partout. Tout est fermé. Déprimant. Ça fait peur. On s’arrête juste 5 minutes. On doit retrouver Virginie et Sébastien à Melbourne, le lendemain. Mais ça, c’est juste la théorie. Parce que dans la pratique, on n’a absolument aune nouvelle. Iris renvoie un mail, et on repart.

On arrivera trois heures plus tard à Devonport, sur le parking du ferry. Il est juste un peu après minuit. Il est définitivement plus rapide de traverser la moitié de la Tasmanie que la moitié du Kansas ! La route nous a fait passer devant chez Sarah. La boucle bouclée. La Tasmanie est finie. Pour le moment. Ou définitivement. On ne sait pas.

 

One Response to “Rufus”

  1. March 8th, 2012 at 4:52 pm

    La Feuille says:

    J’ai offert un bouquin de John Muir, “Célébrations de la nature”, à Guillaume, notre voisin.
    J’ai tout bon ?