Archive for the ‘[Rocheuses Canadiennes]’ Category
J’en étais venu à me demander si j’allais y arriver
Je me réveille bien reposé ; faut dire qu’après la randonnée d’hier, je m’attendais à bien dormir ! Comme bien souvent, j’étais content d’avoir de la compagnie hier au soir, mais à matin, j’ai envie d’être tranquille. J’hésite entre plusieurs options pour mon programme de la journée, avant de finir par me décider. Je discute encore 5 minutes avec Rodger, qui hésite sur la route à prendre par la suite. Je lui recommande très fortement la 395, pour l’avoir faite moi même.
Et puis je prends la route de Lee Vining à nouveau. En fait, je veux juste compléter mon ravitaillement, en vue de pouvoir rester indéfiniment dans Yosemite. Côté nourriture, ça va. J’ai juste envie de me racheter quelques barres de céréales. Vous l’avez compris, quand je suis en randonnée, c’est ce que je préfère. J’en profiterais aussi pour faire le plein d’essence, une petite connexion internet pour vérifier si j’ai des nouvelles du contrat que je dois faire, prévenir Jane que finalement j’arriverias « un jour », et surtout… oui ! Je l’ai fait ! J’ai pris une douche ! Tanné de la petite barbe ridicule, de la petite moustache pas mieux, j’ai aussi rasé tout ça. Dire que c’était, au début, juste un petit délire pour la pendaison de crémaillère ! Il était plus que temps que tout cela disparaisse. Enfin maintenant, je me reconnais plus ! C’est malin !
C’est pas vrai, je ne vais pas à Burning Man, et je suis pas un drogué d’abord !
J’approche de la frontière avec appréhension. Les premières fois, j’annonçais que je venais pour dix jours, ou pour deux jours. Là, l’affirmation est claire : je ne sais pas combien de temps je vais rester, probablement un mois ou deux. Pas question de mentionner Burning Man, par contre. Ils vont démonter le van à la recherche de toute la drogue que je n’ai pas de toutes façons. À vrai dire, je suis relativement surpris. Les choses se passent assez vite pour une fois ! Une dizaine de questions et une fouille du Pourquoi Pas ? suffisent à rassurer le douanier. Je peux donc reprendre la route assez rapidement.
Je suis en mode autoroute. Je veux être à Portland demain, et y passer un peu de temps. Non, je n’ai pas oublié les 24 brasseries. Évidemment, quand on est sur l’autoroute, le paysage perd vite en intérêt. Mais les kilomètres passent vite, et puis il y a des aires de repos. J’installe Pourquoi Pas ? confortablement pour la nuit. Cette nuit, je dormirais en bas. Inutile de déplier plus que le nécessaire. Je retrouve mon petit confort, ma petite vie à moi, et ça fait du bien. Au chaud, bien confortable, dans mon petit 5 mètres carrés que j’aime tant.
En route vers les États Unis
Un peu de gestion internet, un peu de planification.. je me promène quand même un tout petit peu. Je reconnais les noms de rue. Le plan de la ville se reconstruit très rapidement dans ma tête. Je trouve ça dommage de ne pas pouvoir rester quelques jours. J’espère que je repasserais, et que j’en profiterais un peu plus.
Je reprends la route. Direction : les États Unis. Juste avant la frontière, je fais une petite pause, vérifier que je n’ai rien de compromettant dans le van. À priori, tout est correct. Je me suis arrêté dans un parking entre un Canadian Tire et un Bureau en Gros. Grosse erreur ! Ça me coûte une fortune : je refais le plein d’encre pour l’imprimante (j’ai l’impression que je vais imprimer pas mal au milieu du désert) et j’offre une batterie auxiliaire toute neuve à Pourquoi Pas ?. Il l’a bien mérité, lui qui va fêter son 9000e kilomètres depuis le départ aujourd’hui.
Sushis à volonté
J’abandonne Virginie dans un Starbuck. Moi, je pars en quête d’un sushi à volonté. C’est l’un des rares trucs à prix raisonnable à Vancouver, et j’ai envie de me payer un petit plaisir. Petit plaisir un peu décevant. Les prix, en effet, sont très bas, mais la qualité, très moyenne. J’en avais goûté des meilleurs à Vancouver, mais à d’autres places. Tant pis.
De retour à Vancouver
J’ai l’impression qu’il n’existe pas un petit chemin de terre au Canada qui ne soit pas passant. On a beau s’engager sur un chemin forestier, sur lequel il est précisé « voie non entretenue », il y a quand même 4 ou 5 voitures pour passer à côté de nous dans la matinée. Enfin, comme ça on sera réveillé tôt !
On replie rapidement le van ; mais que partiellement en fait. Aujourd’hui, je dépose Virginie à Vancouver, avant de continuer la route, alors on doit faire une pause pour ranger tout ça. Au milieu de cette petite route de forêt, c’est pas l’idéal. Par contre, une vingtaine de kilomètres plus loin, sur le bord d’un petit lac, c’est beaucoup plus sympa.
Virginie remet toutes ses affaires dans son sac. Moi je recommence à prendre possession de mon espace. Je sais que ça me prendra à nouveau quelques jours pour que tout soit à nouveau à la bonne place. En même temps, je commence à pas mal bien tout connaître, donc ça devrait se faire plutôt bien.
La route jusqu’à Vancouver est aussi belle que la dernière fois que je l’ai prise, mais je préfère ne pas m’arrêter. J’ai pas mal de route à faire, je veux essayer d’avancer un peu vite. On arrive au centre ville de Vancouver vers 12h30. C’est bizarre de se retrouver ici. J’avais quitté Vancouver en me disant que j’y reviendrais un jour, mais je n’ai pas réalisé que c’était aujourd’hui. En même temps, je ne reviens pas vraiment à Vancouver. Je ne fais que passer. Je m’y arrêterais peut être quand même, mais plus tard. Mon itinéraire change beaucoup trop ces derniers temps pour que j’essaie de planifier quoi que ce soit.
Fin de soirée avec une bière à Whistler, Mammoth Mountain ou les Deux Alpes
Je revois avec émotion le parking où j’ai failli mourir congelé un peu plus d’une année plus tôt, et où une voiture de police était venue vérifiée si j’étais encore en vie. La route tourne beaucoup, on est en fin de journée, on va vers l’ouest, c’est pénible. Je commence à fatiguer pas mal, et j’ai hâte de m’arrêter un peu. L’objectif, c’est d’arriver à Whistler. On tournera un peu en rond avant de finalement trouver un parking gratuit, puis on ira se balader tranquillement. J’ai exactement la même impression que la première fois : « bienvenue dans une station de ski ». Whistler au BC, Les deux Alpes en France, ou Mamoth Mountain en Californie, c’est exactement la même chose. Le même style de bâtiment imitation « chalet super cool », toutes les mêmes boutiques, toutes les mêmes marques de vêtements. Je déteste cette ambiance. Je déteste ce feeling. Pourquoi les stations de ski doivent se ressembler ? Pourquoi est-ce qu’elles ne peuvent pas avoir un peu de personnalité ? Sans doute pour que les amateurs de plein air ne soient pas trop dépaysés. « Zut, j’ai oublié mes gants à 800000 kilomètres d’ici ; pas grave, je vais trouver exactement pareil la même paire. Ouf, je suis sauvé ».
En fait, ce qui me plaît, c’est qu’à peine rentrer dans la partie piétonne de la ville, on est tombé sur une brasserie. Une vraie : ils brassent la bière eux même. Et puis ils ont internet. Alors on fait un tour rapide en ville, et puis on revient se poser, tranquillement, avec les ordinateurs. Je m’offre une petite rousse sans prétention, mais quand même bien agréable à boire. C’est la journée des trains : il y en a un, miniature, qui traverse toute la brasserie. On le voit régulièrement passer au dessus de nos têtes. J’ai vraiment l’impression que mon père va préférer cette journée à mes récits d’ascension de tours à Chicago !
On quitte la brasserie vers 23h pour retourner au van. L’idée, c’est de reprendre la route vers Vancouver. On trouvera bien quelque part où dormir à un moment ou à un autre. On trouvera, en effet, après une longue recherche. Enfin, comme ça les camions sont à nouveau là pour nous bercer !
Une dernière grande descente
On peut ensuite enchaîner sur l’immense descente vers Pimberton. Pentes raides, entre 7 et 13%, sur plus d’une dizaine de kilomètres, avec des vraies épingles à cheveux à nouveau. Le frein moteur de Pourquoi Pas ? fait ce qu’il peut, mais il y a des limites à ce qu’on peut lui demander. Alors le frein à pied fonctionne aussi. Beaucoup. Trop ? Peut être… difficile à dire si c’est psychologique ou pas, mais j’ai l’impression que vers la fin, ils sont quand même pas mal moins efficace. Ça freine toujours, mais sans doute un peu plus lentement. Dans le doute, je bloque Pourquoi Pas ? en première pour les deux derniers lacets. La voiture en arrière s’impatiente sans doute un peu, tant pis pour elle. Arrivée en bas, on laisse un cinq minutes de repos bien mérité au van.
Joffre Lake
C’est un vrai bonheur à conduire, du moment que l’on n’est pas pressé. Mais pressé, de toutes façons, on ne l’est pas. On s’offre quelques pauses, parfois, quand le paysage nous attrape à pleine main et nous empêche de continuer. On arrive à Joffre Lake. Encore un qui était tout blanc tout gelé l’année dernière. Encore une comparaison photo qui mériterait d’être faite.
L’année dernière ? http://sc.c-pp.biz/rockies/?p=396
Une vraie route de montagne qui tourne
Je me souviens parfaitement des deux autostoppeuses que j’avais pris à Whistler l’année dernière et qui s’en allait à Pimberton. Je me souviens parfaitement l’une d’elle me disant que la route entre Pimberton et Lilloett était raide. Tout comme je me souviens parfaitement avoir bien rigolé de ce commentaire au moment d’écrire mon blog. En refaisant la route dans l’autre sens, je vois plusieurs possibilités :
– j’étais tellement congelé suite à la nuit que j’avais alors passé dans la voiture que mes neurones ont oublié à quoi ressemblait la route
– je conduisais alors un bolide de course, tellement agréable et confortable, que je me suis même pas rendu compte qu’il y avait des virages.
– la route dans un sens n’est pas du tout pareil que la route dans l’autre sens.
En tout cas, ce qui est sûr, c’est que je viens soudainement de me retrouver en France, avec une vraie route de montagne devant moi. Ça grimpe, ça tourne, ça détourne, ça contretourne, ça use le volant, ça use l’accélérateur, ça use les freins. Après les autoroutes 8 voies des Rocheuses, c’est le vrai baptême de la montagne pour Pourquoi Pas ?. Il grimpe tout cela avec la sérénité due à son grand âge. Tient… on compte en année chien, mais on ne compte jamais en année voiture. Un dodge cargovan de 20 ans, ça lui donnerait quel âge en être humain ? Toujours est il qu’il en a vu du chemin, et que ça lui a sans doute apporter une certaine sagesse. Ou peut être est-ce le chauffeur qui a gagné en maturité, et perdu en stress et précipitation. Ça monte tranquille, ça monte relaxe, mais ça monte. Le moteur semble chauffer un peu, mais pas plus que ça.
Les trois « vieilles » dames, et un autre train
Comme prévu, on ne s’arrête pas à Lilloett. On se contentera de regarder la ville depuis l’autre côté de la vallée. Par contre, on s’arrêtera juste après juste au dessus d’un magnifique lac de barrage, dont je me suis rappelé l’existence à la dernière minute. Assises à l’ombre, trois dames d’un certains âges discutent (on m’a fait remarquer que dire « trois vieilles madames » alors qu’elles devaient être dans la quarantaine-cinquantaine, c’était pas correct ). Elles commentent le lac, disent à quel point il est beau. En français, avec un magnifique accent québécois. Et puis elles commentent aussi la lumière que l’on voit à l’horizon. Serait-ce un train ? J’hésite à confirmer avec mes yeux perçants que oui, en effet, c’est un mini train qui s’en vient. Je me contente de les écouter. Je les trouve très sympathiques ces madames. On dirait trois grands mères, assises sur le banc du village, en train de commenter les dernières inventions des jeunes que y’a plus d’jeunesse ma pov’dame. Sauf que leur village, j’en ai confirmation en voyant la plaque d’immatriculation de leur voiture quand elles partent, il est à plusieurs milliers de kilomètres d’ici. En fait, je les imagine toutes les trois faisant leur crise de la cinquantaine. Les trois amies qui, alors qu’elles passaient l’après midi ensemble chez le coiffeur, sont parties sur un délire. Tout plaquer. Hommes, chiens, chats, ados en crise, vaisselle et cuisine, et partir dans l’ouest, entre filles. Thelma et Louise sont soudainement devenu l’emblème de leur road trip, et elles écoutent de la musique à fond sur l’autoradio de la voiture. Oui, décidément, elles me plaisent ces madames.
Le train, pendant ce temps, continue d’approcher. Encore une fois, quand je vois les endroits où il passe, je me dis qu’être chauffeur de train, un été de temps, pourquoi pas ! Et encore une fois, je me demande combien d’agrandissement je vais devoir faire parvenir au Charbinat !