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Le (long) repos de l’autre combattant
Quand on a passé 4 mois, à écrire presque tout les jours, c’est à la fois un soulagement de s’arrêter, mais aussi un étrange sentiment de manque. Je continue à avoir des phrases spéciales blogue qui apparaissent dans ma tête en plein milieu d’une activité. Documenter mon quotidien en dehors du voyage ne m’intéresse pas plus que ça. Mais en même temps, je me rends compte que j’ai le sentiment que le voyage n’est pas encore terminé. « Les aventures du Pourquoi Pas ? », ce n’était pas seulement le tour d’un bout d’Amérique du Nord ; c’était aussi un voyage symbolique intérieur. Et à ce niveau là, c’est très loin d’être terminé. C’est même juste un commencement.
Il n’empêche que d’un point de vue symbolique, tout s’arrête ici. Le Pourquoi Pas ? vient de s’arrêter pour l’hiver. C’est dans un magnifique jardin pas très loin de Québec qu’il va pouvoir hiberner. Bien confortablement, sous le regard bienveillant de Alain et Louisette, que je ne peux que remercier pour ce service qu’ils nous rendent ! Ni Pourquoi Pas ? ni moi n’avions envie qu’il ne passe l’hiver dans les rues de Montréal.
La boucle est bouclée. La plus grande de toute. Celle que je n’avais même pas vue venir. Celle qui contient toutes les autres petites boucles. Je ne voulais pas partir à l’aventure sans essayer le Pourquoi Pas ? au paravant. Le tout premier voyage du Pourquoi Pas ? m’a amené à Québec, pour assister à un show de Rammstein. Tout c’était bien passé, tout était dans l’ordre, tout allait comme il faut.
L’avant dernier voyage de 2010 du Pourquoi Pas ? m’a amené à Magog, à la microbrasserie de Memphré, pour manger une fondue au fromage et boire une bière de microbrasserie avec Brigitte. Thématique et logique, non ?
Quand au tout dernier voyage de 2010 du Pourquoi Pas ?, il m’a ramené à Québec. Je me suis arrêté à la microbrasserie de la Barberie, pour la fête traditionnelle de la Ste Barbe. Petits amuses gueule, traiteur de qualité, dessert, alcool d’érable. Tout ça accompagné de quelques bières produites à la Barberie. Un vrai régal. Une belle façon d’approcher de la conclusion. Je suis reparti avec une bouteille d’une bière exclusivement brassée pour l’événement. Une de plus pour la collection.
Et puis finalement, après une dernière journée à déambuler dans les rues de Québec, je suis remonté au volant pour une dernière fois. Sous la neige, avec un étrange sentiment de déjà vu, et une inquiétude grandissante. Une autoroute qui blanchit, un van qui commence à montrer des signes pas très rassurant dans les virages et les côtes.
Mais non. Pour sa toute dernière fois, le Pourquoi Pas ? m’a rappelé que je n’avais pas à m’inquiéter. Qu’il était un valeureux combattant, fier et plein de ressources. Il m’a amené à bon port, sans soucis. Juste un dernier petit dérapage voulu, dans le dernier virage.
Et puis c’est fait. Il est garé, bien confortablement. Il ne bougera sans doute pas avant un moment. Cette nuit encore, je ne dormirais pas très loin. Et pourtant, je lui ai déjà été infidèle. Pour la première fois depuis 27000 kilomètres, j’ai conduit une vraie voiture. Sentiment étrange, changement surprenant !
C’est fait. J’imagine qu’il ne me reste plus qu’à écrire ce dernier petit mot de trois lettres, que j’essaie d’éviter d’écrire… et pourtant, il faudra bien. À un moment. Et puis juste après, j’aurais juste à rajouter une dernière petite série de photo, et une mini vidéo… Et ça sera terminé, pour de bon…
FIN
Des histoires de chiffres.
D’abord, on fait parler les chiffres.
De la distance parcourue.
– Le Pourquoi Pas ? a roulé 26 250 kilomètres très exactement. De tout ces kilomètres, j’en ai conduit 26 220. Jane en a conduit environ 25 le soir de mon anniversaire, et Danielle en a conduit 5, sur la playa, le jour de son anniversaire.
– J’ai décidé d’estimer ma vitesse moyenne à 70 km/h. C’est peut être un peu plus, ou un peu moins, mais ça ne doit pas être très très loin de ça. Ce qui voudrait dire qu’au cours des 4 derniers mois, j’ai conduit pendant 375 heures. Presque 16 jours au complet. Ça fait quand même pas mal !
– Ce qui nous donne également une moyenne très exacte de 210 kilomètres par jour. Je suis tout à fait d’accord avec vous, c’est beaucoup trop. Je préparerais les itinéraires autrement la prochaine fois.
– Si l’on se rappelle que la circonférence de la terre est de 40 000 kilomètres à l’équateur, j’étais encore loin. Par contre, j’ai quasiment fait un tour de terre au niveau du 45e parallèle (la circonférence étant, à ce niveau, de 28 336 kilomètres).
– D’après Google Map, l’itinéraire le plus court entre Montréal et Portland est de 4451 kilomètres. J’ai donc fait quasiment l’équivalent de trois aller-retour. Quand même… sachez aussi que la distance Montréal-Sydney est de 16 000 kilomètres. Dommage, donc, que le Pourquoi Pas ? ne soit pas amphibie. Bon, la lune étant à 384 402 kilomètres de la terre, j’en étais quand même loin.
Des photos prises.
– 17756 photos prises avec un appareil, 237 avec l’autre, pour un total de 17 993 photos.
– Lors de mes précédents voyages, ma moyenne était presque d’une photo au kilomètre. Pour l’occasion, la moyenne chute à 0,68 photos du kilomètre. Même en prenant en compte les étapes sans intérêt photographique (Dakota du Nord, Prairies, Kansas), je reste quand même en dessous de la photo au kilomètre. Je me serais donc assagi ? Peut être bien !
– Ce voyage aura duré 3018 heures, ou 181 080 minutes. Vous me voyez venir : une photo au 10 minutes et 3 secondes. Si l’on considère que je dors 8 heures par jour (un tiers du temps), je me retrouve donc éveillé pendant 120 707 minutes. On se retrouve alors avec une photo au 6 minutes 40. Beaucoup plus raisonnable, une fois encore, que la photo aux 4 minutes 20 prise lors de ma première visite en Colombie Britannique.
– Si le numérique n’existait pas, ça voudrait dire 750 rouleaux de pellicules 24 poses. À 10$ la pellicule, hum… ouf !
– Après une première sélection, seulement 8 707 photos sont encore sur mon disque dur. Ça nous fait donc du 50% de « perte ». Chiffre qui n’est pas tout à fait vrai, puisqu’une photo panoramique à l’arrivée à Montréal, c’est entre 6 et 15 photos au moment de la prise de vue.
Du blog.
– Côté blog, on parle de 676 articles différents. Ça ne veut pas dire grand chose, vu qu’au début, je faisais plusieurs posts sur une même journée (optimisation moteur de recherche) mais que sur la fin, j’ai préféré le format un ou deux posts par jour (optimisation lecteur).
– Je peux assez facilement estimé le temps de blogage à une heure par jour en moyenne (ce qui inclue aussi la sélection, traitement et correction des photos). Donc en gros, plus d’une centaine d’heures de travail pour garder le blog à jour. Là encore, c’est pas tout à fait vrai, vu qu’une grosse partie du temps se fait au niveau du traitement photo, qui n’est pas nécessaire que pour le blog.
– Il y a 8 238 images sur le blog. Ne pas oublier que la moitié sont des « thumbnails », ce qui veut dire 4 119 photos uploadées quand même. Joli score. Ça représente quand même la moitié des photos « ramenées » à Montréal. On peut dire que les lecteurs ont eut un bon aperçu d’ensemble !
– Il y a aussi 7 vidéos et un fichier son. Il faudrait que je pense encore à ajouter un dernier fichier son : le son du moteur du Pourquoi Pas ? au démarrage.
– Les lecteurs ont laissé 143 commentaires. Un peu plus de un par jour. Vous êtes, sans surprise, extrêmement discrets. Il y a quand même eut 2 049 visites à ce jours, et 7 360 pages vues.
30 jours et 18 heures plus tard…
J’ai rencontré Danielle le 23 octobre, aux environs de 18h (heure de Portland, donc 20h heure de Chicago). Je dois la déposer au train pour 14h. À quelques heures près, donc, on vient de passer un mois ensemble (ou, selon la façon de voir, on vient de passer un mois et quelques heures ensemble). De tout ce temps, on a à peu prêt tout le temps été ensemble, à quelques mini exceptions près (en général, pendant que je faisais réparer le van). On s’est posé la question à plusieurs reprises. À quel moment on allait finir par se taper dessus ? Surtout en vivant dans un espace aussi limité que le Pourquoi Pas ? ! On l’a mutuellement reconnu, c’était l’une des raisons pour laquelle on voulait qu’elle vienne à Montréal. Essayer d’étirer encore plus cette période. Voir jusqu’où on pouvait se rendre.
On a enchaîné les moments magnifiques, les découvertes, les paysages ; on a développé une très belle complicité (notamment au niveau musical). Et on est tout les deux d’accord sur le fait que ça va pas être facile de se dire au revoir. Mais que en même temps, on va pouvoir tout les deux rerespirer un peu, chacun de notre côté, et se replonger chacun dans nos projets !
Il n’y a plus personne dans l’appart quand on se lève finalement. Il reste un peu de mélange, alors je fais des panecakes, pour changer un peu des crêpes. On récupère ce qu’on a laissé traîné, on range un peu, on retourne au van, où Danielle rassemble ses affaires, et referme ses bagages. Le Pourquoi Pas ? nous emmène ensuite jusqu’à la gare. J’accompagne Danielle pour récupérer son billet de train. J’ai même un mini pincement de jalousie. Moi aussi j’aimerais ça faire une telle balade en train ! Enfin, peut être la prochaine fois. On se dit un dernier au revoir, et je retourne au van. Tout seul.
C’est étrange ; au début du voyage, j’ai commencé à écrire un livre, en rapport plus ou moins direct avec mon voyage. Et la scène de la séparation, et du van beaucoup trop grand, et beaucoup trop vide, je l’avais déjà écrite. C’est étrange de ressentir quelque chose que l’on avait imaginé ressentir et que l’on avait décrit, quelques semaines au paravent. En même temps, ce n’est pas la première fois que mon voyage me fait la surprise, et je commence à m’y habituer.
Je fais une dernière mini pause à une station service, histoire de remettre un peu d’essence dans le van, et je prends la route. Il est 14 heure exactement. Je n’ai aucune idée de quand je vais m’arrêter, de où je vais dormir, et de quand je vais arriver.
À 16h30, je fais ma première pause, et j’en profite pour refaire le plain. 2h30, 250 kilomètres. C’est un bon rythme.
18h30, deuxième pause. Le van est un plaisir à conduire. Il est comme moi. Il sent l’odeur de l’écurie, alors il en profite. Il sait que c’est la dernière ligne droite. Il en profite. Il la déguste. Il l’apprécie. J’ai récupéré un peu de musique sur l’ordinateur à Danielle, ce qui me permet de changer agréablement de ce qui m’accompagne depuis le début. Et surtout, j’ai récupéré ses morceaux à elle. Alors elle est toujours un peu dans le van avec moi, et ça, ça fait du bien quand même. Je continue à découvrir ce qu’elle fait, je continue à être impressionnée. J’aime sa voix, mais j’aime aussi sa musique. J’aime ses interprétations. J’aime ce qu’elle fait.
20h30. La frontière approche à grand pas, alors je fais une pause pour m’assurer, juste au cas où, que la plupart des bouteilles de bière sont bien cachées. J’ai évidemment l’intention d’en déclarer (moins que le seuil limite) mais je ne vais pas tout déclarer, j’en ai trop. De toutes façons, j’ai suffisamment de bonnes cachettes dans le van pour qu’ils ne trouvent pas tout en cas de fouille.
21h. Arrivée à la douane. Tout est réglé en deux minutes (incluant le délais d’attente des trois voitures devant moi). Ça fait du bien de revenir dans un pays civilisé. Où on vous laisse rentrer après seulement 5 questions, posées en français et avec le sourire. Je reprends la route.
22h. L’Ontario défile tranquillement. Je continue à me demander où je vais m’arrêter, sans trop savoir. Je me sens en pleine forme. J’ai pris un premier café.
Minuit. La traversée de Toronto se fait sans problème, et rapidement. Je regarde quand même, halluciné, les embouteillages dans l’autre direction. Des embouteillages. Un lundi soir. À minuit. Ça surprend !
1h30. Si je continue à ce rythme, je serais à Montréal vers 5h30, mais je vais peut être m’arrêter avant. Contrairement au Nouveau Brunswick ou au Kansas, l’Ontario est loin d’être désert. La file de droite est une succession de camions. Il y a énormément de trafic, et je sais que la lumière me fatigue.
2h30. Je prends un deuxième café, à tout hasard.
4h. Je me rends compte que l’objectif n’est plus très loin. En même temps, je commence à ressentir la fatigue, et mon but n’est pas de visiter un fossé à 100 km de l’arrivée. Je m’arrête pour une pause un peu plus longue. J’en profite aussi pour manger un peu de fromage. En général, manger me réveil.
4h30. Manger m’a bien réveillé. Je suis en plein forme au moment d’entrer au Québec. La traversée de l’Ontario m’aura quand même occupé un bon moment !
5h. Entrée sur l’île de Montréal. Dernière ligne droite. Le plaisir d’être de retour à chasser les dernières traces de fatigue depuis un bon moment maintenant.
Il est 5h30, très exactement, quand je coupe le contact, juste au pied de l’escalier. Il m’aura fallu 14h30 (il y a eut un dernier changement d’heure juste après Chicago) pour aller du centre ville de Chicago au centre ville de Montréal. 1389 kilomètres. Ça fait du 95,8 de moyenne. J’ai un peu délaissé l’option « économie d’énergie » sur le coup, mais je considère que ça en valait la peine. Ça fait du bien d’être arrivé.
Je n’ai pas les clés, mais je sais qu’Estelle se lève à 6h30, alors je vaque tranquillement à mes affaires, après lui avoir envoyé un mail (en utilisant ma propre connexion internet, ça faisait bien longtemps !) pour lui dire que j’attends sagement devant la porte.
6h32. Estelle est vraiment ponctuelle ! Je suis de retour dans l’appartement. Sentiment étrange. Je suis de retour chez moi, mais ça n’est pas vraiment chez moi. C’est chez Olivier et Estelle maintenant. Et puis je ne suis ici que pour deux semaines dans un premier temps. Alors il va falloir que je me réaproprie tout ça. Que je me retrouve là dedans. Je regarde, je redécouvre. C’est beau chez nous. Ça fait du bien !
8h05. J’ai fini de rattraper le retard sur le blog. Mon premier carnet de voyage qui se termine en même temps que le voyage. C’est ce que l’on appelle être à l’heure ! Pour une fois…
Bon, d’accord, ce n’est pas tout à fait la fin du carnet de voyage. Il me reste encore un certain nombre de debriefings à faire. Et puis je dois sortir plein de nombre. J’adore jouer avec les nombres en fin de voyage. Mais je vais sans doute me donner quelques jours pour atterrir quand même. Ah… tiens… et si j’organisais un dernier mini concours pour faire patienter les lecteurs ?
Un demi McDo et une demi douzaine de munchkin
Un autre réveil bien tranquille sur une aire d’autoroute. L’un des tout derniers. Un départ tout aussi tranquille. Et une autoroute qui nous amène jusqu’à Saint Louis, à une heure de route d’ici.
Comme toutes les villes nord américaines, on slalome d’une autoroute à l’autre, se dirigeant vers le centre ville. Et puis finalement, l’arche apparaît enfin. Définitivement plus impressionnante et plus grande que ce que j’aurais pensé.
L’arrivée sur l’arche est l’occasion de découvrir le plus horrible plan d’urbanisme que je n’ai jamais vu jusqu’à présent. Ce qui n’est pas peu dire, considérant que j’ai vu un certain nombre d’horreur en Amérique du Nord. Et en France aussi, accessoirement.
Il y a une rivière assez importante qui traverse la ville ; le centre ville, évidemment, est au niveau de la rivière. Les gens, par contre, n’ont aucun accès aux berges. C’est juste un énorme boulevard urbain, à la gloire des voitures, avec un parking gigantesque où sont envoyés tout les touristes venus voir l’arche. Par curiosité, on ne se gare pas tout de suite ; on fait un premier tour de l’arche. Celle-ci a été construite, en même temps qu’un parc commémoratif, pas très grand, avec pas grand chose, et surtout séparé du reste de la ville par un deuxième boulevard urbain, semi enterré. Bref, cette arche magnifique est entourée de deux boulevards urbains qui la sépare complètement du reste de la ville et de la rivière. Il n’y a pas à dire, c’est bien dommage.
Après en avoir fait le tour à moitié, on découvre un parking gratuit, pour les personnes qui veulent aller visiter l’église. Interdit, par contre, aux visiteurs de l’arche. Ça tombe bien, nous on voulait visiter l’église. Pas l’arche. Hum…
Enfin, puisqu’on est là, pourquoi ne pas aller jeter un petit coup d’oeil sur l’arche quand même, non ? Parce que personnellement -je sais je l’ai déjà dit – je la trouve magnifique. Et extrêmement photogénique.
Evidemment, après avoir visité toutes ces tours, il était hors de question que je passe à côté de la possibilité d’aller faire un tour au sommet de cette arche. Sauf qu’évidemment, une arche, c’est pas verticale. Alors l’ascenseurs, à l’intérieur, est un peu particulier. C’est plus un genre de montagne russe. On s’entasse joyeusement dans une mini capsule de secours de vaisseau spatiale, et on prie très fort que l’on va arriver en vie en haut.
En haut, l’espace est extrêmement réduit, mais la vue est quand même intéressante (le parc côté ouest, avec un boulevard urbain que l’on devine, le parking de l’église, avec Pourquoi Pas ? et un boulevard que l’on comprend mieux, et le bord de l’eau côté est).
Je suis également un peu déçu par le centre-ville de St Louis. Je me serais attendu à une ville plus grande que ça. Mais non.
Je redescends, content et déçu. Content de l’expérience. Content d’avoir vu l’arche et tout ce qu’elle symbolise. Content pour le côté assez inusité de la visite. Mais très clairement déçu par la ville. Je ne sais pas pourquoi je m’attendais à mieux… au pied de l’arche, il y a un musée relativement bien conçu sur le peuplement de l’ouest, mais on ne se sent pas plus inspiré que ça. Alors à la place, on fait quelques pas rapide en centre ville, histoire de faire quelques dernières photos, puis on reprend la route.
Il nous reste encore quelques heures d’une route on ne peut plus passionnante…
… avant de finalement arriver à Cowden, au fin fond du milieu de nul part, dans l’Illinois. Là où habite la mère de Danielle, et quatre autres de ses frères et soeurs. Jasmine (que Danielle m’a épelé, parce qu’ils prononcent Jazzmen, et que c’était, somme toute, un prénom relativement surprenant pour une fille), qui a 11 ans est la plus vieille encore restante à la maison, Austin et Dustin, les jumeaux, et Blake qui est le plus jeune, à 7 ans. Je m’y retrouve pas trop mal dans les noms, à ma grande surprise. Tellement concentré à me rappeler quel enfant est qui, par contre, que j’ai oublié le prénom de la mère. Le père, sauf erreur, s’appelle Jim, et arrivera un peu plus tard.
Une fois de plus, c’est un plaisir de voir tout ces gens heureux de se retrouver. Le Pourquoi Pas ? est du pour un changement d’huile depuis quelques temps. Je prends donc ça comme excuse pour laisser tout le monde se retrouver dans l’intimité, et je reviens une heure plus tard, avec un van prêt à affronter les derniers kilomètres.
Danielle m’a expliqué à plusieurs reprises à quel point sa famille est intense. À vrai dire, je m’en doutais ; j’imagine facilement à quoi ça peut ressembler une horde d’enfants dans tout les sens. Observer les quatre derniers est extrêmement intéressants. Jasmine est rendue, à son tour, la plus vieille. Mais les deux jumeaux, en garçons qui se respectent, aiment avoir l’impression de tout contrôler tout. Ça crée une interaction des plus intéressantes.
Je sors un peu toutes mes bricoles du van. Balles et massues de jonglage, djembé, etc… pour le plus grand plaisir des enfants. Tout le monde rigole et s’amuse bien, dans une folie complète. Le van en lui même est un outil de fascination. Avec le toit ouvert, ils s’amusent à grimper un peu dans tout les sens. Et finissent avec la permission de tous écrire leur nom dans un des ronds verts du van. Ça se calme un peu sur le moment du souper, que tout le monde prend un peu partout ; là encore, le chaos semble se gérer par lui même. La mère de Danielle a évidemment l’habitude de cuisiner par kilotonnes, et on mange excellemment bien. Là encore, un gâteau au chocolat a été préparé pour fêter le retour de Danielle, et une fois de plus, on mange super bien.
En fait, je me rends compte que faire le chemin de retour avec Danielle a donné une toute autre dimension à mon voyage. Là où j’étais préparé psychologiquement à manger des pâtes au fromage sur des aires d’autoroute, on fait le tour de sa famille qui nous accueille à bras ouvert, avec d’excellents repas. Ça rend, je dois bien le reconnaître, le voyage retour beaucoup plus intéressant et agréable ! Danielle me dit, à un moment, qu’elle est surprise de l’accueil que sa famille me réserve à moi, son ami qui conduit. Je lui explique qu’en même temps, pour eux, je suis le gars qui permet à tout le monde de revoir la fille qu’ils n’ont pas vu depuis un an, et que dans ce contexte, je pars quand même avec un net avantage pour être aimé de tout le monde ! Une autre soeur de Danielle, Megan, qui a quitté la maison il y a quelques temps, vient passer la soirée avec nous. Toute heureuse également de revoir Danielle.
La soirée n’est pas si froide que ça, et Jim a préparé un magnifique feu de camp en arrière de la maison. Toute la famille demande à Danielle de chanter ; elle va chercher sa guitare, j’en profite pour attraper mon djembé pour l’accompagner discrètement. Et évidemment, toute la famille demande la même chanson. « Twelve Munchkin ». La toute première chanson qu’elle a écrite, et qui parle de tout ses frères et soeurs. La chanson est extrêmement touchante, et est accessoirement l’une de mes préférées de toutes. Elle jouera quelques chansons ; comme à chaque fois, j’ai vraiment plaisir à l’accompagner discrètement. Quelques amis du voisinage passent dire bonjour à un moment. Tout le monde est vraiment surpris par le djembé. Ce qui, pour moi, est un instrument on ne peut plus classique, et une nouveauté parfaitement inconnue ici. Je fais donc une démonstration plus rapide et plus bruyante, qui plaît beaucoup aux enfants comme aux adultes.
Et puis Danielle a aussi raconté à tout le monde que je savais cracher du feu ; et ça, évidemment, les enfants ils veulent voir. Je ferais donc une démonstration, sous un certain nombre de paires d’yeux hallucinés. Jouer du djembé et cracher du feu, c’est quand même pas mal efficace pour impressionner des enfants !
La soirée se termine tranquillement. Les enfants vont se coucher. On suit pas très longtemps plus tard. Je sens la fatigue qui s’accumule lentement depuis Portland, où j’avais rechargé les batteries. J’imagine déjà la longue sieste qui m’attend à mon retour à Montréal ! Mais pour le moment, dans l’espoir d’avoir un peu plus de tranquillité demain matin, on dormira à l’abris dans le van !
Les 160000 kilomètres de Pourquoi Pas ?
On s’attendait à une journée relativement tranquille, consistant simplement à rouler des centaines de kilomètres. En tout cas, c’est à ça qu’on était préparé… Le petit duvet blanc qui recouvre le parking et le paysage tout autour laisse imaginer dès le réveil que finalement, ça ne sera peut être pas aussi simple que ça… on prend la route tranquillement, admirant le paysage, et se demandant comment va évoluer la météo…
La route est magnifique, le paysage est impressionnant, mais la neige m’inquiète. D’autant plus inquiétant, les panneaux indiquant « chaînes obligatoires pour les véhicules commerciaux, au col de Vail ». Enfin, on n’y peut pas grand chose, alors on avance, et on verra bien.
Les vallées se succèdent ; on passe de l’une à l’autre. C’est de plus en plus étroit ; même avec le brouillard et la neige, c’est magnifique. La route est d’ailleurs une merveille d’ingénierie. En fait, elle est quasiment tout le temps suspendu. Impressionnant ! Le problème, par contre, c’est la neige qui commence à s’accumuler sur la route…
Et puis soudainement, on entre dans une nouvelle vallée. Beaucoup plus large, et surtout, les nuages disparaissent, et le soleil réapparaît ! Malheureusement pas pour très longtemps. Il retourne se cacher au début de l’ascension du col de Vail. Et là, ça se dégrade. Vite. Très vite.
Mais Pourquoi Pas ?, malgré ses 20 ans, et ses quasiment 160 000 kilomètres est un véritable héros. Il grimpe ; lentement, mais sûrement, faisant preuve d’un courage à toute épreuve. Et le passage du col nous fait pousser un grand soupir de soulagement. 3231 mètres, c’est pas n’importe quoi !
La route se dégage, on respire. Ça redescend. J’imagine que le pire est désormais derrière nous. Les panneaux sur le bord de la route indiquent pourtant que les chaînes sont obligatoires, pour les véhicules commerciaux toujours, pour passer le tunnel. Un tunnel ? Quel tunnel ? Aucune idée… la neige redouble… la pente est de plus en plus raide. La route de plus en plus couverte. Je suis bien conscient que j’ai de moins en moins de contrôle. En même temps, ce qui m’inquiète, ce n’est pas le Pourquoi Pas ?. Je sais quand même relativement bien ce que je fais, et à 15 kilomètres heures, c’est pas vraiment grave. Non, le problème, c’est ces idiots qui se croient invincible dans leurs énormes pickups, et qui roulent à 100 kilomètres heure, sans se poser de question.
Une première voiture est bloquée sur le bord de la route. Trop de neige, trop de glace, ça patine trop, la pente est trop raide. Une dépanneuse est déjà là. Juste après, il y a un groupe de 4 ou 5 voitures. Bloquées également. En fait, il y a trois catégories de voitures. Celles qui sont parfaitement équipées, et qui montent sans problème, mais qui n’ont pas le choix de ralentir désormais, entre le blizzard et les voitures dans tout les sens ; ceux qui comme nous monte péniblement, mais monte. Et ceux qui ne montent plus du tout. Il n’y a pas à dire, tout ça est extrêmement stressant. Je sais que si on s’arrête, on ne redémarre pas. Je maudis les chasses neige qui ne passent pas. Je maudis les idiots qui roulent aussi rapidement. Et surtout, je répète inlassablement des mots d’encouragement à Pourquoi Pas ?. J’en suis fier de mon petit van, qui continue de monter, envers et contre tous. 13 km/h. Il y a de moins en moins de véhicules en train de rouler. 10 km/h. Le van dérape de plus en plus, mais continue de monter. Je me demande si c’est prudent de continuer d’avancer. Est-ce que c’est plus prudent de s’arrêter au milieu de tout ça, pas sûr ! Pas vraiment le choix de continuer d’avancer. 8 km/h. Le van fait ce qu’il veut ; le volant ne sert plus vraiment à rien. 5 km/h. Le moteur patine tant et plus, je surveille la jauge, mais il ne semble pas surchauffer. 2 km/h. J’ai vraiment les nerfs à bloc ; la pente semble se calmer un peu. Pas loin. Juste au prochain virage. 1 km/h. J’y crois encore. C’est juste là. J’ai le van le plus formidable de tout les petits vans à pois verts. Le van n’avance plus. Quelques dernières petites avancées, petit dernier soubresaut d’espoir. Et soudainement, le van part en marche arrière. Ça, c’est pas prévu. La pédale de frein ne répond plus. Le volant ne tourne plus du tout. Quart de seconde de panique, avant de comprendre que le moteur à caler. Je mets le van sur parking. Il s’arrête. La fumée qui sort du capot résume le problème. Surchauffe. Note plus tard : la jauge de température n’est pas tout à fait exact. On se regarde. Le van est sur le bord de la route. Il reste deux voies disponibles pour les voitures, qui peuvent donc continuer à passer. Avec les warnings et les phares, il est parfaitement visible. Il ne reste pas grand chose à faire, si ce n’est attendre. Je maudis une fois de plus les chasses neige. Il me semble que dans une zone de montagne, il y a l’équipement nécessaire pour éviter un tel chaos…
Une dépanneuse arrive, s’arrête. Le gars nous offre un lift pour le haut de la montagne : il y a là un grand parking, juste avant le tunnel. Après, ça fait juste descendre. 200$. Je n’ai pas d’assurance pour ça ; mais tout simplement aucun moyen de négocier. Donc pas le choix d’accepter. On va pas non plus rester ici en attendant le dégel… le van se retrouve à l’arrière de la dépanneuse. On n’a même pas besoin de sortir du Pourquoi Pas ?. Ride originale et intéressante ! Danielle a pas mal le même sens de l’humour que moi, et on rigole quand même beaucoup de tout ça. Savoir que de toutes façons je finirais par rire de tout ça plus tard, autant commencer à en rire plus tôt ! C’est juste 200 $. Le van n’a rien, et l’énorme camion ne nous a pas rendu dedans. Tout va bien, la vie est belle. Et puis monter en dépanneuse, c’est quand même beaucoup moins pénible !
On arrive en haut, il y a en effet un tunnel. Et un panneau juste avant. 11158 pieds. 3400 mètres. Ouais, bon, quand même ! Sauf erreur, il me semble bien que c’est la première fois que le Pourquoi Pas ? monte aussi haut ! Enfin avec moi. Un peu frustré quand même par le coût de la dépanneuse. Frustré un peu aussi par le fait que j’avais vérifié les prévisions météos, et qu’ils n’annonçaient pas de blizzard. Mais bon, voilà. Tout le monde est en vie, j’aurais peut être fait la même chose en sachant que la météo était mauvaise, et le Pourquoi Pas ? redémarre sans problème. Juste une petite surchauffe. Il a du mal à quitter le parking et à se rengager sur l’autoroute, mais une fois sous le tunnel, ça roule à nouveau parfaitement. Et de l’autre côté, on ne fait plus que descendre. La route est mauvaise, mais c’est quand même plus simple de descendre. On y va tout doucement tranquille, et ça se fait sans problème.
On est quand même bien content quand ça se dégage à nouveau ! On continue à descendre, on rerespire, le stress s’en va petit à petit. Mais Lawrence ce soir, je n’y crois plus vraiment.
Beaucoup de stress pour moi, encore plus pour Danielle, qui en plus a beaucoup de raisons de stresser sur son retour au Kansas. On prend donc une sortie, histoire de s’arrêter un peu, et de se faire un chocolat chaud pour se changer les idées. Le hasard nous fait sortir juste là où il faut pour aller voir la tombe de Bufalo Bill. Le nom est connu, mais je n’ai aucune idée de si c’est quelqu’un de bien ou pas. Mais bon, on est là, alors pourquoi pas ? Il y a aussi un musée, mais l’entrée étant payante, on ne saura rien de plus sur ce monsieur. Mais on aura vu sa tombe. C’est toujours ça.
Les rocheuses américaines, c’est comme les rocheuses canadiennes. Un mur à la fin d’une plaine gigantesque. Et là, on est juste sur la dernière bosse du mur. À l’infini devant nous, la pleine. Juste à nos pieds, Denver. Rien d’inspirant ! Pas même la brasserie Coors, qui brasse l’une des pires bières d’Amérique du Nord.
Comme on a quitté l’autoroute, la descente sur la plaine se fait sur une toute petite route magnifique, qui nous permet de vraiment admirer le paysage.
Il est 16h30 quand on arrive dans Denver. On traverse la ville au début de l’heure de pointe ; dernière petite dose de stress pour la route. Pourquoi Pas ? en profite pour fêter son 160000e kilomètre, mais il n’y aura pas de photos pour l’occasion. Pas au milieu d’une brettelle d’autoroute !
17h, il fait nuit noire. On roule.
20h, ça roule toujours.
À un moment, on quitte le Colorado. Nous voilà finalement au Kansas. Plus que 650 kilomètres.
22h. Danielle dort depuis un moment. Moi je commence à fatiguer un peu. Le premier café n’a pas été suffisant. Le deuxième aide un peu.
Minuit. Il n’y a plus aucune voiture sur la route. Il n’y a rien. Juste du plat, et des étoiles. Je me surveille énormément. Fatigué, mais ça va.
1h du matin. La fatigue est partie. Le deuxième café a sans doute aidé. Mais surtout, je suis finalement dans mon état de relaxation complète et totale. Cet état que j’aime tant. Si agréable. Plus personne sur la route, ça avance tout seul. Je m’arrête régulièrement, pour faire quelques pas, m’étirer, et repartir.
Traverser le Kansas de nuit est une expérience relativement intéressante. C’est plat. Il n’y a rien. Juste des antennes, plantées régulièrement (sans doute pour les cellulaires) et qui clignotent en rouge. Ou en bleu. Ça dépend. Régulièrement, également, on traverse une ville. À chaque fois, ça ressemble à une aire d’autoroute géante. Station service, petite boutique 24h, une grosse usine, quelques maisons. Tout ça à espace régulier. Comme si l’installation s’était fait régulièrement, étape par étape. On avance un peu plus dans le vide à chaque jour. Facile d’imaginer toutes ces familles, rêvant d’un monde meilleur, mais perdu au milieu d’un vide qui n’en fini plus.
3h30 du matin, je quitte l’autoroute. On ne va pas à Lawrence, mais à Ottawa, chez les grands parents de Danielle. Ils sont prévenus que demain, à leur réveil, il y aura peut être un van dans leur cour.
4h30 du matin, on arrive à Ottawa.
4h45, nous voilà finalement chez les grands parents de Danielle. Loin de la ville, petite maison perdue au milieu de nul part. Accueilli par un chien qui semble relativement gros et pas sympathique. Pas de problème, on ne sortira pas du van.
4h50, allongé, bien confortablement. Je m’endors bien vite, après un résumé des épisodes du jour. Un réveil sous la neige, un col à 3200, un col à 3400, un voyage en dépanneuse, une surchauffe, une visite à la tombe de Buffalo Bill, la traversée du Colorado et du Kansas… et j’ai roulé 1450 kilomètres en 21 heures… et il en reste bien plus que ça jusqu’à Montréal ! Dur !
Bryce Canyon
Alors la conclusion, après la nuit, c’est qu’en dessous d’une certaine température, le chauffage ne marche plus. En fait, la soufflerie marche encore, mais plus la flamme. Donc non seulement il n’envoie plus d’air chaud, mais en plus il envoie de l’air froid du dehors. Donc je me suis décidé à finalement le fermer, vu que c’était plus pire qu’autre chose. On a eut la confirmation un peu plus tard : la température est descendue à -13 cette nuit. Dans le van, pas de chauffage, c’est quand même pas mal très limite. On a survécu quand même, mais j’ai eut le bout du nez pas mal bleu juste avant le lever du soleil. Du coup, on a fini la nuit avec les ronds de la gazinière allumé. C’est toujours mieux que rien !
La bonne nouvelle, c’est que ciel est magnifique dehors. Grand ciel bleu, et grand soleil chaud, qui fait un bien fou. D’ailleurs, je reste un moment au soleil à décongeler. Et je suis pas le seul à avoir besoin de décongellation ! Dans l’ordre : une bouteille de deux litres de paraffine liquide qui dormait 40 centimètres en dessous de nos têtes, la condensation congelée à l’intérieur de la vitre du passager, et le réservoir de propane du Pourquoi Pas ?…
La bonne nouvelle, par contre, c’est que ce matin le van démarre sans le moindre problème. J’étais un peu inquiet pour la batterie, mais il semblerait qu’il y avait aucune inquiétude à avoir à ce niveau là. Le Pourquoi Pas ? est une brute qui ne craint rien ! Élevé au Québec, il lui en faut plus pour être impressionné !
Les passagers décongelés remontent en voiture, et prennent la route en direction de Bryce Canyon.
On s’arrête à une station service/motel/camping où je demande à une vieille madame des plus charmantes si je peux faire le plein d’eau. Elle accepte gentiment. Le temps de remplir le réservoir d’eau (environ 3 minutes) je suis à nouveau entièrement gelé. La madame était vraiment sympathique, et j’ai envie d’un chocolat chaud. J’ai tout ce qu’il faut dans le van, mais j’ai bien envie de profiter du luxe du monde moderne. On rentre dans la station service à nouveau, et on s’installe à une table avec un chocolat chaud, un café, et des biscuits. Ça fait un bien fou ! Je discute un peu avec la madame, à qui je demande si ce temps est habituel. Elle me répond que non. Normalement, ils ont encore plus de neige à ce moment là. Bon, c’est vrai qu’on est quand même à 2500 mètres, mais on reste pas mal dans le sud. Ça reste donc surprenant pour moi !
Et puis finalement, on arrive dans Bryce Canyon. Depuis que j’ai entendu ce nom, je ne peux pas m’empêcher de penser au logiciel que j’utilisais pour faire des images en 3D. Un logiciel qui s’appelait lui même « Bryce », et que j’aimais beaucoup. Sa spécialité : la création de paysage. Il offrait énormément de textures, et de type de relief extrêmement intéressant. J’aimais bien ce qu’il permettait de faire. Pour moi, c’était des paysages fantastiques vraiment originaux. Je me rends compte, depuis que j’ai mis les pieds en Utah, que l’origine du nom de Bryce est très claire. Et que les paysages que je pensais fantastique à l’époque où j’utilisais les logiciels sont en faits parfaitement normaux quand on se promène dans la région. C’est quand même surprenant de se retrouver à l’intérieur d’un logiciel de 3D je trouve !
Le parc national est pas très grand. Vu la température, on n’est pas plus motivé que ça à faire de la randonnée, et on prévoit donc de le faire en une journée. L’idée est de suivre la route jusqu’au bout, en s’arrêtant à tout les points de vue. Et si vraiment on voit un endroit qui nous plaît, partir pour une petite balade.
La première partie du canyon est en même temps la plus impressionnante. Petite précision avant tout : je pensais, du fait du nom, et de la visite récente à Zion, qu’on allait être au fond d’un canyon. En fait, non. On suit une crête, sur le bord de laquelle se trouve plein de formations géologiques des plus intéressantes. La plus impressionnante de toute, donc, qui se trouve prêt de l’entrée du parc, est l’amphithéâtre, sur lequel on peut avoir plusieurs points de vue :
Rendu au deuxième point de vue, je vois un photographe avec une lentille particulièrement sympathique, sur un énorme trépied. Je commente en disant qu’il a du beau matériel. Il me propose de l’essayer, et j’accepte avec le sourire. Tout de suite après, vu son accent, je lui propose de passer au français, ce qu’il accepte de bon coeur.
Il s’appelle Stéphane, et est photographe professionnel à Bordeaux. Il est sur un voyage relativement long aux États ; commencé à Boston, puis dans les rocheuses, avant de continuer jusqu’à Los Angeles puis de revenir dans le Colorado. On discute un peu technique, quand un couple arrive, et salut tout le monde d’un joyeux « bonjour », avant de se joindre à la conversation. On est ensuite rejoint par une autre fille, Armelle, qui vient de Brest. Danielle rigole énormément, de se retrouver entourée de français, et de ne pas comprendre. Sans doute une préparation pour Montréal ! En parlant de Montréal, le couple y est allé. Ils n’ont pas aimé. « C’est trop américain, pas assez français ». Exactement le genre de commentaires qui me donne le goût de mordre. Bien sûr que c’est américain Montréal. On est en Amérique du Nord, pas en Europe ! La fille a vécu 5 mois à Montréal, mais fait des grands yeux ronds quand je dis que c’est une capitale gastronomique. Encore une qui s’est contenté d’aller manger de la poutine à la banquise… et puis finalement, le gars rajoute une couche « on était surpris, on pensait que les québécois étaient plus accueillants ; l’image des canadiens, qui vivent dans leur cabane, et qui accueille tout le monde avec le sourire ; on pensait que les gens allaient nous parler dans la rue ». Je commence à expliquer que Montréal c’est une capitale économique ; qu’ils auraient pu aller en Gaspésie ou au Lac St Jean s’ils voulaient un contact plus humain. C’est pas au milieu de la deuxième plus grande ville francophone du monde qu’ils allaient voir des cabanes. Enfin… ils ne restent pas longtemps, et ça m’évite d’avoir à les jeter par dessus la barrière. Ça aurait fait pas beau dans le parc après !
Stéphane et Armelle sont encore là, et on discute encore un peu. Le contact avec eux est beaucoup plus agréable ! On parle encore un peu boutique avec Stéphane, et on échange nos coordonnées. Armelle, de son côté, doit être à Montréal début décembre. Elle repart donc elle aussi avec mon adresse email, si elle a besoin d’un guide touristique. Ça lui évitera de terminer à la banquise. Grrrrr !
C’est bête, mais ça fait du bien de parler français un peu. Je sais que l’une des raisons qui me donnent envie de rentrer à Montréal, c’est de pouvoir recommencer à parler français. Je répète depuis bien longtemps que l’anglais n’est plus un problème pour moi, et c’est de moins en moins le cas, surtout avec Danielle. On a de longues discussions philosophiques ensemble, sur la création, sur les personnages de livres qui ont leur vie propre au détriment de l’auteur, sur la difficulté d’expliquer un processus créatif à des non créatifs, etc… bref, non, l’anglais n’est plus un problème. Mais le français reste ma langue maternelle, celle que je maîtrise parfaitement (sauf à l’écrit, diront certains lecteurs !) ; et le parler régulièrement avec des gens intéressants me manque !
D’en haut, on voit une balade qui permet d’aller se balader en bas. Pas trop longue (4 kilomètres aller retour), ça nous fait quand même bien envie, et on se décide donc à jouer un peu les sportifs. Histoire de voir de plus prêt ces magnifiques formations rocheuses. La balade est l’occasion d’une autre longue discussion philosophique sur la créativité, et j’en profite aussi pour transmettre à Danielle quelques rudiments de français. Une façon très intéressante de découvrir à quel point ça peut ne pas être évident d’apprendre une langue à quelqu’un d’autre ! Par où je commence « je m’appelle Sébastien » ? Ou « je tu il elle on nous vous ils ? ». Ou peut être la conjugaison des verbes du premier groupe ?
Un peu plus loin, c’est un suisse qui nous dit « bonjour ». Oui, trahit par le van. Et encore après, quand Danielle pose une question à un groupe de personnes qui lui répondent d’un regard ébahis, elle enchaîne par un « do you speak french » qu’ils comprennent et acquiescent rapidement. Bref, si vous êtes en manque de français, il semblerait que Bryce Canyon soit un bon endroit pour en trouver ! Surprenant, parce qu’à Zion, il n’y en avait quasiment aucun…
Si la balade dans l’amphithéâtre valait vraiment la peine, la suite nous laisse un peu plus sceptique. C’est beau, c’est très beau même. Je ne chercherais pas à dire le contraire. Mais c’est un peu trop « la même chose », et surtout, ça ne rivalise pas avec le premier aperçu. Il y a énormément de point de vue, alors on s’arrête régulièrement, on fait quelques photos, et on repart. Le parc ne semble pas attendre autre chose de nous. Les autres balades ne sont pas aussi prometteuses, et comme on est déjà en haut, on a un aperçu d’ensemble… alors ça permet de faire tout ça un peu rapidement, ce qui n’est pas plus mal non plus.
On croise à nouveau Stéphane, au dernier point de vue. On rediscute un peu. Il en profite pour me demander de faire une photo de lui, avec son matériel, et fait une photo de nous en échange. Quand il voit l’état de ma lentille, il hallucine complètement. Oui, ma bien aimée lentille a quand même beaucoup souffert de passer une semaine dans le désert, incluant une tempête de sable. Enfin, c’est un canoniste lui aussi alors il en profite pour utiliser une de ses lentilles à la place. J’admets, elle a un beau piqué la 17-40 de Canon ! Ça pourrait presque être une…. ah ! non, j’ai rien dit. Je remplacerais probablement ma 17-50 par une autre 17-50. Un jour.
Il se fait tard. On reprend donc la route avec Danielle. J’hésitais à faire le détour par Arche, mais vu les commentaires de Stéphane, on va aller jeter un oeil. On n’est parfaitement dans les temps sur le planing de fou qui nous attend de toutes façons, c’est donc parfait.
On roule un peu, mais pas très longtemps. Le soleil se couche déjà, ce qui n’empêche absolument pas le paysage de rester magnifique !
On est rendu dans Giant Staircase National Monument. Je suis pas tout à fait sûr que les permissions de camping soient les mêmes dans un National Monument quand une National Forest, mais mon instinct me dit que c’est pareil. Alors quand on trouve un petit chemin qui s’éloigne un mini peu de la route, on s’y engage. Ça sera parfait pour la nuit.
Au moment de garer le van, je réalise quelque chose qui, je l’avoue, me fait quand même assez plaisir. Même si je ne suis pas fan des aires d’autoroute, je pense que c’est notre dernière nuit au milieu de nul part. En principe, à partir de demain, on devrait dormir sur des aires d’autoroute, ou chez des gens (amis et famille de Danielle, amis de moi, couchsurfing, etc…). J’aime énormément dormir au milieu de nul part comme ça, mais il n’en reste pas moins que j’ai du mal à ne pas m’imaginer encore à Happy Camp… une aire d’autoroute me paraît plus tranquille !
L’autre bonne nouvelle, c’est que ce soir, il fait moins froid, et le chauffage remarche parfaitement bien. On devrait être bien confortable toute la nuit. Ouf !
Alors pour faire changement, on termine par une petite soirée tranquille à discuter / écrire / bloguer / lire / dessiner / travailler. Tâches réparties en fonction des spécialités de chacun !
Parce que des fois, il faut bien travailler
On a survécu à la nuit. Il faut reconnaître que le chauffage a grandement aidé ! Quand on se réveille, tout est blanc partout, tout est joli. Les prévisions météo disent que le temps va être couvert toute la journée, avec possibilité d’averses de neiges, et que demain, le ciel sera tout bleu tout beau. Ça tombe bien, parce que j’ai quelques petits projets à faire aujourd’hui. Et puis il y a toujours ces petites contraintes logistiques. Genre prendre des douches, laver le linge, et préparer les plans tops secrets. Bref, aujourd’hui, on prévoit passer la journée en ville.
Pourquoi Pas ? est un tout petit peu moins enthousiaste à l’idée de démarrer ce matin, mais il est toujours fidèle. Il demande juste un quart de seconde en plus. Il y a trois centimètres de neige sur le parking. Sur la route, tout n’a pas été complètement déneigé. Je fais donc un petit test tout simple. Bloquer les freins alors que je roule à peine à 10 kilomètres heure. Pourquoi Pas ? réagit exactement comme je m’y attendais, il part tout de suite de travers. Après tout, les pneus doivent commencer à se faire vieux.. je leur ai pas ajouté 20000 kilomètres pour rien… et puis ça n’est pas des pneus d’hiver, alors bon. Je sais qu’il faut que je fasse attention ; c’était déjà prévu de toutes façons. N’empêche que ce paysage de montagnes rouges, sous la neige, même si c’est étrange, c’est beau !
Le reste de la journée passe lentement, et froidement. On lave le linge, on se douche, Danielle lit et se repose, moi j’essaie d’être inspiré et je travaille.
Et puis on confirme un certain nombre de petits détails techniques également. Par exemple, pour rentrer au Canada, les américains ne sont pas obligés d’avoir un passeport. Danielle n’en a pas. Ils peuvent rentrer avec une preuve de citoyenneté (extrait de naissance) et une preuve d’identité (permis de conduire). Ce qui est valide uniquement par voix terrestre. Il se trouve que :
1- Le Pourquoi Pas ? reste pour le moment très attaché à la route
2- La colloc de Danielle peut lui envoyer un extrait de naissance en express post
3- Estelle et Olivier n’ont rien contre le fait que j’arrive à deux plutôt qu’à trois
4- Danielle a bien envie de jeter un oeil à Montréal
Donc voilà… petit changement dans les plans. On se supporte toujours bien, on ne se tape toujours pas sur les nerfs, et l’idée de terminer le voyage ensemble nous plaît bien. Danielle va donc venir faire un petit tour à Montréal. En fait, l’une des motivations est musicale : Danielle est en train de terminer 6 CDs. Oui, elle est productive ! Mais certaines de ses chansons pourraient gagner à être réenregistrer, notamment le piano. L’avantage de mon piano numérique, à Montréal, c’est que l’enregistrement est d’une qualité parfaite sans se compliquer la vie à faire des réglages. L’avantage d’avoir des contacts à Montréal, c’est que je pense pouvoir lui avoir accès à un petit studio où elle pourrait refaire quelques enregistrements. Bref, l’idée lui plaît énormément !
La météo vient un peu changer le plan de vol aussi. Le froid qui nous tombe dessus me démotive un peu à jouer les touristes. Cette nuit, ils annoncent quand même -13 ! Autant rentrer à Montréal, il fait plus chaud ! Dans la journée de demain, il devrait faire +1. La randonnée dans ce contexte, même si le paysage est magnifique, perd un peu en intérêt. Je pensais profiter un peu plus du sud de l’Utah, mais on va probablement se remettre sur la route un tit peu plus vite que prévu. On arriverait un peu plus tôt à Lawrence, pour permettre à Danielle de quand même voir un peu sa famille et ses amis, et elle se réarrêterait sur le chemin du retour. Ça semble un bon plan. Et puis moi j’ai les projets qui s’acculent dans ma tête, et j’ai vraiment envie de commencer tout ça ! Et d’en finir certains aussi ! Un certains nombre de livres, quelques dizaines de milliers de photos, quelques contrats… bref, le besoin de rentrer se fait de plus en plus ressentir. Donc demain, Bryce, et ça devrait terminer la partie très touristique. Ensuite, on roule.
À la fin de la journée, je fais une petite épicerie pour la soirée. Il fait froid, c’est pas motivant… et puis au moment de démarrer, Pourquoi Pas ? se fait vraiment très hésitant. La batterie semble souffrir pas mal du froid, ce qui m’inquiète un peu… s’il fait réellement -13 cette nuit, dans quel état est-ce qu’on va la retrouver demain ? Bon, le pire qu’il puisse arriver, c’est que le van démarre pas. On est sur le bord d’une route, il y a quand même du passage, on pourra faire signe aux voitures, en espérant trouver quelqu’un pour nous aider à démarrer. Rien de catastrophique donc.
On rentre à notre petit parking/camping, où je prépare un chocolat chaud. Il reste juste assez d’eau pour ça… bon, bin on n’a plus d’eau non plus. Ce sont tout ces petits détails ; rien de bien catastrophiques ; juste des mini petites gênes… qui font que la perspective de rentrer me plaît bien. Me libérer un peu de tout ces soucis. Bon, je sais que j’en aurais beaucoup d’autres à Montréal, mais c’est bien de varier les soucis de temps en temps !
Enfin… il n’empêche qu’avec le chauffage qui marche, on est bien au chaud dans le van ! Et puis le chocolat chaud + beurre de peanut + brandy + crème fouettée, ça aussi ça réchauffe bien ! Pis ça endore un peu aussi. J’ai l’impression que je ne m’éterniserais pas pendant des heures ce soir !
Le changement de planète
Et là, soudain, je me dis que finalement, être revenu en arrière et ne pas avoir dormi sur un chemin de terre au milieu de la forêt, mon dieu que c’était une bonne idée !
Il fait froid, ce matin, au réveil. Et tout ce blanc autour, alors que dans ma tête je suis dans le désert (Nevada = désert, non ?) c’est extrêmement perturbant. On est dans les 2200 mètres, c’est pas si haut, et on est encore bien dans le sud… même à Montréal et à Québec, je suis pas sûr qu’ils en ont autant ! Bon, d’accord, j’aime la neige, et c’est beau. Et puis la route reste tout à fait praticable, donc ça ne sera pas un problème. Danielle est heureuse aussi. Ça fait un bon moment qu’elle n’a pas vu la neige : s’il neige beaucoup au Kansas, à Portland si près de la côte, c’est une autre histoire. Alors on a froid, mais on apprécie quand même. Le gars en vélo, par contre, qui lui s’en allait en Californie, il se peut qu’il soit moins heureux !
La météo et le non changement au niveau du paysage confirme, par contre, qu’on a pris la bonne décision en roulant beaucoup hier. Autant l’avoir fait de nuit. Parce qu’aujourd’hui, plus ça change, plus c’est pareil. Et les lignes droites de 15 kilomètres, bon, comment dire… à 90 kilomètres heure, ça veut quand même dire 10 minutes sans tourner le volant. C’est long !
Et soudain, paf ! Ce qui semble être un aperçu de ce qui nous attend un peu plus tard. Qu’est-ce qu’il fait ici, ce canyon, alors que c’est le style « South Utah », je sais pas trop. N’empêche que… bin oui, il est magnifique ! Dommage que ce soit sous la pluie par contre, mais bon. Des fois, j’arrive aussi à ne pas me plaindre, et à tout simplement admirer. Cathedral Gorge, le nom est plutôt bien choisi !
Ce bref mais magnifique petit aperçu nous encouragera à continuer joyeusement. Dans le lointain, le ciel semble peut être éventuellement se dégager. Les prévisions météo sur Zion sont à la tempête pour aujourd’hui, mais au soleil avec passages nuageux pour demain. C’est plutôt encourageant. On arrive finalement dans l’Utah. L’Utah qui se trouve dans la « Mountain Time Zone ». Ça veut dire qu’on regagne aujourd’hui l’heure perdue hier. Non, le contraire. On repère aujourd’hui l’heure gagnée hier. Ou je sais plus, je me mélange tout le temps. Bref, tout ça pour dire qu’il est pour nous à nouveau la même heure qu’il était. Je me demande bien pourquoi j’ai changé l’heure de mon appareil photo…
Il nous reste une dernière vallée à traverser, avec au loin, la promesse du soleil. On s’y attelle sagement, sans se poser vraiment de questions sur la neige qui tombe.
Un dernier virage, et repaf, en pleine face. Une petite demi heure plus tôt, j’expliquais à Danielle que le van pouvait se transformer en vaisseau spatiale, sauf qu’en ce moment, pas de vitres arrières, je peux pas vraiment aller me promener dans le vide. Sauf que là, je me demande si en fait, on vient pas d’être catapulté quand même sur une autre planète. Genre mars, complètement au hasard.
Une montagne avec des bourrelets, moi, personnellement, ça me surprend !
Alors ici, ça s’appelle « Snow Canyon », et on l’a pas vu venir du tout. Ça surprend quand même pas mal. Mais on y reste, on s’y ballade, on admire, on rigole sans raison tellement c’est magnifique. Rester sans voix, complètement fasciné par un paysage, ça ne m’était pas arrivé depuis… bon, okay, pas depuis si longtemps que ça. Yosemite et Crater Lake ne sont pas très loin. Pas plus que le mont Robson. Mais quand même… là, j’ai bien l’impression que ça dépasse tout ce que je connais… fascinanbuleux ? En fait, je me serais éventuellement attendu à marcher sur du sable orange en Australie. Des dunes pétrifiées oranges, c’était pas prévu. Et des mélanges de couleurs orange/vert de la sorte, c’est juste… wo !
Évidemment, un paysage de même, ça demande aussi de faire quelques panoramiques…
Bon, d’accord. Un petit dernier, mais c’est juste parce que vous le demandez !
Au moment de quitter le parc, il y a une madame dans la guérite. J’ai bien vu qu’il fallait payer à l’entrée, mais j’ai ma passe magique des parcs nationaux ; j’ai aucune idée si elle marche pour ce genre de parc. La madame me dit que non. Je veux lui poser une question, mais je sais pas pourquoi, les mots se mélangent. Trop de choses dans ma petite cervelle, là maintenant peut être. La madame me regarde avec un petit air dédaigneux, et nous dit qu’on peut y aller. Bon, bin passer pour un idiot vient de me faire économiser 6 $. Ok…
Juste après le parc se trouve une petite ville. Le style des maisons me plaît beaucoup. J’ai l’impression d’être de retour en Arizona, ou dans le sud de la Californie, avec ces maisons en terre, de forme carrée, mais aux coins arrondis. J’aime beaucoup ce style. Par contre, ce que j’aime beaucoup moins, ce sont les murs tout autour.
Il y a un certains nombre de belles maisons, mais toutes sont cachées derrière des murs, derrière des barrières, dans des rues privées. Le genre de petite communauté parfaite où l’on ne veut surtout pas voir apparaître un étranger, parce que les étrangers sont tous des terroristes vilains pédophiles voleurs venus manger le pain des américains. Autant le paysage est magnifique, autant mes préjugés -que ce soit en Arizona, en Utah, au Texas ou dans le Nevada- sont relativement forts. Pas pour rien que je ne voulais pas dormir n’importe où au Nevada. En même temps, je suis parfaitement conscient que ce sont des préjugés, et que c’est dommage. Et j’ai bien l’intention de les briser un jour en prenant plus de temps dans la région, pour rencontrer les gens, leur parler, et me rendre compte qu’ici aussi, s’il y a beaucoup d’abrutis, il y a aussi des gens bien. Ça sera pour une prochaine fois par contre.
Petite pause internet rapide, où je vérifie l’arrivée d’un mini contrat urgent. On aime ça les mini contrats urgents. Ça met un peu de gaz dans le van, et si je veux le ramener jusqu’à Montréal, ça va me prendre encore pas mal de gaz. J’aurais donc un peu de travail à faire ce soir. Mais pour le moment, c’est très clair, on veut profiter du magnifique soleil qui vient de s’installer pour de bon semble-t’il. Le plan est simple : trouver un endroit où dormir, trouver une connexion internet pas trop loin pour le lendemain matin, et trouver tout ça le plus proche possible de Zion. Ça paraît jouable.
Plus on s’approche du parc, plus nos commentaires perdent en originalité. Alors on passe notre temps à trouver ça magnifique, fascinant, et à le répéter 5 ou 6 fois du kilomètre.
Au détour d’une courbe, je vois deux tentes sur le bord de l’eau. Ça m’interpelle. On fait demi tour. Il y a là un grand terrain, semi terrain vague, semi camping pas aménagé du tout. Aucune information, aucune demande de paiement. Juste une bonne quinzaine de voitures, un peu partout, et quelques tentes. Parfait. C’est toujours agréable de savoir où l’on va dormir.
On en profite ensuite pour aller faire un petit repérage rapide du parc, et récupérer une brochure d’informations. Le soleil est en train de disparaître, donc on ne restera pas dans le parc, mais au moins, on pourra prendre des notes. Au parking de l’accueil touristique, une dame vient me voir, et demande si elle peut signer le van. Moi c’est le genre de demande auquel je réponds toujours oui ; j’ai aucune raison de dire non. On discute un moment. Elle est très sympathique. Elle vient d’Irlande. Alors forcément, des ronds verts, elle n’avait pas le choix. Danielle, grande fan de Finegans Wake (de James Joyce) et du Book of Kells (oui, elle a été très jalouse d’apprendre que je l’ai vu en vrai) passe un moment à discuter avec elle.
Pendant ce temps, on a le droit à un coucher de soleil rouge sur des rochers rouges. Effet réussi !
On retourne au van, qui nous ramène sagement jusqu’au camping, où l’on s’installe tranquillement. Moi je me mets au travail. Danielle, elle, se met à la lecture. Et puis j’ai surtout énormément de photos à trier soudainement ! Et beaucoup de panoramiques à faire ! Que de travail, à nouveau, que de bloguer tout ça ! Mais en même temps, comme je l’explique à Danielle, j’aime ce petit exercice quotidien, le soir. Ça me permet de repasser toute la journée dans ma tête, de la revivre une deuxième fois, de la réapprécier une deuxième fois. Et de me rappeler que des fois, comparer le paysage du matin au paysage du soir, c’est quand même une expérience intéressante !
Allez… je vous le refais, encore plus facile pour vous aider :
Bonne fête Danielle !
Imaginez deux immenses montagnes, avec entre les deux un immense désert tout plat, tout sec. Je suis sûr que vous imaginez le potentiel éolien de la chose. Nous, on passe la nuit en plein milieu de ce corridor. Si pendant Burning Man j’ai eut le droit à quelques belles rafales, et à une jolie tempête de sable, je n’avais pas eut le droit à des vents d’une telle violence. C’est tout simplement impressionnant. Et, au bout d’un moment, inquiétant. Non, je n’ai pas vraiment peur que le van s’envole, même avec le toit ouvert. Il dépasse la tonne et demi avec tout ce qu’il y a dedans. Non, l’inquiétude est au niveau de ma vitre arrière, qui consiste en une nappe en plastique orange à 3$ au Wallmart, et un rouleau de ducktape. Ok, c’est solide le ducktape, mais quand même… c’est surtout que ça fait « flap flap flap » dans le vent depuis un bon moment. Et j’imagine perdre la vitre arrière, en plein désert, froid, de nuit, dans une tempête de sable. Ça pourrait rentrer dans la liste des expériences pas forcément positives. Et c’est sans compter le bruit de ce flap flap… bref, une raison de plus pour pas être content de ne plus avoir une vitre arrière en bon état ! Il y a quelques accalmies au niveau du vent, qui me permettent quand même de dormir un peu, mais je trouve que ça devient lassant de cumuler les mauvaises nuits… quand la pluie, à son tour, commence à tomber, je commence vraiment à le prendre mal. L’idée d’être enlisé au milieu du désert de Black Rock ne me tente pas vraiment non plus. J’aime bien le désert de Black Rock, mais bon, quand même… il pourrait faire un effort !
Et puis au final, on survit ! Oui, ça tombe raide, un peu, comme conclusion, après un suspens si insoutenable, mais que voulez vous… s’il est tombé quelques gouttes, le sol est tellement sec que ça ne paraît quasiment pas. Et mon bricolage à base de nappe et scotch est d’une solidité à toutes épreuves. Tant mieux ! Mais du fait de l’instabilité météo, la première chose qu’on fera au réveil, c’est de revenir plus prêt de la route. Là, je pourrais préparer un petit déjeuner anniversaire à Danielle. Je ne réalise qu’au moment de le faire mais si on considère que l’on s’est rencontré il y a tout juste deux semaines à un événement Burning Man, et que je lui ai fait des crêpes le lendemain matin, fêter son anniversaire avec des crêpes au petit déjeuner, sur la playa, semble parfaitement logique ! Évidemment, c’est moins sophistiqué. On fait avec les moyens du bord. Mais crêpes au brie, et crêpes au Nutella, ça marche toujours autant !
La pluie semble ne plus être au programme. Si le ciel ne se dégage pas, il est quand même moins menaçant. Et j’avais quand même envie de faire une vidéo de Danielle, en train de chanter au milieu du désert. Elle a quand même une chanson qui s’intitule « Thristy Fish » (poisson assoiffée) ; l’endroit semble se prêter à merveille à l’enregistrement d’un magnifique clip ! Évidemment, pour des raisons techniques, ça prendra un moment avant de voir le résultat final, mais il devrait y avoir de quoi d’intéressant à faire.
Comme on est là, on décide d’en profiter pour aller voir comment c’est de l’autre bord de la playa. L’autre bord de la playa, il est loin. C’est l’une des choses fascinantes dans le désert. Avec aucun point de repère, pas moyen d’estimer les distances. La traversée nous occupe un moment. Par contre, conduire dans ce genre d’endroit est un vrai bonheur. C’est plat, c’est infini. On peut tourner, avancer, reculer, aller où on veut, comme on veut. L’expérience est des plus amusantes. Qu’est-ce que l’on trouve de l’autre côté de la playa ? Un train !
Le chemin du retour, la playa dans le sens de la largeur mais dans l’autre sens, je le ferais assis sur le fauteuil du passager. Parce que tiens, pour une fois que j’ai une occasion de ne pas conduire ! Danielle deviendra donc la deuxième personne à avoir conduit le Pourquoi Pas ? depuis mon départ de Montréal !
De retour sur la route, on dit au-revoir à Black Rock Desert, puis à Gerlach et Empire, alors que l’on prend la route du sud, qui doit nous emmener vers de nouvelles aventures. C’est sympa de pouvoir refaire le même chemin qu’au moment de quitter Burning Man, mais cette fois-ci en voyant le paysage ! On fera quelques pauses, brèves, notamment pour admirer le lac Pyramide, mais sinon, on rejoindra rapidement la 50, avec qui on fera plus ou moins de kilomètres. L’itinéraire exact peut encore varier.
À partir de là, la route perd soudainement tout intérêt. Il fait gris, il pleut un peu, il pleut beaucoup, il n’y a pas grand chose à voir, sinon un grand désert plat. À priori, il y a aussi des jolies montagnes, mais on les perd la plupart du temps.
On discute un moment avec Danielle de la stratégie à adopter. Je suis d’humeur à rouler ; vue la météo, vu le paysage, qu’il fasse jour ou pas ne changera pas grand chose. Une longue étape aujourd’hui, manger du kilomètre pendant la nuit, nous donnera un peu plus de temps après, pour un paysage possiblement beaucoup plus intéressant. J’hésite encore un peu, je remets la décision en question une ou deux fois, mais des vérifications météo me confirment qu’à priori, on fait le bon choix. On prend donc la route la plus courte, et la plus rapide. Autre petit détail qui me motive à aller vite : les prévisions sont à la neige. Oui, j’ai arrêté de comprendre. Il pleut à verse, il va bientôt neiger, il faut que je révise ma vision du désert. Toute à la fin de la traversée, on a un col à 2500 mètres à traverser. Le van n’a pas de pneus neiges, autant éviter d’être pris dans une tempête de neige.
On perd au niveau paysage, on gagne par contre une expérience des plus intéressantes : la traversée du Nevada, de nuit, sous la pluie, par temps de brouillard, en écoutant la musique d’un film de zombies, histoire d’être bien dans l’ambiance. Comme je l’explique à Danielle, si jamais je vois une silhouette sur le bord de la route, les bras écartés, dans le doute, je l’écrase ! Mais bon, finalement il ne se passera rien de tel, pas de rencontre surnaturelle. On mange kilomètre après kilomètre. Ou plutôt je mange, pendant que Danielle se repose bien confortablement. Il y a quand même des injustices dans le monde du road trip !
Aujourd’hui, on a changé d’heure. Entre la pluie, le brouillard et le changement d’heure, il fait nuit noire un peu avant 17h. En même temps, ça renforce l’impression d’aventure. Quand on traverse la ville d’Eureka, je suis persuadé qu’il est trois heures du matin. Même chose rendu à Ely… et pourtant, après vérification, il est seulement 23 heures.
J’ai une hésitation à Ely. Le col à 2500 n’est plus très loin. Il y a une aire de repos juste avant, et une pas mal plus loin, qui implique une heure de route en plus, ce qui commence à faire tard. On pourrait aussi, tout simplement, passer la nuit à Ely, dans un parking. J’hésite, et puis je me dis que peut être l’aire de repos sera une bonne solution. À peine sorti de la ville, je me dis que c’est peut être une erreur, mais bon, maintenant qu’on est sur la route, essayons voir.
En fait, je ne me sens pas très « safe » ce soir. Je ne suis pas sûr de vouloir dormir n’importe où dans le Nevada. L’aire de repos, ou un endroit avec d’autres gens, me plairaient quand même plus. Surtout que peu de temps après être sorti de la ville, le panneau « veuillez dénoncer les personnes tirant depuis la route » n’est pas pour me rassurer. Au loin, je vois une zone plutôt bien éclairée. Ça correspond plus ou moins avec l’emplacement de l’aire de repos sur la carte. J’anticipe avec enthousiasme un endroit civilisé, plein de routiers, plein de vie, où l’on pourra dormir sans se poser de questions. Le panneau « zone de prison, autostop interdit » puis « pénitencier d’état prochaine à droite » me laisse imaginer que finalement, mon aire de repos n’est pas idéale. D’ailleurs, cette aire de repos, je la verrais jamais.
Par contre, je vois le panneau « National Forest », tout comme je vois le petit chemin un peu après. Je m’y engage. C’est un peu scabreux, mais ça passe quand même. Je tourne en rond dans les arbres, trouve un endroit plat. On parque le van, le passe en mode nuit. J’ai un très mauvais feeling. Déjà, la porte latérale ne ferme plus à clé, et je prends ça comme un mauvais pressentiment. Ensuite, on a roulé « juste » 15 kilomètres depuis la prison. Oui, on est rendu loin, mais je sais pas… y a un côté pas rassurant. Quand au petit chemin où on est, si jamais il neige cette nuit, c’est possible que l’on ne ressorte pas le van avant 2011, ce qui pourrait être gênant… alors finalement, avec tout ces sentiments négatifs, je préfère faire demi tour. C’est bête, je sais, mais je me sentirais mieux.
On revient donc 30 kilomètres en arrière, jusqu’à Ely. À l’entrée de la ville, il y a une halte routière. Je me gare bien confortablement à côté d’un camion Wallmart. Voilà… ça, il me semble, c’est beaucoup plus rassurant. Je me couche, fatigué, un peu plus de 600 kilomètres dans les jambes. Je m’endormirais sans problème, et rapidement.
J’ai passé le 20000e kilomètre depuis que j’ai quitté Montréal, un peu après Black Rock Desert.
De retour dans le désert
La nuit est on ne peut plus calme et tranquille. On entend bien un lointain camion de temps en temps, mais ils sont bien rares. De là à dire que c’est trop silencieux… non, n’exagérons quand même pas ! Hier, un peu tannés de la polenta, on avait sauté le petit déjeuner. Comme on a fait l’épicerie, par contre, on peut recommencer à varier un peu les petits déjeuners, et c’est vrai que ça fait du bien de commencer la journée avec des granola (muesli). Ça fait changement !
Le ciel est grisailleux quand on quitte notre petite forêt sympathique, qui nous a si bien tenu compagnie pendant la nuit. On ne roule pas très longtemps avant que la forêt disparaisse, nous précipitant dans le désert typique de la région. Un truc pas complètement totalement désertique donc. Il reste quelques mini plantes bien sèches qui poussent au milieu.
On quitte une fois de plus la route principale (qu’on avait rejoint en quittant une route principale que l’on avait rejointe en quittant une route principale), pour prendre la direction de Fort Rock. Petit village qui doit son nom à un caillou voisin. Un caillou parfaitement bien nommé soit dit en passant. De loin, on voit d’abord apparaître une palissade. Pour découvrir ensuite que la palissade n’est qu’un côté d’un magnifique fer à cheval. Un endroit parfait pour installer une armée, et défendre l’endroit contre des envahisseurs. Bon, il faudrait juste une armée et des envahisseurs, et c’est pas avec les quatorze habitants et demi de la région que l’on fera quelque chose… mais c’est toujours ça, en théorie.
On se promène un peu à l’intérieur de cette magnifique formation ; on escalade un tit peu pour varier les points de vue, on regarde, on admire. On se plaint un peu du ciel gris et de la température un peu fraîche. On est quand même dans un désert, non ?
Et puis en version panoramique, quand on regarde vers l’extérieur :
Et quand on regarde vers l’intérieur :
On reprendra ensuite la route, vérifiant rapidement si la ville de Fort Rock n’aurait pas un téléphone publique, mais ça n’est pas le cas. Peut être que notre étape suivante, Christmas Valley, sera plus civilisée.
Christmas Valley est en effet un peu plus grande que Fort Rock. D’ailleurs, à peine entrée dans la ville (ça devient vraiment difficile d’appeler ce genre d’endroit une ville, vu qu’en fait, c’est surtout un plus grand nombre de maisons, plus proches les unes des autres, mais qui ne ressemble vraiment pas à ce que j’appellerais une ville. Ou un village) on trouve un bureau de poste. J’avais quelques timbres à acheter et des cartes à envoyer. C’est donc parfait. Le vendeur n’est même pas plus surpris que ça que je demande des timbres pour le Canada et la France. Il doit avoir l’habitude, sans doute. Sur le parking, par contre, on me demande si je viens de Colombie Britannique. La question me surprend un peu, vu que le van est très clairement immatriculé Québec. Je réponds donc que je viens de Montréal, ce qui semble impressionner mon interlocuteur, qui me dit « so you’re french. Bonjour ». Oui, même au fin fond de l’Oregon, les gens essaient de mettre un ou deux mots de français quand ils me parlent !
Je m’arrêterais à nouveau, juste après, alors que je vois une cabine de téléphone à côté d’une épicerie. J’en profite donc pour faire un petit appel outre-atlantique. Avec les fuseaux horaires, et les changements d’heures récents, je ne suis pas tout à fait sûr de ne pas appeler au milieu de la nuit, mais à priori mon calcul était correct, et je ne réveille personne. Pendant que je parle au téléphone, une voiture s’arrête. Un couple en descend, regarde le van en souriant. M’entend parler français au téléphone, ils font le rapprochement assez facilement, et me salut d’un mouvement de tête, l’air un peu déçus de ne pas pouvoir me parler. Ils croiseront Danielle à l’intérieur de l’épicerie, et en profiteront pour demander confirmation si je viens bien du Québec. Un imposteur est si vite arrivé !
Amusant, quand même, de constater que l’année passée à la même date, j’arrivais à Tucson, en Arizona, à la fin d’un road trip de 6000 kilomètres en quelques jours à peine. Cette année, je suis encore plus perdu au milieu de nul part, au milieu d’un road trip encore plus fou, et beaucoup plus long… que sera l’année prochaine ?
Danielle profite de son passage à l’épicerie pour récupérer un pamphlet sur des dunes qui seraient, semble-t’il, pas trop loin d’ici. La photo en couverture est des plus inspirantes, l’explication pour y aller est facile (tout droit pendant 12 kilomètres, à gauche, tout droit pendant 12 kilomètres, à droite, tout droit pendant 6 kilomètres). On décide donc d’y aller. Les indications sont parfaites exactes. Quand ils disent tout droit, c’est tout droit. Bon, en même temps, vu la géographie des lieux, je comprends assez parfaitement la volonté de ne pas mettre de virage, mais peut être que des fois, quand même, juste pour le plaisir, non ? Non. Bon, d’accord.
Je pensais que la route nous amènerait jusque sur le bord des dunes, mais on se contente de les voir un peu à l’écart, à deux ou trois kilomètres. Après une petite hésitation, je transforme une fois de plus le Pourquoi pas ? en véhicule tout terrain, et m’engage sur un petit chemin de terre. Petit, il l’est vraiment. Il est plus conçu pour les quads que pour les vans. Mais ça roule quand même, et le Pourquoi Pas ? poursuit son chemin bien sagement, pour nous emmener jusqu’au pied des dunes.
Elles sont juste devant nous. Une petite pente, pas trop raide, permettrait même au van d’aller faire un tour dessus. Je vérifie à pied, ça a l’air passable. Je n’ai pas encore fait trop d’expérience de ce genre avec Pourquoi Pas ?. Entre autre parce que je n’ai pas nécessairement envie de l’abîmer. Mais je décide de faire le test. Après quelques essais, pourtant, je dois bien me rendre à l’évidence qu’il ne montra pas. En fait, il monte sans problème la partie la plus raide, mais le sable devient plus léger et moins dense après, et c’est là qu’il patine. Autant ne pas trop insister, donc, et ne pas rester coincé au milieu de nul part.
À la place, on va se promener bien sagement, à pied sur les dunes. Non sans avoir mangé un magnifique sandwich rôti de boeuf + fromage à la crème + avocat avant de partir à l’aventure. C’est quand même agréable de varier la nourriture des fois !
On repère une belle grosse dune un peu plus loin. On va donc lui rendre visite. On fait la course jusqu’au sommet, d’où la vue est assez grandiose, et un peu déprimante en même temps. Mais en même temps, quand on aime les immensités vides à perte de vue, c’est pas mal !
Immense et vide, mais qui se prête parfaitement à un petit 360. Une Danielle à droite, une Danielle à gauche.
J’en profiterais également pour faire quelques courses de descente dans le sable, histoire de ne pas perdre la main, maintenant que je sais si bien faire !
L’heure tourne tranquillement. On refait donc les 6 kilomètres, on tourne à gauche, 12 kilomètres, et on tourne, cette fois, à gauche, histoire de reprendre la route en direction de la 395. Ce n’était pas l’itinéraire que j’avais envisagé de prendre, mais celui-ci marche tout aussi bien, et nous fait arriver un peu plus au nord. Ce qui veut dire plus de 395. C’est parfait.
La route est longue. Une centaine de kilomètres, environ. Au milieu de rien. D’autant plus longue que je continue à rouler à 90 km/h, un rythme qui convient parfaitement au Pourquoi Pas ? et à son réservoir. Bon, d’accord, je craque deux fois en essayant de voir les limites que je peux atteindre. 130 sur du plat, je n’ose pas aller beaucoup plus loin. 150 en descente, j’ai l’impression qu’on va s’envoler. Je n’insiste pas plus.
Et puis finalement, une dernière immense descente, une grande vallée très large. Aucun doute, c’est la signature de la 395. Je la devine qui est là bas, qui nous attend.
On roule encore un peu. Le paysage est beaucoup moins ennuyeux, entre autre à cause de « Albert Rim », une falaise d’une cinquantaine de mètres de haut, qui s’étend sur une soixantaine de kilomètres en longueur. Il y a simplement un peu plus de choses à voir ici.
Et puis on arrive à une aire de repos ; celle-ci était indiquée sur la carte, et je la voyais bien comme halte potentielle. Il n’y a aucun panneau interdisant quoi que ce soit, c’est donc plutôt bon signe. Certes, on est juste à côté de la route, mais côté trafic, ça devrait être plutôt tranquille j’imagine.
Il est encore un peu tôt. Je ressors donc les massues, histoire de pratiquer un peu mes habiletés de jongleur. Avec trois quilles, ça laisse encore pas mal à désirer. De son côté, Danielle pratique son « contact jungling » avec sa boule de verre. C’est toujours aussi fascinant. Histoire de varier les plaisirs, on s’essaie aussi avec trois balles. Ça, personnellement, j’ai plus vraiment de problèmes. L’étape d’après va être d’apprendre des « figures », et c’est pas gagné. Le ciel commence à se dégager un peu. On pourrait avoir une très belle journée demain. En tout cas, on a droit à un magnifique couché de soleil !
Et puisque l’on est toujours sur une thématique de variation des plaisirs, je m’essaie au Didgeridoo pour la première fois, et je m’en sors pas trop mal après quelques essais infructueux. En fait, j’aime énormément l’expérience et la sensation. Je joue donc pendant un bon moment. Ne me reste plus qu’à apprendre la respiration circulaire. Ça, c’est pas gagné !
Le soleil disparaît complètement, et on migre bien au chaud à l’intérieur du van. La température a légèrement remonté juste à la fin de la journée, et on est relativement bien dehors, mais faut pas exagérer non plus.
Je prépare une petite salade variée pour le repas (concombre, maïs, haricot rouge, fromage, betterave) et on mange une petite part de gâteau au fromage en guise de dessert, en hommage aux gens dont c’est l’anniversaire le 5 novembre !
Pour couronner le tout, j’ai même le droit à ma petite séance de musique rien que pour moi dans le van. Moi je dis qu’il y en a qui sont chanceux quand même !