Et puis finalement, j’arrive à Eugène. Je suis les panneaux qui m’amènent au centre ville. Au moment où j’arrive, je vois une foule de gens à pied se promener dans tout les sens. Au loin, je vois des petits stands, signe évident qu’il se passe de quoi. Je gare Pourquoi Pas ? à côté d’un parcomètre. Je vérifie : le samedi c’est payant. J’hésite. Et puis je me dis que mon van à petit pois verts immatriculés au Québec il pourrait bien faire pitié par ici. J’ai vraiment pas envie de payer un parking aujourd’hui.

Première étape : trouver une connexion internet afin de localiser une buanderie. Ça se fait très rapidement, puisqu’il se trouve qu’il y a un Starbuck un bloc plus loin. Parfait. Je repère 4 adresses de laveries dans les environs, et je retourne au van, récupérer mon linge sale. Je vois bien qu’il y a un événement qui se déroule. J’entends la musique, je vois tout les gens. Je vais regarder ça d’un peu plus prêt dans pas longtemps. Je me prépare pour l’expédition laverie.

– Bonjour !

– Bonjour.

– C’est tu un van aménagé que vous avez ?

– Oui !

– Je peux regarder l’intérieur ?

– Oui oui, bien sûr.

Elle a dans la soixantaine, un sourire très agréable et chaleureux.

– J’ai l’habitude de voyager dans un van du même genre. C’est très confortable. Vous venez de où ?

– Je viens de Montréal.

– Et ça fait longtemps que vous êtes à Eugène ?

– En fait, je viens juste d’arriver.

– Vous avez un endroit où rester ce soir ?

– Et bien à vrai dire, je ne pensais pas rester. Je m’en vais à Burning Man, je sais pas si vous connaissez ?

– Burning Man ? Bien sûr ! J’ai un fils qui y va aussi !

– Donc comme j’ai pas mal de route à faire, je pensais juste faire mon lavage et repartir.

– Je comprends. Mais il y a beaucoup de chose à voir en fin de semaine.

– C’est ce dont j’ai l’impression en effet. Vous pensez que ça vaut la peine de rester ?

– Absolument ! Tenez, voilà notre adresse. Vous pourrez garer votre van, c’est sécuritaire. Et puis si vous voulez prendre une douche, pas de problèmes ! Vous arrivez de loin avec votre accent, la moindre des choses, c’est que l’on vous montre que l’Oregon est accueillant !

Elle m’écrit une adresse sur un bout de papier, avec quelques indications. Je la regarde faire, bouché. L’invitation est si généreuse, si gentille, que je ne me vois pas dire non. Je me retrouve projeté dix ans en arrière. C’était la première fois que je venais au Québec. J’avais fait la connaissance d’une fille qui s’appelait Marie-Noëlle. Ses parents étaient d’accord pour que je plante ma tente dans leur jardin les deux premiers jours de mon voyage, invitation que j’avais énormément apprécié. Le lendemain matin, les voisins voyant que je dormais sous tente m’avaient invité à dormir chez eux. L’invitation, à l’époque, m’avait laissé aphone pour plusieurs jours (ou presque). Finalement, dès le deuxième soir les parents de Marie-Noëlle m’avait laissé dormir à l’intérieur, et m’invitaient même à leur chalet pour la fin de semaine. Depuis, j’ai découvert couchsurfing, et la générosité de l’accueil de certaines personnes. Mais couchsurfing, à la base, part d’une requête de la personne qui a besoin d’être hébergée. Sarah, puisque c’est son nom, m’a tout à fait spontanément invité à venir installé mon van chez elle, et à y prendre ma douche. Elle ne me connaît pas : elle vient juste de me dire bonjour parce qu’elle aimait bien mon van. Certes, comme le dit si bien couchsurfing, « si je suis venu jusqu’ici, c’est sans doute pas pour lui voler sa télé ». Je sais que j’ai l’air full sympathique avec mon petit van, mal rasé, et mal habillé. Mais quand même.

Finalement, Sarah continue son chemin avec ses amis : ils ont l’air d’avoir un rendez-vous. Moi, je prendrais la route de la buanderie. Je jette mon linge dans la laveuse, et m’installe tranquillement, mon ordi sur les genoux. Un peu après, je me lève, jette mon linge dans la sécheuse, et me réinstalle.